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Montréal, 6 mars 2004 / No 139 |
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Bonjour, Je suis étudiant de cégep et j'ai un cours qui s'appelle «Vie politique». Mon professeur, évidemment, est gauchiste et malheureusement, il fait passer son opinion à chaque cours. Aujourd'hui, nous avons «décortiqué» la gauche et la droite. Étant donné qu'il fait passer son opinion dans le cours, je doute de son objectivité. Je vais donc vous énoncer les points qui caractérisent chaque côté et j'aimerais savoir si cela est juste et si non, de les rectifier si c'est possible. Merci énormément. La Gauche:
Un
lecteur
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Réponse
de Martin Masse:
Bonjour, Il est difficile de répondre correctement à cette question. La gauche et la droite sont des concepts très vagues, qui recoupent plusieurs mouvements qui ne partagent pas la même idéologie. Ce sont aussi des concepts relatifs, qui identifient des réalités politiques différentes d’une époque ou d’une société à l’autre. En gros, il est vrai que la gauche favorise en théorie l’égalité et conçoit l’État comme un outil permettant la redistribution de la richesse. Il faut toutefois aller au-delà de ce principe abstrait quand on analyse la politique et voir ce qui se passe dans la réalité. En pratique, les gauchistes sont très souvent des gens qui bénéficient eux-mêmes de cette redistribution de la richesse, les politiciens, les employés du secteur public, tous les groupes qui reçoivent des subventions de l’État. Bref, même s’ils défendent en théorie l’égalité pour tous, en pratique c’est la redistribution de la richesse des autres vers eux-mêmes qu’ils favorisent. En gros, on peut dire également que la droite accepte les inégalités de condition, valorise la tradition et a moins tendance à préconiser l’utilisation de l’État pour «changer la société» et viser des objectifs utopistes comme la gauche. Historiquement, la droite «aristocratique» se servait de l’État pour protéger la propriété et les privilèges des classes dirigeantes. Cette droite aristocratique n’existe plus, mais il y a bien un penchant étatiste aussi chez d’autres courants conservateurs contemporains (droite religieuse, néoconservateurs, corporatistes), pour qui l’État doit protéger des valeurs traditionnelles, doit utiliser la force militaire pour assurer une hégémonie économique et politique, ou doit intervenir dans l’économie pour assurer l’harmonie entre les entreprises et les travailleurs. Ce qui manque dans ce schéma cependant, c’est le libéralisme classique, un courant qui s’est historiquement développé en opposition à la droite aristocratique aux 18e et 19e siècles, et qui s’est surtout opposé à la gauche socialiste depuis la fin du 19e siècle (les libertariens sont les héritiers des libéraux classiques. Le mot «libéral» a été abandonné par les libéraux anglophones après avoir changé de sens au 20e siècle. Voir pour des explications plus détaillées la page QU'EST-CE QUE LE LIBERTARIANISME?). C’est une philosophie qui défend les droits individuels de tous contre le pouvoir d’une petite élite, et qui s’oppose à l’étatisme et aux idéologies collectivistes, autant celles de droite que celles de gauche. On l’identifie en général à la droite aujourd’hui, mais il faut faire attention de ne pas la confondre avec la droite conservatrice étatiste. Je préfère quant à moi ne pas identifier les libertariens à droite (voir mon éditorial récent LES LIBERTARIENS SONT-ILS À DROITE?). Le libertarianisme rejoint la gauche sur certains aspects, la droite sur d’autres. Les libertariens sont en faveur du libre marché et des droits de propriété, ce qui est identifié comme étant à droite, mais ils préconisent par exemple la légalisation des drogues et le droit pour chacun de croire et faire ce qu’il veut dans sa vie privée (tant qu’il ne brime pas les droits et la liberté des autres), ce qui est vu comme une position de gauche. Les libertariens sont pour la liberté dans tous les domaines, autant économiques que sociaux. Bref, ton professeur n’a pas complètement tort lorsqu’il distingue la gauche et la droite de cette façon, mais c’est beaucoup plus compliqué que ce qu’il raconte. Il parle probablement des «néolibéraux» (le terme péjoratif des gauchistes pour désigner les libéraux ou libertariens) comme des méchants qui veulent exploiter les pauvres et protéger les privilèges des riches et des puissants, et il les inclut donc dans la droite. C’est le discours habituel des gauchistes. Mais cela est totalement faux. Les libéraux ne défendent les privilèges de personnes. Ils défendent la liberté pour tous. Ceux qui réussissent à s’enrichir dans un contexte de libre marché ne sont pas des exploiteurs mais des gens qui ont rendu un service aux consommateurs, et leur richesse est donc légitime. Un État qui redistribue la richesse doit nécessairement le faire en réduisant notre liberté et la classe des politiciens et des bureaucrates qui prétend le faire au nom des plus pauvres le fait surtout pour son propre intérêt. Ce n’est pas un hasard par exemple si les profs de cégep, qui sont des employés de l’État syndiqués, sont presque tous des gauchistes. Plus l’État est gros et redistribue la richesse, plus il y a de chance qu’ils vont en profiter! Il ne faut donc pas se laisser impressionner par leur discours bien-pensant. J’espère que ces quelques explications te seront utiles. M. M. La gouverneure générale du Canada, Mme Adrienne Clarkson, remettra le 10 mars prochain une bourse en arts visuels de Le lauréat Istvan Kantor, autrefois connu sous le pseudonyme de Monty Cantsin, est un «grand artiste» spécialisé dans ce nihilisme esthétique qui plaît tant aux bourgeois. L’ennui des bourgeois est la mesure de toutes choses en matière d’art et de bon goût. Il faut s’ennuyer profondément pour méditer sur le cas d’un abruti qui se rentre des contenants dans le rectum et ensuite lui octroyer
Les bourgeois adorent l’art contemporain. Ils ont bien le droit de faire ce qu’ils veulent de leur argent. Cependant, quand les bourgeois s’emparent de nos institutions publiques pour faire passer leur mauvais goût pour du grand art, histoire de rentabiliser leurs investissements dans telle ou telle escroquerie esthétique, je ne puis que m’insurger, en tant que citoyen et contribuable. J’en conclus que l’État doit cesser de verser toute forme de subventions aux artistes. Je demande que les artistes soient enfin libres de faire ce qu’ils veulent. Je demande aussi que les contribuables soient tout aussi libres de décider de la manière de dépenser les sommes qu’ils remettent à l’État. Finalement, je me demande pourquoi l’on devrait verser Il est sans doute nécessaire de rappeler à nos élus et à notre non-élue que les citoyens du Canada ne chient pas de l’argent.
Gaétan
Bouchard
Trois-Rivières
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