Tout
comme Jacques Chirac, Ségolène Royal a vécu toute sa vie aux
frais de l’État. Tout comme Jacques Chirac, on ne lui
connaît aucun emploi salarié dans le secteur privé. Et tout
comme Jacques Chirac, elle s’est constituée ainsi un joli
petit patrimoine. Sa haine du libéralisme se prolonge et se double d’un goût exacerbé pour
l’ordre moral dont les ressorts sont à rechercher du côté
d’une enfance bercée par le catholicisme orthodoxe et d’un
père militaire de carrière. La fréquentation assidue de
François Mitterrand à un stade post-pubère prolongé fera le
reste. C’est-à-dire le pire!
Pour être née à Dakar au
Sénégal, Madame Royal n’en donne pas moins l’impression
d’avoir un horizon strictement hexagonal. Élue de la région
du Poitou-Charentes, son haut fait d’armes reste à ce jour
la défense du fromage de chèvres dont on disait jadis qu’il
était responsable d’une maladie nerveuse irréversible: la
danse de Saint-Guy. Voilà peut-être une explication!
Sinon, Madame Royal aime
à se faire photographier avec un agneau dans les bras,
symbole de la pureté immaculée dont elle se targue à tout
bout de champ et qui finit par fatiguer le plus patient des
éditorialistes. Ce que je ne suis d’ailleurs pas.
On peut penser que si
l’on applique le programme de Madame Royal à la lettre, la
France se trouvera dans un délai de cinq à sept ans dans la
situation de l’Argentine. Et comme les Français sont assez
peu doués pour les langues étrangères, il n’est pas certain
qu’ils acceptent de parler l’espagnol.
Le cas de Nicolas Sarkozy relève quant à lui de la pure
schizophrénie. Les familiers de Mishima apprécieront la
comparaison avec le fameux Confession d’un masque.
Même si pour Sarkozy, taxé d’homophobie par des militants homosexuels, l’allusion est perfide. Pourtant, comme
d’aucuns portent une perruque, un faux nez ou une fausse
barbe, Sarkozy, lui, porte un masque. Le masque du
libéralisme! Masque sous lequel il suffoque et qu’il
arrachera à la première occasion venue.
Adoubé par son mentor,
l’ancien premier ministre Édouard Balladur surnommé le « mou
du Bosphore » à cause de son phrasé monocorde et de ses
origines ottomanes, Nicolas Sarkozy parie sur la lassitude
d’une certaine partie de la population qui, le pense-t-il,
est désormais prête à entendre un certain langage de vérité.
Langage de vérité auquel les thèses libérales apportent
évidemment du grain à moudre. Mais comme en politique il
faut ratisser large, Sarkozy est obligé de faire le grand
écart entre son penchant soi-disant libéral et son
inclination assurément liberticide. Il prend si l’on ose
dire des libertés avec la liberté.
Sarkozy joue donc le
libéral comme Molière jouait l’avare. Comme au théâtre, le
personnage est de composition et le masque défait révélera
la vraie nature du personnage: un étatiste de la pire
espèce. Il n’est qu’à voir d’ailleurs avec quelle impudence
il utilise les moyens dudit État pour mener sa campagne
électorale. Et il n’est pas une de ses décisions passées qui
ne suintent cette attirance morbide pour l’économie et la
société dirigées.
Ministre de l’Économie,
il a tout lâché au syndicat CGT (communiste) de l’EDF
(société nationale produisant et commercialisant en
situation de quasi monopole l’électricité); ministre de
l’Intérieur, il a multiplié les effectifs policiers sans que
les résultats obtenus soient particulièrement probants; et
pour finir, il a pris nettement position en faveur des
étudiants de gauche qui, au mépris de la représentativité
démocratique, ont occupé les facultés au printemps dernier,
empêchant ceux qui voulaient le faire d’étudier et de
travailler.
Sarkozy ne veut qu’une
seule chose: le pouvoir. Et à l’instar de Chirac, ce qu’il
pourra bien en faire est de relative importance. Il joue sur
la peur et chasse sur les terres haineuses labourées par Le
Pen. Il n’y a rien à attendre de lui en matière de liberté
individuelle et civique. Sarkozy est le chef de cette police
dont Benjamin Constant disait déjà que le coupable en était
le prétexte et l’innocent le but.
Bien pessimiste catalogue |
En guise de conclusion à ce catalogue bien pessimiste, que
dire sinon qu’un pays a les dirigeants qu’il mérite. Les
Français ont-ils jamais aimé la liberté? Ils honorent des
Robespierre, des Napoléon, des Thiers, des Clémenceau mais
ignorent Bastiat, Constant ou Tocqueville. Le même Benjamin
Constant qui écrivait dans son délicieux cahier rouge:
« Dans cet heureux temps, il n’y avait pas toutes les
difficultés dont chaque démarche a été hérissée depuis que
les Français, en essayant d’être libres, ont établi
l’esclavage chez eux et chez les autres. »
On le voit, l’histoire ne
fait que repasser les plats et il n’y a – répétons-le – rien
à attendre pour les idées qui nous sont chères des
consultations françaises à venir. Comment d’ailleurs ces
prophètes endimanchés dont les costumes sentent par trop la
naphtaline pourraient-ils aimer la liberté? Quel homme ou
quelle femme, aimant la liberté et possédant un tant soit
peu de bon sens, irait, de son plein gré, se cloîtrer
pendant cinq ans dans un palais qui doit sentir le renfermé?
Pour ma part, je n’en connais pas.
Laissons le mot de la fin
à Tocqueville qui, revendiquant « son goût bien intempestif
pour la liberté », ajoutait que « personne ne s’en souciait
plus guère en France ». Et on dit que les temps changent...
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