Sans même aborder la question dudit manuel, la notion même de ce que
les représentants du Conseil de la souveraineté qualifient de
propagande fédéraliste en dit long sur le stade où en sont rendus ces
individus dans leur cheminement. Ils prétendent en effet que de la
propagande fédéraliste dans les écoles serait camouflée dans des
dépliants et documents produits pour marquer certains événements,
comme l’anniversaire de la Reine ou encore dans le fait
que certains cahiers d’exercice Hilroy soient communément appelés
« Cahiers Canada » à cause du design de leur page couverture.
Quitte à tomber dans le
ridicule, nous pourrions rappeler que les bulletins et diplômes, entre
autres, portent un drapeau fleurdelisé avec la mention « Ministère de
l’Éducation du Québec » et que ceci pourrait être considéré comme
étant de la propagande au même titre que peuvent l’être les timbres de
Postes Canada, mais nous ne nous égarerons pas sur cette piste.
Selon ces
nationalistes, les écoles seraient donc envahies par la propagande
fédéraliste et la réaction qui s’impose suite à ce constat est de
« rendre disponible un point de vue qui était absent ». Beau prétexte(1).
Les cours d’histoire
peuvent bien parler des événements marquants de l’histoire canadienne, cet
enseignement ne constitue aucunement de la propagande tant qu’il
demeurera apolitique dans sa présentation. La souveraineté du Québec
ne fait toutefois pas partie de l’histoire à ce jour, et de prétendre
qu’il faut en parler dans les écoles au même titre que l’histoire
canadienne est un non-sens. La souveraineté ne demeure qu’un programme
politique jusqu’à sa réalisation.
L’enseignement d’un
programme politique (qui, de surcroît, ne jouit même pas de l'appui
d’une majorité de la population) ne peut être fait qu’à des fins
d’influencer les idées. Prenant acte de la philosophie
social-démocrate et nationale-socialiste du Parti québécois, on ne
peut que rappeler que The Road to Serfdom(2)
n’était pas un avertissement valable uniquement en 1944, année de sa
première parution.
Quant à
la volonté de rendre disponible un point de vue absent, la réalité est
que la propagande souverainiste, et surtout nationaliste, est déjà
omniprésente dans le milieu scolaire québécois et que cette propagande
sert d’ores et déjà plutôt bien les intérêts politiques du Parti
québécois et de ses sympathisants les plus radicaux.
Le point de vue nationaliste dans les écoles |
Je ne peux que parler de mon expérience personnelle, mais je me
souviens très bien avoir passé de longues heures en classe, au
secondaire, à discuter de Lord Durham et de son fameux rapport adressé
aux autorités britanniques, et de diverses autres justifications au
désir d’émancipation des patriotes d’alors et des souverainistes
d’aujourd’hui. Mais qui a déjà lu le rapport Durham à l’école? Et
pourtant, après l’étude de cet épisode de l’histoire canadienne et
québécoise, qui devrait être abordée de façon neutre, nous savons que
dans plusieurs cas, l’étudiant est « sensibilisé » à la cause
patriotique.
Cette « sensibilisation
pédagogique » s’est accentuée au Cégep par l’entremise des cours de
philosophie, et parfois même des cours de français. Un de ces cours a
été essentiellement consacré à étudier Nègres Blancs d’Amérique(3),
de Pierre Vallières, ancien membre du Front de libération du Québec
(FLQ). Voilà donc un « grand philosophe » auquel le système éducatif
québécois a considéré qu’il devait consacrer un cours.
Bien que les actes du FLQ
aient été dénoncés par des politiciens de tous azimuts, la cause de
Pierre Vallières est demeurée valable dans les cercles intellectuels
nationalistes, comme en ont fait foi, notamment, tous les hommages qui
lui ont été rendus
suite à son décès, en 1998.
Comme de fait, Pierre
Vallières n’était pas qu’un ancien sympathisant de la violence devant
servir à faire avancer la cause de la « libération du Québec », il a
également combattu l’économie de marché et a milité ardemment pour le
socialisme. Il semble que la démonisation du marché libre et la
promotion du socialisme accompagnent instinctivement les
propos nationalistes, et l’on sait que le discours
d’une large base du Parti québécois ne fait pas exception. Le Parti
québécois a d’ailleurs modifié son programme en 2005 pour y préciser
que le projet de pays recherché est un projet de pays social-démocrate(4).
La philosophie et la liberté |
Ceci m’amène à un autre cours de philosophie, celui-ci entièrement
consacré à l’étude des écrits de René Descartes et de
Jean-Jacques Rousseau, ce dernier étant l’un des premiers écrivains modernes à
s’attaquer sérieusement à l’institution de la propriété privée et
considéré, à juste titre, comme le père du socialisme contemporain et
du communisme. Rousseau, dans sa conception de la liberté, était
convaincu que chacun méritait de satisfaire ses propres désirs plutôt
que d’avoir à obéir aux contraintes prétendument inventées et imposées
par des intérêts privés égoïstes. Séduisant, certes.
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