Jadis la gauche aimait croire à cette soi-disant « alliance
des exclus » reposant souvent sur une communauté
d'idées aussi factice que ponctuelle. Les minorités ethniques
étaient censées être par définition les alliées
naturelles des femmes, des gais et lesbiennes, des environnementalistes,
des marxistes, etc. Bref des combattants dévoués à
la cause du renversement du « méchant pouvoir
mâle hétérosexuel blanc capitaliste ».
Or, aujourd'hui l'arrivée des immigrants des pays du tiers monde
modifie considérablement cette donne. Et ce sous plusieurs aspects.
Tout
en nuances
D'abord en ce qui a trait à la question religieuse. Aujourd'hui
nombre d'immigrants ont sur les questions sociales telles l'avortement
ou l'homosexualité des positions bien plus conservatrices que les
Canadiens ou Québécois d'origine. Des affirmations regroupant
« les femmes et les minorités visibles
» étaient déjà au départ des associations
fort douteuses. Elle ne le sont que davantage aujourd'hui. Le multimillionnaire
pakistanais musulman de Silicon Valley n'a rien à foutre de la lesbienne
séparatiste et vice-versa.
Ailleurs, le méchant pouvoir de l'homme blanc capitaliste oppresseur
des Juifs et autres minorités ne tient plus la route depuis déjà
longtemps. En fait, la situation est à ce point ridicule que certaines
personnes continuant d'associer tous ces groupes ensemble n'ont même
pas la moindre idée qu'en certains cas ce supposé «
homme blanc » capitaliste est en réalité
juif, et que derrière nombre des plus importants succès technologique
ou du monde des sciences se trouve en fait un Asiatique.
Résultat de tout cela: on parle encore de la droite et de la gauche
en des termes et associations ayant des liens de plus en plus lointains
d'avec la réalité d'aujourd'hui. On parlera par exemple du
fameux « digital divide »
entre les Noirs et des Blancs alors que les plus importants écarts
entre ceux qui disposent de moyens d'accès à l'internet et
ceux qui n'en ont pas se trouvent de fait entre les Asiatiques au sommet
et les Latinos au bas de l'échelle.
L'argument
de l'argent
Toujours pas convaincu des immenses changements qu'apporteront dans les
années à venir la composition raciale nord-américaine?
Jetez un coup d'oeil au Forbes 400. Chaque année depuis 1982
le magazine Forbes dresse la liste des 400 citoyens américains
les plus riches.
Au début du siècle il n'y avait pratiquement que des grandes
fortunes WASP, les Mellon, Carnegie, Vanderbilt, Rockfeller, etc. Par la
suite vinrent se greffer nombre de fortunes juives de fils d'immigrants
et que l'on connaît encore aujourd'hui: Ralph Lauren (né Ralph
Lifschitz), Lew Wassermann ou les frères Newhouse (Cosmopolitan,
Vogue, etc). Parmi ces fils d'immigrants, pas un seul membre de ce que
l'on appelle aujourd'hui les « minorités visibles
».
« Jadis la gauche aimait croire à cette soi-disant
"alliance des exclus" reposant souvent sur une communauté d'idées
aussi factice que ponctuelle. Aujourd'hui l'arrivée des immigrants
des pays du tiers monde modifie considérablement cette donne.
»
|
|
Or, parmi non pas les fils d'immigrants mais bien les immigrants eux-mêmes
quels noms a-t-on vu apparaître en force ces deux ou trois dernières
années? Côtoyant Ophra Winfrey, des noms tels Sanjiv Sidhu,
Amar Gopal et Rajendra Singh d'Inde, ainsi que d'autres tels Ronnie Chan,
Jerry Yang, John Tu, David Sun, Jeong Kim ou Charles Wang. Sans doute est-ce
pour cela qu'on pouvait lire dans l'édition de novembre 1999 de
Commentary que « les asiatiques avaient suivi
le pattern du succès académique et de l'entrepreneurship
économique démontré par les Juifs américains
avant eux », ou encore que le magazine Courrier International
clamait à l'automne 1999 que les Asiatiques étaient désormais
les nouveaux Juifs des universités. Quant à l'hebdomadaire
Newsweek il nous apprenait au mois de février 2000 que de
tous les groupes ethniques aux États-Unis, les Asiatiques et «
Pacific Islanders » avaient la plus forte
proportion de diplômés (College Graduates) ainsi que
le revenu annuel moyen le plus élevé avec 45 249 $.
