V O S C O M M E N T A I R E S |
Je voudrais réagir à l'article de Marc Grunert
qui, à mon sens, n'explore pas assez de voies dans son
argumentation. Pire encore, faute de développement, j'ai eu le
sentiment nauséeux que cet article pourrait être repris in
extenso dans un journal de l'Opus Dei ou du Front National.
Dans son article, M. Grunert ne semble pas tenir compte
d'une liberté fondamentale: celle de diposer librement de
son corps notamment lorsqu'une souffrance est, ou sera,
insupportable. Si un être humain souffre atrocement, ne lui
est-il pas permis de mettre fin à ses jours ou même de
demander qu'on le fasse pour lui en cas d'incapacité
physique, et ce en accord avec la logique libertarienne?
Dans le même ordre d'idées, n'est-il pas permis à une femme
de se débarrasser d'un membre ou d'une partie de son corps
si celui-ci devient insupportable?
Le foetus fait partie du corps de la femme à tous les stades de la
grossesse et en est indissociable. Le cas de la matrice artificielle
ne me paraît pas en accord avec les idées libertarienne puisque, si
l'on rend l'avortement punissable, car relevant du meurtre
volontaire, on contraint par la force une femme à opter pour une
situation qu'elle ne souhaite peut-être pas – qui plus est avec un
usage forcé de son propre corps!
M. Grunert en appelle à la responsabilité de chaque femme dans le
contrôle de son cycle menstruel et de sa fertilité, mais il ne dit
mot sur la grossesse résultant du viol. Par ailleurs, si responsabilité il y a dans le fait de tomber
enceinte, il y a également responsabilité dans la décision de ne pas
mettre au monde un enfant qui, dès le départ, évoluera dans des
conditions précaires et dans l'assistanat.
Cordialement,
Thibaut André
Monsieur,
La vie de l'enfant me
semble prioritaire dans la mesure où, même si la mère est en
danger de mort en raison de sa grossesse, elle est
responsable de l'acte qui a conduit à cet état de choses. Si
on ne peut pas sauver l'enfant, alors il faut sauver la
mère. Sinon, du fait que l'enfant n'est responsable de rien
dans la situation où il a été placé, c'est lui qui doit être
sauvé. S'il s'agit d'un viol, évidemment, la vie de la mère
est prioritaire car elle est aussi innocente que l'enfant et
c'est elle qui a subi le crime primordial. S'il est possible
de sauver les deux vies alors il faut le faire. Vous ne
semblez pas capable de comprendre que
l'enfant n'est pas un « membre » du corps de la mère. C'est
un être humain, vivant, de nature complètement distincte de
celle d'un bras ou d'une jambe.
Pour ce qui est du viol, je
vous invite à relire l'article. Concernant l'avortement dans l'« intérêt de l'enfant » (il sera
handicapé, il souffrira…), c'est la porte ouverte à tous les
abus et tous les crimes d'États nazis visant à empêcher de
vivre des êtres handicapés. Ce n'est pas à M. André de
définir la souffrance. Ce n'est pas à lui de dire qu'un être
qui risque de souffrir doit être supprimé. Ce n'est même pas
aux parents. Ces êtres ont le droit de vivre et on n'a pas
le Droit a priori de les tuer pour leur éviter une
souffrance future. De plus, nous ne savons rien du futur, ou pas
grand-chose.
M. G.
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Je me permets une intervention, pour exprimer mon total
désaccord avec l'article de Marc Grunert. J'avoue avoir été
profondément surpris de lire pareils propos de la part d'un
libertarien même si je suis conscient que ce sujet confronte bien
souvent des points de vue diamétralement opposés et
irréconciliables.
