Prenons le cas du système d’éducation. Un des objectifs visés par
une politique d’éducation primaire et secondaire gratuite et
obligatoire, et par une politique de frais de scolarité
ridiculement bas pour les études postsecondaires, est de favoriser
l’accès aux études aux enfants des familles pauvres. Ceci,
croyait-on, allait briser le cycle de la pauvreté. Toutefois, en
réalité, cette politique a favorisé l’accès aux études aux enfants
des familles de classe moyenne et élevées. Les enfants des
familles pauvres continuent trop souvent de joindre le marché du
travail dès qu’ils atteignent l’âge légal.
Le monopole d’État
fait en sorte que les décisions sont centralisées entre les
mains de quelques fonctionnaires. Les directeurs d’école et
les professeurs, coincés entre les fonctionnaires et la
convention collective, ne peuvent que constater les dégâts.
En particulier dans les milieux défavorisés, ils sont
continuellement soumis aux abus des enfants, des parents,
des fonctionnaires et des représentants syndicaux. Faut-il
se surprendre si parfois ils remettent en question leur
choix de carrière?
Le système est congestionné, sclérosé, avec pour
conséquence l’augmentation sans fin des coûts et la diminution
constante de la qualité de l'enseignement. Les parents qui sont prêts à tout
sacrifier pour assurer l’avenir de leur progéniture envoient leurs
enfants à l’école privée. Les enfants de parents pauvres n’ont
d’autres choix que de fréquenter leur école de quartier. Les plus
débrouillards s’en tireront envers et contre tous, mais
malheureusement certains tomberont dans la criminalité. La plupart
recevront une éducation médiocre qui leur garantira une place
permanente chez les pauvres.
Cette constatation prévaut à des degrés divers dans tous les
domaines monopolisés par l’État. Les pauvres sont bien utiles pour
justifier l’interventionnisme de l’État, mais ils sont toujours
les derniers à recevoir l’aide promise.
Les statistiques économiques de l’OCDE démontrent que dans les
économies modernes la pauvreté diminue lorsque la croissance
économique excède la croissance démographique. Les programmes
gouvernementaux mis sur pieds pour enrayer la pauvreté ont au
mieux des effets positifs à court terme et au pire des effets
négatifs qui détournent des
fonds qu’il aurait mieux valu utiliser pour créer de la richesse.
3. Les avantages de l’économie de marché
Devant l’incapacité des gouvernements à enrayer la pauvreté, il
faut se demander si l’économie de marché peut faire mieux.
L’économie de marché tend naturellement à utiliser tous les
facteurs de production disponibles, incluant la main-d’oeuvre, de
manière à améliorer son efficacité. En recherchant le profit,
l’entrepreneur favorise l’utilisation de main-d’oeuvre ou de
machinerie selon qu’il juge que l’un ou l’autre lui procurera un
avantage compétitif. Ainsi, les ressources nécessairement limitées
d’une économie sont allouées de façon à optimiser la croissance
économique, ce qui en retour favorise la création d’emplois et la
diminution de la pauvreté.
Certains des emplois créés seront peu rémunérés. Toutefois, ces
emplois existeront seulement dans la mesure où des travailleurs
seront disponibles pour les occuper. La plupart des gens préfèrent
occuper un emploi, même peu rémunéré, plutôt que d’être exclus de
la société par la rampe de l’aide sociale. Pour beaucoup de gens, les sentiments
d’être utile, d’appartenir à une équipe, de contribuer à la
société sont des valeurs plus importantes que le seul salaire.
Comment pourrions-nous expliquer autrement le comportement des milliers d'hommes
et de femmes qui oeuvrent comme bénévoles? Ils transmettront ces
valeurs à leurs enfants et ainsi briseront peut-être le cycle
de la pauvreté
L’économie de marché aide aussi les pauvres en tant que
consommateurs. Les entrepreneurs libres d’optimiser les divers
facteurs de production disponibles peuvent offrir des biens et
services à moindre coût, les rendant ainsi plus accessibles.
4. Les vrais pauvres
Dans un modèle de société où c’est l’économie de marché qui
prédomine, qu’arriverait-il aux plus démunis, à ceux qui n’ont même
pas les moyens de subvenir à leurs besoins les plus élémentaires?
