Montréal, 2 avril 2006 • No 173

 

ÉTHIQUE LIBERTARIENNE

 

André Dorais a étudié en philosophie et en finance et vit à Montréal.

 
 

CAPITAL, EMPLOI ET RICHESSE

 

par André Dorais

 

          L’emploi est une source de richesse, mais le capital en est une plus importante. La richesse que procure le capital tend également à bénéficier à un plus grand nombre de gens que ne le peut un être humain sans capital. Cela est d’autant plus vrai lorsque le capital appartient à des intérêts privés. Une augmentation du capital tend à hausser le nombre et la qualité des emplois, alors que l’inverse est faux. Bien que le capital soit plus productif que l’homme seul, il dépend entièrement de lui.

 

Capital et risque

          Le capital renvoie à deux réalités. La première constitue une somme d’argent, soit une somme quelconque, soit la différence entre l’actif et le passif d’une entreprise. La seconde renvoie aux biens en capital, biens de production ou biens intermédiaires. Ils servent à produire les biens de consommation. Ils constituent une source de richesse plus risquée que les biens de consommation pour un certain nombre de raisons, dont la concurrence des producteurs, qui tend à en accélérer la désuétude. Moins la concurrence est entravée, et cela autant dans le secteur des services que de la fabrication proprement dite, plus le consommateur y gagne sur les plans du prix et de la qualité, alors que le producteur en profite seulement s’il réussit à fidéliser une clientèle.
 

Capital et richesse

          Le capital représente les outils, les instruments et les machines qui permettent de transformer un objet. Il constitue également le moyen qui permet de modifier son rapport avec lui. Le capital aide l’homme à être plus productif, c’est-à-dire qu’il facilite son travail et lui permet de le faire mieux et plus rapidement. Cette hausse de productivité lui confère une liberté d’action, qu’il utilise à sa guise. Qui dit plus grande liberté, dit plus grande richesse. Celle-ci l’est d’autant plus qu’elle est réinvestie plutôt que consommée.

          Lorsqu’un producteur ou un entrepreneur investit son temps et son épargne dans la fabrication de biens que les consommateurs désirent, il s’enrichit à la hauteur des risques assumés, soit davantage que l’employé et le cadre, qui se contentent d’offrir leur capacité de travail. Cependant, tous les consommateurs bénéficient des produits offerts par l’entrepreneur, de sorte qu’eux aussi s’enrichissent.
 

Capital et pauvreté

          Une amélioration du capital est toujours souhaitable du point de vue des consommateurs, et cela malgré qu’elle puisse nuire temporairement à certains travailleurs, qui sont aussi des consommateurs. Les mesures qui visent à protéger des emplois contre les bouleversements qu'entraînent l’innovation et la rationalisation de la production non seulement ne créent aucune richesse, mais finissent par la réduire pour tous, car elles entraînent une détérioration du capital.
 

« Les mesures qui visent à protéger des emplois contre les bouleversements qu'entraînent l’innovation et la rationalisation de la production non seulement ne créent aucune richesse, mais finissent par la réduire pour tous, car elles entraînent une détérioration du capital. »


          Lorsqu’un gouvernement intervient dans le but de soutenir des emplois ou des entreprises, il ne considère que les bénéficiaires directs de son intervention, mais celle-ci s’établit nécessairement au détriment d’autrui. Chercher à se protéger des changements en réduisant le choix d’autrui par l’entremise de la force coercitive de l’État ne peut être dans l'intérêt de tous. Le calcul est erroné et la justification d’autant plus vile qu’elle se targue d’une prétention morale.
 

Capital et emploi

          Ce n’est pas parce que l’emploi constitue une richesse pour celui qui le détient, qu’il en constitue une pour autrui. Les emplois qui seraient portés à disparaître, si ce n’était de l’imposition ou, plus généralement, de l’intervention de l’État, constituent d’autant plus de ressources qui pourraient être affectées selon les désirs de ceux à qui on les retire ou l’on en restreint l’usage. C’est uniquement en respectant la propriété de chacun qu’on peut s’attendre à un accroissement de la richesse pour tous. L’autorité gouvernementale n’est ni plus savante, ni plus bienveillante que les individus.

          À trop vouloir protéger l’emploi, on perd de vue que le capital est plus productif de richesse. On se contente de favoriser l’élément le plus visible, l’emploi, au détriment de l'élément qui peut l’être moins, le capital. On n’a rien à craindre d’une augmentation du capital. Au contraire, elle bénéficie à tous à moyen et à long terme. À court terme, personne ne nie la difficulté que représente la perte d’un emploi, mais il est aussi indéniable qu’il est plus facile d’en trouver un là où l’intervention de l’État est réduite.

          Le « plein emploi » n’est pas un synonyme de richesse. À sauvegarder par la force des emplois qui seraient portés à disparaître sans elle, une société finit par s’appauvrir. L’emploi est créateur de richesse pour une société dans la mesure où il rend service aux consommateurs volontairement, c’est-à-dire sans être imposé, taxé ou contraint par d’autres formes d’interventions gouvernementales.

          Un service ou un produit rendu volontairement enrichit et le producteur et le consommateur. Moins l’État intervient, plus l’entrepreneur a le loisir d’investir en biens de production sophistiqués et en main-d’oeuvre qualifiée pour maintenir ou accroître sa clientèle. Si la main-d’oeuvre qualifiée se fait rare ou si elle est dispendieuse, l’entrepreneur déterminera s’il doit former de nouveaux employés.

          Invoquer un « droit au travail » constitue une agression indirecte envers autrui dans la mesure où la force coercitive de l’État est nécessaire à son établissement. Offrir ses services à quelqu’un ne signifie pas qu’il soit dans l’obligation de les accepter ou de les maintenir. Si un État veut aider à créer de l’emploi et de la richesse, il n’a qu’à respecter la propriété d’autrui.
 

 

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