Bien que je condamne les avortements payés à grands
frais par l'État, je reconnais le droit fondamental d'une
personne de disposer de son corps comme elle le souhaite. Un
embryon n'est pas un être humain. Il a besoin du
corps de la femme pour assurer son développement jusqu'à sa
forme finale. Il est dans une situation de totale dépendance
corporelle face à son hôte. Une femme qui souhaite se faire
avorter refuse tout simplement la poursuite de ce processus. Elle prend cette décision
en fonction des circonstances et surtout de sa liberté de
conscience. Il n'appartient pas à l'État de décider dans
quelle situation une interruption de grossesse est
moralement juste. Laissons ce genre de dogme à la droite
chrétienne.
Depuis quelques années déjà, je siège sur le conseil
d'administration d'une fondation qui vient en aide à des
parents dont les enfants sont atteints de maladies
génétiques orphelines comme le Tay Sachs, le Sandhoff,
Shindler, Acidose lactique ou encore la Gangliosidose GM1.
Ces maladies sont très rares et affligent seulement
10% de la population. Il n'existe pas le moindre traitement
pour les guérir. La seule issue est la mort. En
d'autres mots, on passe des nuits blanches impuissants à voir dépérir
son enfant (gavage, cécité, perte de tonus musculaire,
convulsion…), les coûts pour les proches étant
considérables – autant sur les plans financier qu'humain. Ce
sont des souffrances inutiles.
Ainsi, une femme qui se sait porteuse d'un embryon qui
risque de développer une maladie est parfaitement libre de
refuser la maternité et les conséquences désastreuses qui
l'accompagnent. Elle a le droit de gérer elle-même sa
destinée et de prendre les moyens nécessaires pour donner
la vie à un enfant en santé.
Mathieu Bréard
Monsieur,
Encore une fois l'être
créé est nécessairement un être humain. Dès le départ. Si un
« embryon n'est pas un être humain », alors de quelle
nature est-il? Si on détruit un embryon, on détruit un être
humain. C'est évident. D'ailleurs vous ne seriez
même pas là pour parler si votre embryon avait été détruit.
J'appelle donc ça une contradiction performative. C'est la
conception résultant de l'action qui définit la création
d'un être humain. Une fois créé, il l'est. La mère
n'accueille pas un parasite, ou une chose indéterminée, mais
un être humain. Qualifier cette « chose » de « parasite »
est absolument en contradiction avec la nature de l'action
qui a donné naissance à cet être. C'est un déni de sa propre
responsabilité.
Par ailleurs vous écrivez: « Ainsi, une femme qui se sait porteuse d'un
embryon qui risque de développer une maladie est
parfaitement libre de refuser la maternité et les
conséquences désastreuses qui l'accompagnent. Elle a le
droit de gérer elle-même sa destinée et de prendre les
moyens nécessaires pour donner la vie à un enfant en
santé. » Non! Encore une fois nous
n'avons pas l'expérience du futur. Par ailleurs, dans une société de
Droit, libre, sans État, ceux qui pensent comme moi devront,
par simple cohérence logique, s'organiser, avec leurs
moyens, pour prendre en charge cet enfant non désiré mais
néanmoins sujet de Droit, si la mère et le père sont
défaillants (avec les conséquences que cela doit impliquer
sur le plan juridique). Je reconnais que les moyens sont
décisifs. On peut ne pas avoir les moyens d'accomplir le
Droit, mais cela ne peut pas se décider a priori. Si
on déclare a priori le droit d'avorter dans ces cas limites
alors on interdit aux autres de chercher des moyens pour
trouver des solutions, d'accomplir certains devoirs
impliqués par la reconnaissance du Droit des personnes
dépendantes. C'est non seulement une destruction du Droit
mais aussi du sens moral.
M. G.
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Dans l'édition d'août 2005 du Québécois Libre, M.
Marc Grunert présente un article percutant intitulé
« L'avortement est un crime ». Je tenais, à cet effet, à
souligner la qualité exceptionnelle de sa démonstration
logique et de sa très pertinente absence de l'émotivité
usuellement associée au débat tant par les partisans du
mouvement pro-vie que du mouvement pro-avortement.
