Outre le parcours d'un homme de qualité et la
genèse du célèbre microcrédit, le livre de l'inventeur de la Grameen
Bank (Vers un monde sans pauvreté, J.-C. Lattès, 2006)
renferme les clefs du développement économique et social. L'auteur,
qui part de situations très concrètes, y démontre combien l'économie
de marché est non seulement vecteur de profits (donc de croissance
et d'emplois), mais également de solidarité. Une solidarité qui
offre des résultats bien supérieurs à ceux obtenus par la
bureaucratie, qui n'est « pas motivée par le profit et n'a donc
aucune raison d'augmenter son efficacité ».
Son oeuvre est centrée sur l'Homme: tout homme a, en lui, des
ressources et peut, quels que soient son milieu, son éducation, ses
origines, créer une microentreprise à partir de ce qu'il sait faire.
Il a en revanche souvent besoin d'un petit capital de départ. Et
c'est ce que Yunus a réussi à offrir à plusieurs millions de
personnes dans son pays. Il a en effet compris que ce n'est pas le
travail, et encore moins les allocations, qui permettent de sortir
les plus démunis de la pauvreté, mais le capital: « les pauvres en
bonne santé ne veulent pas de la charité. Ils n'en ont pas besoin.
Les allocations chômage ne font qu'ajouter à leur détresse, elles
les privent de leur esprit d'initiative et de leur dignité. »
Le microcrédit a par ailleurs l'avantage de faire naître,
contrairement aux systèmes d'assistance, des comportements
responsables. Mais pour créer une « société d'entrepreneurs », la
mise à disposition d'un capital de départ ne suffit pas. Le
microentrepreneur a également besoin d'un environnement favorable
qui l'incite à innover. Parce qu'il doit pouvoir facilement créer sa
petite entreprise, il ne doit pas subir de contraintes
administratives. Parce qu'il doit pouvoir pleinement bénéficier du
produit de ses efforts, ses droits de propriété doivent être
respectés et la fiscalité ne doit pas le pénaliser.
Cette leçon, de nombreux pays l'ont bien comprise
autour de nous. Tous ceux qui sont durablement
sortis d'une longue crise économique (l'Angleterre,
les États-Unis, la Nouvelle-Zélande, le Canada) ou
qui ont dû s'arracher aux désastres communistes (un
grand nombre des pays d'Europe de l'Est) se sont
dits un jour: « notre modèle ne proposant pas assez
d'emplois pour tous, il faut transformer les
chômeurs et/ou les agents de l'État en
entrepreneurs. Produisez, inventez, n'attendez pas
tout de l'État, notre force, votre avenir, c'est
vous! »
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