Des photos célèbres ont même donné lieu à
des montages (voir « Les cent photos du siècle
»). La publicité utilise les trucs de la propagande;
là, on vend un produit; ici, une idée. Dans les deux cas,
il y a association d'idées, d'images, de messages, qui cachent le
contre sans nécessairement montrer le pour. La désinformation
va plus loin que la propagande: elle ment, alors que la propagande, en
soi, ne ment pas; la répétition du message joue un rôle
crucial dans les deux cas et dans les deux cas l'on vise l'hypnose de la
clientèle visée, l'amener à croire au lieu
de réfléchir (réfléchir implique une
relation bi-directionnelle entre les faits et leur interprétation).
Il est souvent difficile de ne pas se laisser influencer par les messages
qui nous sont catapultés de part et d'autre et surtout de distinguer
le vrai du faux, de remarquer la supercherie, de déceler
sous la subtilité d'un message la fausseté du raisonnement
ou l'intention de duper. La propagande et la désinformation misent
beaucoup sur l'ignorance de la clientèle visée. Pour qu'elles
atteignent leur but, elles doivent donc autant que possible monopoliser
les moyens de communication. C'est pourquoi la censure et la mainmise sur
les médias caractérisent les États totalitaires.
Mais il n'est pas nécessaire que l'État soit totalitaire
pour qu'il obtienne un certain succès dans la désinformation,
dans la manipulation de l'information à ses propres fins, dans la
propagation de messages (à même les impôts payés
par tous les payeurs de taxes) pour justifier ses interventions, ses politiques,
et pour accorder des privilèges à ceux qui se prêtent
à un tel jeu. L'État dispose au départ d'un énorme
budget de publicité. Chaque ministère a sa direction des
Communications où l'information et la propagande s'entremêlent
subtilement pour être mieux vendue à la population. Il dispose
aussi de nombreuses tentacules dans toutes les sphères d'activité,
via ses subventions, ses privilèges fiscaux, ses « intervenants
» que l'on retrouve partout comme une sorte de brigade de
choc chargée de veiller sur nous, et de façon plus générale
sa « Nomenklatura » (ses directeurs de
la santé « publique » par exemple) qui
propage les messages du gouvernement en utilisant le même langage
biaisé.
Éliminer
l'esprit critique
Or, ce langage s'apparente au Newspeak, un mot inventé par
George Orwell dans son roman 1984 (publié en 1946) pour désigner
le vocabulaire imposé par Big Brother. Le Newspeak
c'est, à proprement parler, un langage... impropre. Plus précisément,
quand les mots ne correspondent pas à la réalité,
quand les mots sont remplacés ou que leur sens est modifié,
le seul résultat recherché ne peut être que d'effacer
la mémoire, de manipuler les comportements (c'est ce que fait, avec
toutes les bonnes intentions du monde, l'ingénierie sociale), d'éliminer
l'esprit critique et l'opposition aux visions des étatistes.
L'inventaire des formes de Newspeak qui suit est loin d'être
exhaustif mais ces quelques exemples vont permettre d'illustrer ce qui
précède:
1) Dénonçons d'abord l'obésité maladive non
seulement de l'appareil gouvernemental et de son fonctionnement mais aussi
de ce qu'il produit: des législations de plus en plus complexes
et un labyrinthe de procédures où le citoyen ordinaire est
de plus en plus perdu et perd un temps considérable à connaître
les règlements et à s'y conformer. Ceci se traduit évidemment,
pour ce qui est du Newspeak, par des dénominations d'une
longueur à n'en plus finir, même lorsque les grands penseurs
bureaucrates tentent de les résumer par des sigles! Exemple: Les
CLSC et les CHSLD de la MRC xyz.
2) En deuxième lieu, je dénonce l'usage généralisé
du mot « réforme » dans tous
les changements que fait le gouvernement. Toutes ces prétendues
réformes sont réellement pondues à l'interne, par
les intervenants du gouvernement et le gouvernement lui-même qui
décide de confier aux gribouilleurs à sa solde (dont un nombre
imposant de conseillers juridiques) la rédaction des changements
selon les objectifs qu'ils ont définis. Si le citoyen est interpellé
dans ce processus (par des « consultations »
manipulées), c'est seulement pour donner l'apparence de la démocratie.