Si l'argument sur l'utérus synthétique est inusité et
peut-être bizarre, il a au moins le mérite de soulever une
solution originale au conflit entre le droit à la vie de
l'enfant, d'une part, et d'autre part, la jouissance de la
mère de la partie de son corps garantissant la vie de cet
enfant. Solution, peut-être, qui invitera à faire sortir le
débat de la sempiternelle et artificielle négation de
l'humanité de l'enfant à naître. Comme le rappelle M.
Grunert, il n'existe pas de frontière entre la pré-naissance
et la naissance. Autant, donc, s'appliquer à trouver des
solutions capables de réconcilier les droits et besoins des
deux parties.
L'argumentaire de M. Grunert soulève indirectement le
parallèle avec la façon dont nous traitons les personnes
adultes incapables de prendre soin d'elles-mêmes. Or, comme
l'humain est porté à avoir pitié de ce qu'il peut voir, le
même acte de destruction porté contre un autiste profond
serait accusé d'humanité alors même que le Québec l'inflige
à 25 000 enfants par an – un record imbattu dans le monde
occidental, comme nous le rappelait en 2005 la revue
L'actualité.
Outre qu'il nous rappelle bien la complaisance hypocrite
avec laquelle nous traitons la vie ceux qui ne font pas
entendre leurs voix, cet article démontre, en outre, qu'il
n'existe pas une pensée unique en matière de morale chez les
libéraux. Ce rappel est rafraîchissant, car trop souvent les
philosophes des diverses idéologies convergent vers une
pensée unique.
Félicitations, donc, à M. Grunert de briser le tabou en
rappelant qu'une question n'est pas nécessairement
« réglée » pour la seule raison qu'un même gouvernement
l'applique depuis 15 ans. En démocratie, la liberté de
parole laisse toujours la place au débat, surtout lorsque la
question porte sur la nature de la vie humaine et le droit à
la défense de celle-ci.
Erick N. Bouchard, M.A.P., B.A.
Québec, Canada
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Dans son article du 15 août, qui, tel que prévu, suscite la controverse, Marc Grunert condamne l'avortement en
l'associant à une initiation de violence contre un être
humain. Quoique je ne sois pas un fervent défenseur des droits
naturels, je ne contesterai pas son argumentation.
Cependant, je demanderai à M. Grunert s'il a bien évalué la
portée de son opinion. Si, comme il l'indique, l'avortement
est criminel, alors fumer ou boire lors de la grossesse
(tout en connaissant les conséquences du tabagisme ou de la
consommation d'alcool sur le foetus) doivent logiquement aussi
être des actes criminels et punis. La pratique d'activités risquées
(vélo, courir, sports, etc.) pouvant occasionner une chute
et éventuellement le rejet du foetus doit aussi être
interdite et punissable si rejection il y a.
Le
meurtre n'est pas le seul crime reconnu par la philosophie
libertarienne des droits naturels. Tout acte d'agression est
condamnable, toute action est soumise à la responsabilité
personnelle. La présence d'un État serait donc nécessaire à
l'application de restrictions quant au comportement des
femmes enceintes. J'espère que M. Grunert saisit bien jusqu'où
l'interprétation de ses dires peut mener.
Francis St-Pierre
Monsieur,
Je vous répondrai que le
crime se reconnaît par un critère: la constatation a
posteriori d'une atteinte volontaire aux Droits d'une
autre personne ou être humain. Cependant si l'évidence, en
fonction de nos connaissances, permet de reconnaître qu'il y
aura nécessairement meurtre ou crime selon la manière dont
une personne se comporte, chacun a le droit et même le
devoir de l'empêcher de se comporter ainsi. Ce qui
n'implique absolument pas que ce soit à l'État de le faire.
L'État est illégitime par nature et n'est pas la solution
nécessaire.
M. G.
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Je suis personnellement pour le droit à l'avortement, mais
pas pour le droit à l'avortement subventionné par l'État. Je
n'ai aussi aucun problème à entendre l'opinion de ceux qui
sont contre l'avortement et je trouve que l'article de M.