Quel que soit le modèle socio-économique que nous préconisons, un
certain nombre de personnes doivent être prises en charge. L’élimination de tous les programmes
interventionnistes de l’État aurait deux conséquences: (1) la
pauvreté découlant des politiques interventionnistes et mal avisés
du gouvernement serait automatiquement éliminée; et (2) la
croissance économique accrue permettrait de dégager les surplus
requis pour procurer à tous les groupes de la société des
conditions de vie raisonnables.
Les Québécois sont de nature généreuse. Ils acceptent un taux d'imposition usuraire de près de 50% dans l’espoir que l’argent
qu’ils ont durement gagné sera utilisé parcimonieusement pour
procurer à tous une qualité de vie raisonnable. De plus, ils
contribuent des centaines de millions de dollars annuellement aux nombreuses
campagnes de levée de fonds pour financer des organismes
communautaires, des activités de recherche et développement, des
investissements en santé, en éducation, etc.
Devant l’incurie du gouvernement à fournir les services prépayés
par les contribuables, près de 20% de la population de 15 ans et
plus – plus d’un million de Québécois – consacrent 200 millions
d’heures, l’équivalent de 100 000 emplois à plein temps, au
bénévolat. De surcroît, le Secrétariat à l’action communautaire
autonome évalue à 3,9 millions le nombre de personnes aidantes
qui soutiennent des proches sans passer par un organisme
communautaire. Sans l’apport des bénévoles, des centaines de
milliers de Québécois vivraient dans l’indigence totale. Ce n’est
pas le gouvernement qui amenuise la misère des pauvres, mais les
Québécois eux-mêmes! Toutefois, les politiciens, les groupes de
pression et les fonctionnaires prennent tout le crédit sans même
rougir.
Il n’y a aucun doute que les Québécois, si on leur en donne la
chance,
sauront se responsabiliser face à leurs concitoyens moins
chanceux. Le cas de la clinique du Dr. Julien est un exemple
probant. Devant l’incapacité des nombreux organismes
gouvernementaux à subvenir aux besoins des enfants en difficulté
du quartier Hochelaga-Maisonneuve, le Dr. Julien a mis sur pieds
une clinique dont la réputation fait maintenant l’envie de tous.
Pour éviter d’être assujetti aux politiques sclérosantes du
gouvernement, le Dr. Julien fait appel à la générosité des
Québécois pour financer sa clinique. Il a recruté des bénévoles
compétents et engagés pour remplacer le personnel syndiqué. Ainsi,
il élimine le risque de voir l’application d'une convention collective
qui ait préséance sur les besoins des enfants. Si on pouvait mesurer
le ratio de la valeur des services rendus par rapport aux
ressources investies de la clinique du Dr. Julien, je ne doute pas
qu’il serait dix, cinquante, cent fois plus élevé que celui d’une
clinique gouvernementale.
Si par miracle le gouvernement abandonnait tous les programmes
d’aide aux pauvres et remettait aux Québécois, sous forme de
réduction d’impôts, les économies ainsi réalisées, des milliers de
Québécois de la trempe du Dr. Julien auraient vite fait de mettre
sur pied des organismes de remplacement qui eux sauraient apporter
des solutions originales aux vrais problèmes.
Les interventionnistes, croyant à l’altruisme des
politiciens et fonctionnaires oeuvrant dans le gouvernement,
demandent toujours plus de politiques visant à enrayer la pauvreté.
Dans les faits, les pauvres sont plus souvent les victimes que les bénéficiaires des programmes gouvernementaux.
Ce
qui compte, ce sont les résultats, pas les intentions. Même en
supposant que le modèle socio-économique favorisé par beaucoup de
Québécois soit intrinsèquement altruiste, la réalité impose
d’importantes limites à la capacité du gouvernement à enrayer la
pauvreté. L’économie de marché, au contraire, peut réduire la
pauvreté en créant des emplois et en dégageant suffisamment de
richesse excédentaire pour subvenir adéquatement aux besoins des
vrais pauvres.
Tout compte
fait, les pauvres
seraient beaucoup mieux servis par l’économie de marché que par le
gouvernement.
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