Une réforme doit en principe conduire à une amélioration
majeure. Or, ce que l'on constate, c'est que le mot sert réellement
à donner une image positive de changements pour la plupart discutables
et qui réduisent de plus en plus la liberté des citoyens.
Un mot plus juste pour décrire des processus législatifs
tels la réforme de l'éducation du ministre Legault
ou la réforme municipale de la ministre Harel serait rétrogression.
« Dans le langage crochu des étatistes, le gouvernement ferait
preuve de "volonté politique" quand il introduit des changements
quelle que soit l'opposition à ces changements. »
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3) Que dire aussi de l'emploi abusif du mot « public »
dans le but évident de sacraliser et d'auréoler tout ce que
fait le gouvernement? On peut dire qu'un endroit est « public
» quand il est accessible à tous (mais pas à
tous en même temps...); mais qui a-t-il de public dans la santé,
dans l'éducation? Des expressions telles que santé publique,
instruction publique, terres publiques, intérêt public, bien
public, fonction publique, secteur public, ont bien sûr fait leur
chemin dans le vocabulaire courant (le dictionnaire ne fait que consacrer
l'usage) mais elles sont toutes inexactes. L'adjectif donne au nom une
qualité qu'il n'a pas. C'est une abstraction qui correspond peu
à la réalité. La réalité, c'est que
ce que les moines du collectif définissent comme public
démontre sa plénitude d'incompétence quand il y a
absence de concurrence avec le privé, et par privé
comprenons tout ce qui est produit par l'initiative des individus et d'entreprises
qui ne dépendent pas de transferts gouvernementaux pour prendre
en charge leur avenir. Le public ne peut pas se définir de lui-même.
L'intérêt public ou l'intérêt général
est irréel. Ceux qui prétendent le défendre sont les
premiers à refuser d'en discuter car cela impliquerait qu'on puisse
discuter de leur définition de l'intérêt général.
Au lieu de dire « directeur de la santé publique
», pourquoi ne pas dire « directeur de
la santé », tout simplement? Ce serait moins
prétentieux. Ces petits directeurs fascisants (qui se sentent sans
doute inspirés par une vocation de sauveteurs de la race) succomberaient
peut-être moins à la tentation de prétendre parler
pour tout le monde.
Autre exemple: les terres publiques n'ont de public que le nom; elles sont
réellement des terres appartenant à tous les individus (via
les impôts) et qui sont gérées (vaille que vaille,
ce qui appartient à tous n'appartenant à personne) par le
gouvernement. Pourquoi pas les terres de Jacques Brassard ou si vous préférez
les terres du gouvernement, ou les terres pillées selon le bon plaisir
de l'État omniprésent, omniscient et Tout-Puissant? Ce n'est
pas un hasard si l'on parle maintenant d'un gouvernement mondial à
son image. Comme un virus, il se propage d'État en État et
il veut généraliser pour tous ces États maladifs et
gangrenés un modèle d'État mondial où les citoyens
seraient encore plus éloignés des centres de décision.
Je profite de l'occasion pour saluer mon public!
4) Que dire du mot « collectif »? Tout comme le
mot public, les étatistes emploient collectif pour abaisser tout
ce qui ne l'est pas et justifier leurs privilèges d'apparatchiks
ou de syndicalistes. Le summum de l'idéologie collectiviste
est atteint dans l'expression « richesse collective
» utilisée par des péquistes, des libéraux,
et même... des adéquistes pour désigner la production
de tous les secteurs de l'économie. C'est comme si cette richesse
leur appartenait et qu'ils pouvaient en disposer comme bon leur semble.
C'est la théorie des prix (ou de la valeur), à la sauce marxiste,
que l'on retrouve dans Le Capital de Karl Marx, qui nous est inculquée
hypocritement, mais efficacement, au moyen de la désinformation
et de notre « système » d'éducation,
pour nous dire que tout ce que nous faisons appartient à l'État,
non pas à nous-mêmes. Or, ce que nos petits étatistes
locaux ne veulent pas comprendre (imaginez ce que leurs semblables font
à grande échelle), c'est que l'exercice de la démocratie
est indissociable d'un régime privé où peuvent éclore
toutes les initiatives.
