Montréal, 12 mars 2006 • No 170

 

ÉTHIQUE LIBERTARIENNE

 

André Dorais a étudié en philosophie et en finance et vit à Montréal.

 
 

SUBVENTIONS SALARIALES VS
 RESPECT DE LA PROPRIÉTÉ

 

par André Dorais

 

          Toute politique finit par avoir une conséquence sur l’emploi. Toutefois, certaines d’entre elles tentent de l’influer plus directement. C’est le cas de la subvention salariale. Elle vise à favoriser l’embauche d’un individu. Elle permet au chercheur d’emploi d’offrir ses services à rabais, sans en subir les frais, car la facture est refilée aux contribuables. L’employeur obtient les services d’un travailleur à meilleur prix, car le gouvernement paie la différence entre ce qu’il considère adéquat comme salaire pour l’emploi en question et ce que l’employeur est prêt à offrir pour ce poste. La subvention salariale, comme toutes les subventions, bénéficie à certains, mais au détriment de plusieurs.

 

          Au Québec, la subvention salariale est offerte essentiellement à trois catégories de chercheurs d’emploi: celui qui vise une « première expérience », une « première expérience canadienne » et celui qui tente un retour à l’emploi après une « absence prolongée » du marché du travail. Il est à noter que les immigrants et les membres d'une « minorité visible » peuvent également avoir accès au Programme d'aide à l'intégration des immigrants et des minorités visibles en emploi (PRIIME). Cette subvention provient de fonds privés qui sont administrés conjointement par des organismes publics et privés.

          Le concept de « minorité visible » est évolutif. Pour l’heure, lesdites minorités représentent tout le monde sauf l'individu blanc non métissé depuis une cinquantaine d’années… Par exemple, un individu de moins de 50 ans, né au Québec d’un père chinois et d’une mère québécoise, fait partie d'une minorité visible au sens de la loi, bien qu’il puisse passer incognito partout où il va.
 
          Les critères d’admissibilité de ces subventions sont tellement larges et mal définis qu’à peu près n’importe qui y a droit. Par exemple, on parle à la fois de « première expérience » de travail, de « première expérience signifiante » et de « première expérience signifiante dans son domaine de compétence ». Par conséquent, si un individu ne peut pas obtenir ladite subvention parce qu’il a déjà une « première expérience », peut-être l’obtiendra-t-il dans la mesure où l’on considère qu’il ne s’agit pas d’une « expérience signifiante », voire qu’il ne s’agit pas d’une « expérience signifiante dans son domaine de compétence »!
 

Les justifications de la subvention salariale

          Le gouvernement défend sa politique en accusant le marché d’exclure des chercheurs d’emploi ou de leur octroyer de mauvaises conditions de travail. Or c’est le contraire qui est vrai. Le gouvernement aide bien certaines gens avec sa subvention salariale, mais au détriment d’autrui, et il finit souvent par ne plus pouvoir aider personne, car il ne sait pas quand s’arrêter. Il se croit autorisé à aider certaines gens en imposant les contribuables, car il conçoit la justice comme une plus grande égalité économique. Cependant, là où la propriété est compromise, la richesse l’est autant. Cela vaut pour la subvention salariale, les subventions en général et toutes les interventions gouvernementales.
 

« Pour créer de la richesse, il faut rétablir la liberté de choix pour chaque individu et cesser d’utiliser le pouvoir d’imposition et de taxation pour établir des services. Pour créer de la richesse, les politiques d’emploi, comme toutes les autres, doivent s'appuyer sur le respect de la propriété. »


          Le marché se fonde sur la liberté individuelle, tandis que l’esprit interventionniste se fonde sur une conception du bien: l’utilitarisme. Le gouvernement prétend être capable de trouver la bonne dose d’imposition pour corriger le marché, alors que ce qui doit être corrigé est la violation de la propriété. Le gouvernement suggère la subvention salariale pour intégrer plus de gens au marché du travail, alors que cette mesure contribue à en exclure davantage, du moins, à rendre plus d’emplois précaires. Aider autrui ne suffit pas pour créer de la richesse, encore faut-il utiliser des moyens légitimes. Or un gouvernement n’aide pas sans nuire.

          Si les consommateurs ne sont pas prêts à dépenser leur argent pour les produits et services offerts par les entreprises, les subventions salariales en inciteront peut-être quelques-uns à revenir sur leurs décisions, dans la mesure où l’économie ainsi réalisée leur est transmise. Mais cela se fait au prix d’un choix global réduit puisque ce sont les mêmes consommateurs qui, en dernier lieu, paient ces subventions.

          Dès lors que les subventions et les autres interventions gouvernementales seront abolies ou, à tout le moins, réduites, plus de gens travailleront et s’enrichiront. Des salaires seront peut-être plus bas, mais grâce à une plus grande capacité productive les biens et les services seront moins dispendieux, de sorte que le pouvoir d’achat sera plus élevé. Au contraire, subventionner plus d’emplois conduit à appauvrir la société, y compris les bénéficiaires immédiats des subventions.

          Cela est d'autant plus vrai que l’on paie des fonctionnaires pour distinguer qui est éligible à la subvention de qui ne l’est pas, alors qu’en pratique tout le monde l’est, ou presque. Aux subventions nuisibles s’ajoutent des coûts inutiles. Les économies réalisées à les éliminer pourraient être investies ailleurs, dans le but de créer de la richesse plutôt que de la redistribuer selon les désirs de quelques-uns et de la réduire pour tous. On ne crée pas de richesse en maintenant des emplois qui seraient portés à disparaître si ce n’était de leur protection légale. 

          Pour créer de la richesse, il faut rétablir la liberté de choix pour chaque individu et cesser d’utiliser le pouvoir d’imposition et de taxation pour établir des services. Pour créer de la richesse, les politiques d’emploi, comme toutes les autres, doivent s'appuyer sur le respect de la propriété.
 

 

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