Montréal, 15 juillet 2005 • No 156

 

OPINION

 

Michel de Poncins écrit les flashes du Tocqueville Magazine et est l'auteur de quelques livres.

 
 

SMIC: DES CHÔMEURS EN PLUS

 

par Michel de Poncins

 

          Dominique de Villepin a donc décidé d'augmenter le Smic (le salaire minimum interprofessionnel de croissance) de 5,5% dès le premier juillet. Le prétexte est qu'il faut appliquer la loi – prétexte mensonger car ce qu'une loi fait, une autre peut le défaire. Et aussi, bien sûr, on entend la sempiternelle chanson du pouvoir d'achat: distribuer de l'argent développerait de la demande et créerait des emplois. L'argument est mensonger. D'autant plus qu'avec la mondialisation, une grande partie du pouvoir d'achat distribué va enrichir les travailleurs chinois ou autres travailleurs lointains.

 

          Le Smic, comme toute action socialiste, est cruel malgré de fausses apparences; la cruauté principale vient du chômage induit et de l'écrasement des salaires.

          Suivant l'OCDE, 5 points de plus de Smic donnent 1 point de plus de chômage. Celui-ci devrait donc passer mécaniquement de 10 à 11%; mais quand on parle de 10% on est dans l'erreur puisque ce pourcentage est rapporté à la totalité de la population active, y compris les fonctionnaires qui ne sont pas exposés au chômage et ne produisent pas de richesses sauf exception. Le vrai pourcentage est de 22%. Si la statistique officielle passe à 11%, le vrai pourcentage sera donc de 24,2% que l'on masquera sans doute en créant de nouveaux parkings à chômeurs.

          Le mécanisme destructeur du Smic est connu: mettant le prix d'un travail au-dessus de la valeur de ce travail pour l'entreprise, il décourage le recrutement. L'employeur éventuel cherche d'autres solutions, soit investissement, soit renonciation au projet, soit délocalisation. Bien entendu ce sont principalement les moins qualifiés et les faibles qui souffrent de ce chômage induit et bien moins les cadres supérieurs.

          L'Institut national de la statistique et des études économiques avait, dans une autre étude, montré qu'une augmentation de 10% du Smic détruirait 290 000 emplois peu qualifiés.

          Il existe en plus la concurrence avec le revenu minimum d'insertion (RMI) et avec le revenu minimum d'activité (RMA). Si quelqu'un touche le RMI, il déclenche une foule d'avantages annexes qui ont pour effet de rendre un emploi au Smic non compétitif avec ce RMI.
 

« Le socialisme est la grande cruauté du XXe siècle; le pouvoir actuel prisonnier de son idéologie étatiste fait mine de ne pas le savoir. »


          Voici un exemple de 2002, tout aussi valable aujourd'hui. Un couple marié au chômage avec deux enfants pouvait, avec le RMI, l'allocation logement et les allocations familiales, toucher 7 200 francs par mois ou 1097 euros. Si un des conjoints retrouvait un emploi à mi-temps au Smic, le revenu familial était inchangé. S'il travaillait à temps complet, le revenu familial s'accroissait seulement de 600 F, soit 4 F par heure travaillée. Qui peut accepter de travailler pour 4 F ou 0,61 euros l'heure?

          Le Smic, en outre, encourage ouvertement la délocalisation des industries à bas salaires, ce qui crée le chômage d'une autre façon. Dans le textile, depuis 1970, le Smic a augmenté en francs constants de 100% alors que les hausses normales auraient donné 35%. On connaît le sort du textile en France et les larmes publiques sur ces abominables Chinois. Les « smicards » peuvent, certes, se réjouir momentanément des hausses, mais, le jour où ils seront victimes d'un plan social, personne ne leur dira que c'est justement le Smic qui en est responsable.

          Ensuite chaque augmentation suscite un nouvel écrasement de la hiérarchie. Les non-smicards sont progressivement rattrapés. Ce qui détruit tout encouragement au progrès et explique en partie la progression de la paresse. Au début du Smic qui s'appelait d'ailleurs Smig, il ne touchait que quelques milliers de personnes:
 

1988: 1 500 000 salariés payés au Smic, soit 8% des salariés,
2004: 2 300 000 personnes après une progression de 15% sur l'année.

          Au sommet de la hiérarchie, les personnes les plus payées ont tendance à émigrer, ce qui est aussi un effet indirect, le Smic jouant son rôle dans la panoplie des mesures destructrices de l'économie française. En fait on subventionne le travail de faible valeur et le tout tire les rémunérations vers le bas.

          Bien entendu, le pouvoir d'achat – objet légitime de beaucoup de gens – souffre gravement du Smic puisqu'il dépend de la création de richesse qui justement se trouve freinée.

          Le socialisme est la grande cruauté du XXe siècle; le pouvoir actuel prisonnier de son idéologie étatiste fait mine de ne pas le savoir.
 

 

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