Il est pathétique de constater encore une fois l’illogisme
du discours libéral. Réduire les pouvoirs de l’État pour
laisser la sacro-sainte économie dicter ses lois «
naturelles ». Dans l’économie, sachez qu’il n’y a rien de
naturel: des êtres humains, pour qui la recherche maximale
de profit est la loi première, décident des prix du marché
par toutes sortes d’artifices. Qu’on pense au prix de
l’essence avec lequel les pétrolières peuvent jouer à
volonté en créant des pénuries artificielles. Il n’y a qu’à
diminuer un peu la production, et hop, les prix à la pompe
bondissent. Comme loi naturelle, vous pouvez repasser.
Comment est-il possible que toutes les grandes
pétrolières affichent le même prix à la pompe alors que vous
affirmez que le système libéral permet la liberté aux
entreprises de compétitionner sainement?
Il est quand même étrange que les promoteurs de la pensée
néolibérale satanisent l’État et en même temps participent
à la grand-messe des généreuses subventions, des exemptions
fiscales et de l’électricité bon marché que leur procure ce
même État. Là-dessus, je suis enfin d’accord avec vous: que
l’État cesse de s’occuper d’économie et arrête de graisser
les entreprises à même les fonds publics. Évidemment,
cette vision des choses ne vous sourit sûrement pas... Bref,
non à l’État, sauf quand il devient une vache à lait pour
les compagnies. Finalement, ces malhonnêtes hommes
politiques décriés dans vos articles vous ressemblent à s’y
méprendre: ce sont des visages à deux faces. C’est
peut-être la raison pour laquelle le fleuron de votre gratin
économique (ces « boîtes » de communication engraissées aux
commandites) s’entend si bien avec nos politiciens. Rien de
plus « naturel », un peu comme le sont les lois du marché…
Jean Carpentier
Monsieur Carpentier,
Le mot « naturel » est un terme dont on abuse et qui demande à
être qualifié. Les lois économiques représentent des
constantes qu’on retrouve dans un contexte d’échange. Par
exemple, on dira que toute action humaine est une tentative
d’améliorer son sort; que ce qui est consommé maintenant ne
peut l’être plus tard; qu’un prix fixé plus bas que le prix
du marché entraîne une pénurie, tandis qu’un prix fixé plus
haut entraîne un surplus, etc.
Personne, et cela comprend les pétrolières, ne peut charger
les prix qu’il veut pour un produit, car il ne possède pas
les moyens de forcer le consommateur à acheter son produit.
La seule exception à cette règle est le monopole établi par
la contrainte de la loi – du genre Hydro-Québec.
Le libertarien, ou le libéral au sens classique du terme, ne
veut rien savoir des subventions, pas plus aux entreprises
qu’aux individus, car le pendant de la subvention est une
taxation et une imposition. Le libéralisme politique n’est
rien d’autre qu’une application des idées
sociales-démocrates. Ce libéralisme, qui en réalité n’en est
pas, est à différencier du libéralisme philosophique que
nous prônons dans les pages du Québécois Libre.
Bien à vous,
André
Dorais
Réponse de Mathieu Bréard |
Bonjour Monsieur Carpentier,
Je ne voudrais pas vous décevoir, mais comme libertarien, je
suis le premier à condamner les généreuses subventions de
l'État, offert à l'entreprise privée. Évidemment! Puisque
dans la logique du marché, lorsqu'une entreprise dispose
d'un bon produit, et des ressources nécessaires à l'atteinte
de ses objectifs, elle n'a pas besoin de ce type de
financement. Si par hasard elle se trouve incapable de
soutenir la concurrence et qu'elle cumule les déficits, elle
devra disparaître et céder sa place à une autre. Il en va de
même pour toutes celles qui fraudent les actionnaires, ou
qui falsifient des rapports comptables. Il s'agit ici d'un
principe fondamental du capitalisme. Bref, accepter les
conséquences de ses actes et de ses choix.
Or, pour l'État c’est toute autre chose. Les fonctionnaires
réussissent grâce à la protection de la loi à se dissocier
des règles du marché pour mieux protéger leurs monopoles.
Pour eux, peu importe que leurs institutions soient en ruine!
Pour endormir l'opinion publique, l’État a créé des
commissions d'enquête: on augmente les impôts et on raconte
le même baratin année après année. Fouillez les archives de
presse et vous constaterez par vous-même que le discours n'a
pas changé.
Combien d'entreprises ont été volontairement placées sur le
respirateur artificiel par nos gouvernements? Songer
simplement à tous ces millions de dollars puisés à même les
fonds publics qui ont été gaspillés dans le projet de
relance de la Gaspésia. Rappelez-vous ses milliards de
dollars de nos impôts qui ont été jetés par les fenêtres
dans des programmes aussi ridicules que celui du registre
des armes à feu ou du Département des ressources humaines? À
l'heure actuelle, combien de fonds ont été et seront
dilapidés en éducation ou encore pour soutenir se fiasco que
représente le système de santé public?
Honnêtement, si je devais me présenter devant le conseil
d'administration d'une entreprise avec un si piètre
rendement, il y a très longtemps que j'aurais été licencié
et que l'entreprise aurait fait faillite. Désolé monsieur, mais la
véritable vache à lait dans toute cette histoire se sont les
contribuables qui voient le fruit de leur travail saisi par
un État qui se maintient en place par toutes sortes de
magouilles. Un État qui dans la logique du marché aurait
fait faillite depuis longtemps!
Mathieu
Bréard
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