Grunert a sa place dans le QL. Sauf pour un
paragraphe, qui est à mes yeux inacceptable. Il s'agit de la
note à la toute fin de l'article où M. Grunert affirme que
même dans le cas d'un viol, une femme devra poursuivre sa
grossesse (c'est-à-dire hypothéquer son corps pendant neuf
mois à cause d'un criminel).
Mener
une grossesse à terme n'est pas une mince affaire. Si
l'avortement peut engendrer, comme le note M. Grunert, des
« traumatismes graves chez la mère, un sentiment de
tristesse confuse chez les proches et un scandale moral pour
d'autres », que dire d'une femme qui doit consacrer neuf
mois de sa vie à parachever l'oeuvre du viol dont elle a été
victime! Et je n'ose pas penser aux conséquences pour une
jeune fille de 12 ans.
Laissons de côté le cas spécial du viol, et supposons que
l'avortement est réellement un crime. Cela veut dire qu'une
femme qui consomme de l'alcool ou fume durant sa grossesse
commet aussi un crime, car elle s'attaque à la santé de son
embryon. Après tout, si on peut être accusée d'avoir
assassiné un foetus, on peut également être accusée de
l'avoir blessé. De même, une femme qui fait une fausse
couche suite à un exercice physique non recommandé durant
une grossesse (comme le saut en bungee, par exemple)
pourrait être poursuivie pour « négligence criminelle ayant
causé la mort ».
Il en
découlerait que chaque femme enceinte devrait être
rigoureusement surveillée afin qu'elle ne puisse commettre
aucun « crime » contre son foetus. Un organisme de
protection des embryons pourrait se charger de ce travail:
prises de sang, examens médicaux à répétition, etc., le tout
évidemment obligatoire. Afin de jouer efficacement son rôle,
l'organisme devra posséder une liste précise de toutes les
femmes enceintes. Le seul moyen de maintenir cette liste
serait de faire passer des tests de grossesse obligatoires à
toutes les femmes en état de procréer (au moins 4 à 8 fois
par années, pour être certain qu'aucune ne s'en échappe!). De
plus, pour s'assurer qu'aucune femme enceinte ne s'adonne à
une activité potentiellement nocive pour son foetus,
l'organisme de protection des embryons aurait le droit de
mener des perquisitions sans préavis au domicile de chaque
femme enceinte. J'imagine déjà le rapport d'un agent: « Le
14 août 2005, à 21h45, nous avons procédé à une visite surprise à
la résidence de Madame Grenier, enceinte de 32 semaines.
Nous l'avons surprise en train de consommer du sushi, aliment
qui peut être nocif pour un foetus. Nous avons immédiatement
procédé à son arrestation. Elle sera hébergée dans un
centre médical jusqu'à la naissance de son enfant. De plus,
le propriétaire de l'épicerie qui lui a vendu le sushi (en
sachant très bien que Mme Grenier était enceinte et qu'elle
allait consommer ce produit), a été arrêté pour complicité
dans le but de s'attaquer à un embryon. »
Si
vous vous demandez ce que feront les fonctionnaires dans une
société libertarienne, telle que rêvée par M. Grunert, vous
en avez une bonne idée ici! Si un État libertarien (via une agence
gouvernementale, des organismes ou des compagnies privées) a
l'obligation d'assurer la survie de chaque embryon, il est
logique que cet État devra aussi assurer la survie de chaque
humain adulte. Ce qui revient à dire que toute personne a le
droit à des soins médicaux gratuits, à de la nourriture et à
tout ce qui est nécessaire à sa survie – indépendamment du
fait qu'il ait souscrit à une assurance ou qu'il ait payé ou
non ses taxes. On revient alors à la case départ: un État
socialiste qui prend en charge la vie de chaque citoyen.