5) Et cette expression sortie de la pensée globalisante et collectiviste:
les « choix de société »
ou les « projets de société »?
Il ne faudrait pas, semble-t-il, en discuter, parce que ce sont des acquis
(comprenez des privilèges). Le monde immuable des chérubins
et des séraphins a été remplacé par celui de
l'État dans le langage soi-disant révolutionnaire, mais combien
sclérosé, de la pensée étatiste. Les «
projets » ont été légiférés,
au mépris de toute opposition ou si ce n'est de toute mise en garde,
ils sont devenus des « choix » qu'il ne faudrait
plus questionner. Ces gens-là nous disent: ne touchez pas aux taxes
qui sont nos revenus! Ne touchez pas à toutes les législations
qui nous permettent d'augmenter nos revenus (donc de voler la population)
et de faire de nous un monopole dans les services financés par les
citoyens! Il ne faudrait pas questionner ces choix-là? Mais voyons,
il faut toujours remettre en question ces choix d'autant plus qu'ils ont
souvent été faits sans que la population ait été
pleinement informée des alternatives et consultée adéquatement.
Voilà donc l'affirmation d'un véritable esprit dialectique,
celui qui ne sert pas qu'à justifier une seule face de la médaille...
6) Un petit... mot sur l'expression « volonté politique
». La règle de la majorité dans un régime
démocratique peut conduire à la négation des droits
de la minorité, en particulier lorsque les élus n'ont pas
obtenu de mandat clair pour effectuer les changements qu'ils font par la
suite et que ces changements briment des droits fondamentaux comme celui
par exemple des citoyens, dans le cas des fusions municipales, de décider
de leur propre gouvernement. Dans le langage crochu des étatistes,
le gouvernement ferait preuve de « volonté politique
» quand il introduit des changements quelle que soit l'opposition
à ces changements. L'État interventionniste est par définition
un État qui s'impose. La volonté politique n'est plus
l'expression de la volonté du plus grand nombre de citoyens mais
plutôt celle du chef de gouvernement qui impose, contre toute opposition,
les désirs de certains groupes de pression. L'expression est utilisée
pour louanger le gouvernement mais elle a un sens dictatorial dans les
faits. Demander au gouvernement qu'il ait le « courage
de gouverner » c'est l'absoudre au départ de
tous les abus de pouvoir.
7) Je termine brièvement par d'autres expressions agaçantes
et colorées. « Travailleur social »,
ça fait pédantesque n'est-ce pas? Ce sont des techniciens
en sociologie. Nous sommes tous des travailleurs... sociaux, à plus
ou moins grande échelle. « Agents de conservation
de la faune »: quand ils ne s'occupaient que de chasse,
on les appelait gardes-chasse; pourquoi pas « gardes-faune
» pour éviter la confusion avec les produits de conservation?...
« Travail au noir »: ceci exprime
l'intention des étatistes de vouloir tout taxer, y compris (s'ils
en étaient capables) le travail domestique (le travail que vous
faites pour vous-même, dans vos loisirs). Pourquoi pas «
travail non taxé »? « Mandarins
de l'État »: pour qui se prennent-ils? Ceux qui
les ont côtoyé ont peut-être réalisé que
nos mandarins sont plutôt des téteux du parti
au pouvoir (et qui agissent comme un État dans l'État). Ah!
Un petit mot sur « Assemblée nationale
»... Si on définit généreusement (et
non pas de façon restrictive) la nation comme étant l'ensemble
des individus sur un même territoire, il faut bien admettre que l'assemblée
nationale est loin d'être la réunion de tous ces individus
et que seule une partie (la minorité) y exerce le pouvoir. En raison
du régime électoral, une forte proportion n'est pas représentée.
« Chambre des députés »
serait plus... représentatif.
J'invite tous les intéressés à cette critique du bon
parler étatiste à faire part de leurs commentaires et ajouts.
Nous pourrions en faire un petit dictionnaire écrit en collaboration.
De nombreux mots pourraient faire l'objet d'un article, comme liberté,
démocratie, droits, État, collectif,
fourmi..., etc. etc.
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