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Montréal, 13 septembre 2003 / No 128 |
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par
Pierre Desrochers
Un événement d'importance pour l'industrie forestière internationale, le Congrès forestier mondial, se tiendra à Québec du 21 au 28 septembre prochain. Durant cette semaine, les médias nous abreuveront inévitablement de scénarios apocalyptiques sur l'avenir des forêts dans le monde. Ainsi, l'entrefilet qui annonce la tenue de l'événement dans l'édition de cette semaine du journal Les Affaires rapporte que la forêt |
Une
réalité moins dramatique
Les arbres ont certes toujours été abondamment sollicités
par les humains pour se chauffer, se loger, construire d'innombrables objets
et, plus récemment, fabriquer du papier et des produits cartonnés.
On observe des périodes de déforestation intensive à
plusieurs reprises dans l'histoire de l'humanité, notamment en Grèce
antique et dans l'Angleterre de la fin du Moyen-Âge.
Les gains de productivité dans le secteur agricole ont également favorisé l'expansion des forêts. Par exemple, en 1940 les agriculteurs américains produisaient 56 millions de tonnes métriques de maïs en utilisant 31 millions d'hectares. En 2000, la production de maïs avait presque quintuplé (252 millions de tonnes métriques) tandis que la surface cultivée à cette fin avait diminué de 6,5% à 29 millions d'hectares. Une portion de ces terres a été reboisée. Selon le chercheur Jesse Ausubel de la Rockefeller University, si les gains de productivité moyens dans la production céréalière se maintiennent à 1,8% par an à l'échelle du globe au cours des prochaines décennies, les neuf milliards d'êtres humains qui peupleront la terre au milieu de notre siècle seront mieux nourris que la population actuelle (plus de six milliards d'individus) tout en requérant 200 millions d'hectares de terres agricoles de moins. De plus, si les gains de productivité atteignent l'objectif réaliste de 2% par an, c'est plus de 400 millions d'hectares qui pourraient être libérés, une réduction d'environ 25% de la surface agricole mondiale actuelle. Si tel est le cas, et en supposant que la moitié de ces surfaces redeviennent des forêts, le couvert forestier pourrait s'accroître d'une superficie comparable à trois fois le Texas ou quatre fois l'Espagne au cours du prochain siècle. Le développement des sous-produits L'utilisation des sous-produits du bois (ou produits conjoints) issus du sciage tels que les copeaux, les sciures et les rabotures est aussi ancienne que l'abattage des arbres, que ce soit comme combustible ou comme matière première dont on extrait de l'alcool de bois ou d'autres substances. Le développement des sous-produits du bois s'est poursuivi de façon importante depuis quelques années, notamment par la mise au point de nouveaux produits agglomérés. En 1970, ces matériaux, qui étaient pour l'essentiel limité au contre-plaqué, ne représentaient que 19% des produits solides du bois. En 1993, la part de ces produits aux États-Unis avait grimpé à 28% grâce notamment au développement des panneaux de particules et des panneaux de particules orientées structuraux. Non seulement les déchets sont-ils pratiquement éliminés dans la phase de production de ces produits (90% du bois étant incorporé directement et 10% étant utilisé comme source d'énergie), mais leur utilisation permet de réduire la quantité de bois requise pour répondre à un besoin donné. Par exemple, l'utilisation de madriers d'aggloméré, plutôt que de madriers fabriqués à partir d'une pièce, réduit la quantité de bois requise de 25% pour obtenir le même résultat. Compte tenu de l'efficacité actuelle des scieries américaines, le développement des matériaux composites depuis quelques décennies aurait épargné 23 millions de mètres cubes de bois tout en favorisant l'utilisation de 9 millions de mètres cubes de sous-produits. Le développement des produits substituts Si les gains de productivité et le développement de ressources à partir des rebuts du bois expliquent en partie la reforestation des économies avancées, ils ne doivent pas pour autant occulter l'importance du développement de produits substituts dans d'autres domaines. Par exemple, les métaux, les plastiques et le ciment ont remplacé le bois comme matériau de construction, tandis que le charbon, l'huile, le gaz naturel et l'hydroélectricité ont remplacé le bois comme source d'énergie. Si certaines de ces innovations ne sont pas sans causer de nouveaux problèmes, elles sont néanmoins bénéfiques dans l'ensemble. Par exemple, au début du siècle, le développement des automobiles et des tracteurs a rendu inutiles un nombre considérable d'animaux de trait dont l'alimentation requérait des superficies importantes, notamment 25% des superficies agricoles aux États-Unis en 1910. Ces terres sont en majeure partie redevenues des forêts depuis cette période. Il est également indéniable que l'utilisation croissante d'hydrocarbures dans les économies sous-développées sera positive car elle permettra de réduire considérablement la collecte de Le marché et le développement durable Le cas des produits forestiers et de la reforestation illustre de façon convaincante que la recherche du profit et l'innovation technique sont bénéfiques pour l'environnement. Selon Jesse Ausubel, dans la mesure où les gains de productivité en agriculture et dans la production et la transformation du bois sont maintenus et se diffusent sur l'ensemble de la planète, et dans la mesure également où la croissance des économies sous-développées se poursuit et permet à leur population d'adopter des sources d'énergie autres que le bois, la demande mondiale de bois dans le seconde moitié du prochain siècle pourrait être satisfaite avec seulement 5% du couvert forestier total, ce qui assurerait par le fait même la préservation de la biodiversité. Contrairement à ce que laissent entendre les militants écologistes, le développement durable, c'est-à-dire un développement qui répond aux besoins actuels sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs, a toujours été une caractéristique intrinsèque des économies de marché. S'il est vrai que certaines situations particulières demeurent problématiques du point de vue de l'environnement dans plusieurs régions du globe, elles résultent presque toujours d'une absence ou d'une insuffisance de développement économique et/ou de problèmes politiques. Dans ce contexte, une société qui refuse le progrès et la croissance économique sous prétexte de préserver le
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