Martin Baril-Deschamps
Monsieur,
Votre réaction est pleine de confusions. Il n'y a pas
d'État libertarien. C'est un oxymore. Par ailleurs,
l'intrusion dans la propriété privée d'un individu ne peut
se justifier que si la certitude a été établie qu'il existe
bien une intention de crime (mise en état de guerre avec un
autre individu, chacun ayant le droit de défendre la
personne menacée). Il n'est donc pas question de
surveillance mais de « confiance » a priori.
M. G.
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L'avortement est-il un crime? Il y a deux possibilités sur
lesquelles on peut se baser pour répondre. Premièrement, le bébé fait
partie du corps de la mère; les deux ne font qu'un. Dans ce
cas, la mère peut se débarrasser de n'importe quelle partie
de son corps, y compris le foetus. Dans un second cas, le
bébé est une entité séparée et un être humain à part
entière, avec les mêmes droits naturels que n'importe qui.
Dans ce cas, il peut faire tout ce qui est dans son pouvoir
pour vivre, rechercher le bonheur, trouver l'âme soeur... Le
droit de vivre ne signifie pas qu'on peut vivre aux dépends
des autres, cela signifie uniquement que les autres ne
doivent pas interférer.
À
l'image d'un parasite, le foetus vit et grandit aux dépends
de la mère. C'est donc à elle de décider si elle continue ou
non de le nourrir, si elle continue ou non de le loger. Tout
comme ne pas aider un mendiant dans la rue ou ne pas donner
d'argent à Vision Mondiale, on peut trouver que l'avortement
est cruel. Pourtant, une chose est sûre: l'avortement n'est
pas un crime et il ne doit pas être illégal!
Christian Fortin
Sherbrooke
Monsieur,
Vous dites: « À l'image d'un
parasite, le foetus vit et grandit aux dépens de la mère.
C'est donc à elle de décider si elle continue ou non de le
nourrir, si elle continue ou non de le loger. » Non mais là ça ne va plus
du tout. Cette idée de « parasite » est d'une stupidité
insondable (sans méchanceté dans mes propos). Si la
conséquence volontaire et/ou prévisible d'un acte dont on
est responsable est la création d'un être humain, que l'on
met volontairement en situation de dépendre de nous, alors
ce n'est pas un « parasite ». Réfléchissez avant de dire des
monstruosités!
Ensuite, la mère est-elle
propriétaire de l'être qui a été conçu suite à ses propres
actes? Non. Si c'était le cas, pourquoi perdrait-elle, sans
son consentement, ses droits de propriété à la naissance, ou
à tout autre instant? En réalité, il n'est pas possible de
raisonner en termes de droits de propriété exclusifs de la
mère sans sombrer dans l'arbitraire c'est-à-dire sans fixer
une limite à partir de laquelle la mère perdrait tout à coup
ses droits de propriété. Il est donc clair que ce n'est pas
un problème qui se résout simplement à partir de la notion
de droits de propriété acquis. C'est un problème qui se
résout, à mon avis, par ce qu'implique l'action humaine, par
les normes de Droit qu'elle pose implicitement et qui
s'étendent à tout être humain. Non pas pour des raisons
théologiques mais pour des raisons de cohérence. Je me
réjouis néanmoins que la cohérence rejoigne le sentiment
humaniste, le sens moral élémentaire.
M. G.
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Marc Grunert maintient que l'avortement est un crime. Sa
thèse repose sur la supposition qu'un embryon ou un foetus
est un être humain et par conséquent que l'avortement, qui
éteint la vie de cet « être », est un meurtre. Ayant établi
que l'idée d'une « création continue » est absurde, il
conclut qu'un être humain est ainsi dès le moment de la
conception. Mais pourquoi a-t-il choisi ce moment? Il ne le
dit pas. Il n'essaie même pas d'offrir une justification
fondée sur les sciences physiques. Qu'est-ce qui lui reste,
sinon le mysticisme?
On
aurait également pu dire qu'un ovule ou un spermatozoïde
sont des êtres humains. Dans ce cas, l'usage des
préservatifs, ou même la masturbation, sont-ils
également des crimes? Certes, M. Grunert ne prend pas cette
position. Cependant, il n'y a rien dans son argumentation
pour s'y opposer.
