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• Les
magistrats et membres du jury (officiers) sont
nommés par le secrétaire d’État à la Défense dans le
cadre d’une procédure gardée secrète. Difficile de
ne pas y voir un problème d’impartialité et
d’indépendance.
• Un détenu ne peut placer une requête en Habeas
Corpus devant les tribunaux afin de contester
son arrestation et les conditions de sa détention.
De nombreux rapports font état de l’utilisation de
la torture physique et mentale lors d’interrogatoire
à Guantanamo(4).
Des techniques pourtant condamnées constamment par
le Département d’État lorsqu’utilisées dans d’autres
pays comme la Chine, par exemple.
• La présomption d’innocence n’existe pas puisque
chaque détenu arrêté se voit déjà marqué du sceau du
combattant illégal.
• Il n’existe aucune garantie de pouvoir obtenir les
services d’un avocat civil. Si l’accès est permis,
les communications sont plutôt difficiles et
parsemées d’embûches.
• Durant un procès, les militaires peuvent utiliser
des preuves secrètes contre l’accusé sans qu’il soit
possible pour ce dernier d’en questionner la
provenance et la validité.
• La peine de mort peut être prononcée contre un
détenu à la majorité de deux tiers des juges
militaires, alors qu’il faut un consensus unanime
dans les tribunaux ordinaires. |
Ce sont là des mesures qui non seulement entachent la
crédibilité du processus judiciaire américain, mais qui
minent aussi la réciprocité du droit envers les
ressortissants étrangers. Lorsque des citoyens
américains sont arrêtés dans d’autres pays et accusés
d’un crime, les réactions ne tardent pas à se faire
entendre pour qu’on exige la conformité aux procédures
judiciaires internationalement reconnues. Ce qui, en
soi, est tout à fait légitime.
Comme l’a déjà écrit le
défunt, juge William J. Brennan: si nous nous attendons
à ce que les étrangers obéissent à nos lois, ces gens
doivent comprendre que nous obéirons à notre propre
constitution en cas de poursuite et de condamnation. Une
démarche cohérente qui respecte l’équité à la base du
Bill of Rights et qui encourage d’autres nations à
faire de même.
Si certains ont reprochés aux groupes de défense des
droits civiques de vouloir dénaturer les tribunaux de
Guantanamo(5),
la Cour suprême des États-Unis, sous la plume du juge
John Paul Stevens, a confirmé dans un jugement de 5
contre 3 que les prisonniers ne peuvent être jugés
seulement par des commissions militaires. Il est
inconcevable, surtout dans le cadre de la lutte contre
le terrorisme, de voir l’exécutif réécrire la loi,
changer les règles à son avantage, tout en mettant sur
pied des tribunaux qui s’apparentent à des laboratoires
d’expérimentation.
Le terrorisme est un
crime qui doit être traité dans le respect de la loi et
des procédures judiciaires telles que mentionnées dans
la Constitution. Prenons en considération que lors des
attentats du World Trade Center en 1993, les auteurs de
cet horrible drame furent jugés en cour fédérale et
condamnés à 240 ans de prison. Après un procès fort
médiatisé, Timothy McVeigh, fanatique d’extrême droite
ayant fait sauter un camion rempli d’explosifs dans un
bâtiment fédéral d’Oklahoma City, fut condamné à la
peine capitale.
Plus près de nous,
Zacaria Moussaoui, que l’on surnomme « le 20e
kamikaze », fut condamné à la réclusion à perpétué par
le tribunal d’Alexandrie en Virginie. John Walker Lindh,
Américain d’origine capturé en Afghanistan, a eu droit à
un procès devant un tribunal fédéral avec une protection
légale. La juge Leonie M. Brinkema de la Virginie a
acquitté un homme soupçonné par Washington d’activités
terroristes. Elle a déclaré dans son jugement que les
preuves retenues ne pouvaient conclure à sa culpabilité.
La branche judiciaire doit exercer ce contrepoids jugé
absolument nécessaire par les pères fondateurs pour
éviter que l’exécutif emprisonne des innocents.
Il est vrai que l’on ne
change pas la nature humaine. Il y a aura toujours des
individus crapuleux prêts à commettre des actes de
violence contre la propriété d’autrui. Des gestes
inadmissibles qui, en vertu du droit, doivent être
condamnés. Mais un pays comme les États-Unis, qui possède
une longue tradition en matière de justice, a le devoir
sinon l’obligation de prêcher par l’exemple. Il lui faut
fermer Guantanamo et réitérer son engagement envers des
principes constitutionnels fondamentaux tels la
présomption d’innocence, la protection contre les
châtiments cruels et le droit à un procès juste et
équitable devant un jury impartial. C'est ce qui
distingue fondamentalement un pays civilisé de tous ces régimes dont
les pratiques sont dignes de l’âge médiéval.
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