Mais,
ne nous leurrons pas, sous prétexte de nous faciliter la
vie, l’État nous trompe encore une fois puisqu’il rend nos
poches plus perméables encore. Au-delà de la dimension
financière, c’est moralement dommageable car comment
respecter une institution aussi importante que l’État si
nous avons le sentiment de ne pas être respecté en tant que
contribuable.
La seule réforme digne de
ce nom consisterait à revenir au principe originel d’une
fiscalité à la fois économiquement efficace et moralement
acceptable: l’impôt doit donc être douloureux et payé par
tous sans être spoliateur pour ne pas décourager l’activité
de création de richesses. Il s’agit d’une véritable
révolution (au sens astronomique du terme) car il nous faut
redécouvrir ce qui fût proclamé déjà dans la déclaration des
droits de l’homme.
Si l’impôt a vocation à
être douloureux, c’est pour rappeler à ceux qui ont en
charge de gérer les deniers publics que l’on ne peut
dépenser sans compter sans provoquer la réaction des
contribuables: il y a donc une limite intrinsèque à la
ponction fiscale car l’argent public est un bien rare, une
ressource limitée à préserver et gérer au mieux au même
titre que l’environnement.
C’est donc aux conditions
de la dépense publique qu’il faut s’attaquer, et non aux
modalités techniques de son financement. Rendre les
prélèvements indolores, c’est encore aller dans le sens de
la déresponsabilisation collective qui nous a conduit à la
dérive structurelle des comptes publics et sociaux.
Les ménages doivent au
contraire savoir (et sentir) que les services fournis par
l’État ne sont jamais gratuits. Ils doivent se rendre compte
que toute extension du rôle de l’État se paiera en impôts
nouveaux, que lorsqu’un ministre dit « l’État va financer X
ou aider Y », il faut entendre « les Français vont payer
pour X ou pour Y ».
Pourtant, les politiciens
à courte vue s’efforceront de mettre tout en oeuvre pour
cacher cette réalité incontournable tandis que les hommes
d’État tenteront de le rappeler sans nuance. Mais emportés
dans leur spirale démagogique qui tient lieu de programme de
gouvernement, les socialistes veulent réhabiliter l’impôt
progressif et redistributif (Le Monde, 18 mai 2006).
Décidément, les
socialistes ont une propension quasi génétique à dépenser
trop facilement l’argent gagné de plus en plus difficilement
par les autres.
Une vraie réforme fiscale
consisterait à rendre l’argent aux ménages pour qu’ils en
décident en conscience des différents usages en termes
d’épargne et de consommation. La liberté n’est rien sans les
moyens de l’exercer.
Dans une économie de
marché, cet arbitrage est réalisé au niveau microéconomique,
c’est-à-dire au sein des unités de décision qui composent
une économie et une société (les ménages et les
entreprises). Dans ce cas, la ponction fiscale est minimale:
elle s’ajuste sur le strict nécessaire qui permet de
financer les fonctions régaliennes qui ne sauraient être
assumées par le marché.
Dans une économie
collectivisée, cet arbitrage est réalisé au niveau collectif
sans tenir compte des préférences individuelles. Dans ce
cas, la ponction fiscale est totale et le domaine de
l’action publique est si vaste qu’il n’existe pratiquement
plus de sphère privée. Quid de la liberté!
De ce point de vue, avant
d’être une affaire purement technique ou financière, la
fiscalité traduit un véritable « choix de société » qui met en
jeu des valeurs et une philosophie.
Car la dérive des
prélèvements ne se traduit pas seulement par une perte de
pouvoir d’achat, mais surtout par une perte de liberté.
L’augmentation systématique des impôts, taxes et autres
charges, se traduit toujours par un rétrécissement de
l’espace des libertés individuelles dans le même temps qu’il
met en péril le sort des générations à venir.
Fiscalité et choix de société |
Si l’on me dit: « Êtes-vous prêt à payer de lourds impôts,
mais vous aurez en contrepartie un service public gratuit de
grande qualité? », je répondrai oui. Certes, je devrais
payer des impôts, mais je n’aurais pas à payer une école
privée pour mes enfants ou à sortir de l’argent pour mes
frais d’hospitalisation.
Si l’on me dit: « Vous ne
paierez que de modestes impôts, mais il vous faudra vous
débrouiller pour l’éducation de vos enfants », je répondrai
encore oui. Certes, je devrais payer une école à mes enfants
mais je serai plus riche de l’argent que l’État ne m’aura
pas prélevé, ayant les moyens d’assumer mes choix éducatifs.
Et qui mieux que moi peut choisir pour moi et mes enfants?
Mais si l’on me dit:
« Vous ne paierez pas d’impôt et vous aurez, dans le même
temps, les meilleurs services publics qui soient ». Je dis
que cela est impossible. Celui qui me propose ce « contrat »
est en train de me tromper.
Dans les faits, nous
payons toujours plus de taxes et autres impôts alors même
que la qualité des services publics se dégrade
inexorablement. Cette réalité-là est profondément injuste.
Injuste pour ceux qui paient des impôts et doivent, en plus,
payer pour leur éducation ou leur santé. Injuste pour ceux
qui ne paient pas d’impôt et qui croient réellement à
l’efficacité supposée des services publics dont ils
dépendront intégralement.
Ainsi, la fiscalité
traduit bien différents choix de société qui renvoient à
différentes visions du monde. Il y a une catastrophe dans le
monde, et nos ministres parlent de « taxe de solidarité »;
il y a du chômage en France, ils parleront de taxe sociale.
La pollution? Taxe verte…
Nos ministres ont le
réflexe de taxer depuis toujours, ils leurs manquent
seulement un prétexte. Mais les prétextes ne manquent pas!
Il est donc urgent de fixer une borne à leurs ambitions
démesurées.
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