M.
Grunert nous demande s'il y a une différence entre
l'avortement et l'infanticide. En réalité, quand on parle de
l'avortement, il s'agit dans la plupart des cas d'embryons
qui sont loin d'être des nouveaux-nés, dans tous les sens.
Quand même, la question est juste: si l'on soutient un droit
à l'avortement et pas à l'infanticide, il faut repérer une
étape de ce que M. Grunert appelle la « création », mais qui
est plus précisément l'individualisation en tant qu'entité
biologique. Bien que M. Grunert qualifie d'« impossible »
cette tâche, on peut et doit le faire. Malgré ce qu'il dit,
il faut avoir recours aux « faits de la science
expérimentale ». Pour cela, le choix logique, voire
conservateur, est lorsque la configuration des onde
cérébrale du foetus ressemblent à celle d'un adulte humain,
soit vers la 30e semaine de la grossesse (voir Carl Sagan et
Ann Druyan, « The
Question of Abortion: A Search for Answers »).
En
déclarant criminel tout avortement, M. Grunert ouvre la
porte à l'élargissement du rôle de l'État dans la vie
privée. En prônant l'idée qu'un embryon est un être humain,
doté de droits, envers qui une femme enceinte a un devoir
absolu, M. Grunert bat en brèche le principe qu'une personne
possède son propre corps. La même idée n'est-elle pas à la
base de la désastreuse « guerre contre la drogue » du
gouvernement américain? Et si l'État peut violer le corps
d'une personne pour empêcher ou punir un avortement,
pourquoi ne pourrait-il pas le faire pour forcer les greffes
d'organe? (voir Andrew Bernstein, The Philosophical Basis
of A Woman's Right to Abortion, New Milford, CT: Second
Renaissance Books, 1998, 15-16.)
M.
Grunert est évidemment mal à l'aise avec l'avortement.
Cependant, on peut partager ce sentiment sans pour autant
faire appel à l'État pour régler les comptes. Ça, c'est de
la logique, pas du « lavage de cerveau féministe ».
Thomas Welch
Atlanta
Monsieur,
Vous
dites: « il
conclut qu'un être humain est ainsi dès le moment de la
conception. Mais pourquoi a-t-il choisi ce moment? Il ne le
dit pas. Il n'essaie même pas d'offrir une justification
fondée sur les sciences physiques. Qu'est-ce qui lui reste,
sinon le mysticisme? » Pourquoi ai-je choisi ce
moment? Ce n'est pas moi qui l'ai choisi. C'est une
nécessité objective. Avant d'être conçu, un être n'existe
pas, après, il existe. C'est tout. Pourquoi l'être conçu
est-il un être humain dès la conception? Tout cela repose
sur la notion d'« être » et donc de nature humaine. L'idée
que l'être conçu ne serait pas de nature humaine est non
seulement anti-scientifique, elle est aussi en contradiction
avec tout ce que chacun sait au moment de l'action qui
risque de conduire à la création d'un être humain.
Vous ajoutez: « On aurait également pu
dire qu'un ovule ou un spermatozoïde sont des êtres humains.
Dans ce cas, l'usage des préservatifs, ou même la
masturbation, sont-ils également des crimes?
Certes, M. Grunert ne prend pas cette position. Cependant,
il n'y a rien dans son argumentation pour s'y opposer. » Bien sûr que si. Un
spermatozoïde n'est pas un être humain. Pas de
fécondation, pas de création. Je pense que sur ce point j'ai
été assez clair. C'est la conception, la création d'un être,
qui est le point de départ de la vie d'un être humain. Vous
pouvez continuer à vous masturber, je ne vous accuserai pas
de crime :-)
Quant à l'histoire des «
ondes cérébrales » cela ne fait que confirmer que les
sciences expérimentales sont très en retard sur ce que l'on
peut dire en se passant d'elles.
M. G.
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