Un vieux pays, mais surtout un pays de vieux! Tout
entier frappé par la maladie de Parkinson et qui tremble... Un pays
dyspepsique, immense fosse d’aisance à ciel ouvert où – pour
employer un langage imagé – la chiasse fait rage. Un pays cacochyme,
replié sur lui-même, livré à ses peurs ancestrales et prêt à se
livrer au premier prophète venu.
Le grand Corneille au patronyme usurpé, Pierre de son prénom et
auteur du Cid, avait pourtant prévenu:
Ô rage! Ô
désespoir! Ô vieillesse ennemie!
N’ai-je donc tant vécu que pour cette infamie! |
Contrairement à leurs auteurs, les grands mots ne
meurent jamais. Et si Sénèque, Cicéron, Ronsard ou Kawabata, devenus
barbons, ont pu jouer les cabots, démontrant, non sans talent, que
la sagesse valait bien l’enthousiasme, il n’en reste pas moins que
leurs derniers feux brillent parfois d’un éclat malsain. « Mignonne,
allons voir si la rose » est l’oeuvre d’un dragueur à bout de souffle
(au propre comme au figuré) et il n’est plus guère que Ségolène
Royal pour se réjouir de sa connotation florale.
Quant aux Belles endormies, chef-d’oeuvre parmi les chefs-d’oeuvre
et viatique obligé de tout mâle ayant dépassé la cinquantaine, il
vaudrait aujourd’hui des ennuis, plus grands encore que le prix
Nobel, à son auteur, Yasunari Kawabata. Car si les cadres japonais
ne jurent plus que par les hôtesses aux allures d’écolières et aux
jupes plissées, encore faut-il qu’elles soient majeures.
Mais ne mélangeons pas littérature et pulsions génésiques. Et si la
pudeur n’a jamais été de ce monde, ce n’est pas parce que la coupe
est pleine qu’il faut boire le calice jusqu’à la lie. Si trop
d’impôt tue l’impôt, trop de survie finit par tuer la vie.
De Gaulle, au fond plus auteur à succès qu’homme politique, et dont
la source est intarissable, n’avait-il pas lancé, prémonitoire, à
propos de Pétain: « La vieillesse est un naufrage »? Naufrage qui l’a
d’ailleurs lui-même emporté et qui nous emportera tous. Il en est de
la politique comme de la boxe, il ne faut pas livrer le combat de
trop!
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