Meanwhile,
in England
On retrouve d'ailleurs une tendance similaire en Angleterre: «
Le succès des nouveaux venus asiatiques surtout Indiens et
Pakistanais.....rendra l'Angleterre de 1999 encore plus semblable à
la Californie. La proportion d'asiatiques inscrits dans les collèges
et universités britanniques sera de nouveau plus élevée
que celle des Blancs d'origine et ils obtiendront en moyenne de meilleurs
résultats. Le diplômé d'école d'administration
typique tout comme le jeune économiste anglais sera bientôt
asiatique » (Globe and Mail Report on Business,
Janvier 1999).
Ce changement aura une grande importance. Au sens où par exemple
il donnera lieu à une révision croissante des traditionnelles
lignes de polarisation droite/gauche. Il y a quelques années le
premier exemple de ces fissures s'était déjà produit
entre les Noirs et la communauté juive, les premiers accusant ces
derniers d'avoir tourné le dos aux causes civiles en faveur d'un
engagement croissant envers Israël, les seconds d'avoir transformé
cette même lutte pour les droits civiques en une espèce de
Black Power Trip.
Le rôle des Asiatiques sera quelque peu différent. D'abord
il ont commencé par bousculer cette idée de discrimination
positive. En effet celle-ci s'appliquant d'abord principalement aux Noirs
ou aux Latinos, les étudiants asiatiques se voyaient souvent défavorisés
de ce point de vue. D'autre part, s'ils sont bien en voie de remplacer
pour de bon les Juifs dans nombre de sphères d'activités
à titre de minorité jouissant de la plus forte sur-représentation,
ils ont déjà commencé à le faire en ce qui
a trait aux exemples de discrimination notoires dans le domaine scolaire.
Avant, on parlait des quotas discriminatoires à l'endroit des Juifs
à l'Université McGill. Aujourd'hui l'on parle de la cause
du Collège Lowell à San Francisco avec ses quotas imposés
relativement au nombre d'étudiants chinois pouvant y être
admis.
Ô
Canada...
Quel sera l'événement marquant des prochaines décennies
au Canada? Le triomphe de l'Indépendance? Celui du Fédéralisme?
Non. Ce sera le remplacement des Juifs par les Asiatiques et les membres
d'autres minorités visibles comme nouvelle image de la notion de
diversité. Et ce, certains membres de la communauté juive
l'ont parfaitement compris et s'adonnent déjà à un
exercice de révision de nos notions admises en regard de cette idée
de promotion de la diversité dans la sphère sociale. David
Horowitz en tête.
Dans son dernier ouvrage Hating Whitey, il note par exemple qu'un
langage virulent de la part de certains leaders de la communauté
noire américaine à l'endroit de la majorité blanche
nourrit un dénigrement répandu de nombre d'Américains,
incluant bien sûr ceux d'origine européenne mais également
des Juifs et des Arabes qui, bien que d'ethnies minoritaires et souvent
à la peau foncée, sont désignés comme Blancs
tant pour « les besoins officiels que sous la pression
de certains groupes de défense telle la National Association
for the Advancement of Colored People. »
Mieux encore, et c'est là que la venue des Asiatiques change tout,
il rappelle désormais certains faits que l'on préfère
souvent ignorer: « Selon une certaine gauche militant
en faveur des droits civils, c'est la force du racisme institutionnalisé
qui fait de la notion de chance égale un mythe. Les tests d'admissions
scolaires, fait-on alors valoir, sont culturellement biaisés de
façon à apparaître neutres alors qu'en fait ils favorisent
les membres du groupe racial dominant. Mais cette affirmation est facilement
réfutée. Les immigrants asiatiques qui doivent composer avec
et une culture et une langue étrangère, obtiennent constamment
des résultats les mettant aux premiers rangs des tests standardisés,
surpassant les Blancs et obtenant l'admission dans les meilleures institutions
scolaires. »
Au début du siècle dernier les Juifs fondaient Hollywood.
En ce nouveau siècle qui vient de s'amorcer Fortune Magazine
note qu'il n'est pas exagéré de dire que sans les immigrants
indiens, Silicon Valley ne serait pas ce qu'elle est aujourd'hui. Be
Ready! La vague de fond ne fait que commencer.
|