Comme beaucoup d’enfants gâtés, certains étudiants veulent toujours
moins d’évaluation, moins de sélection, pas de redoublement, plus de
droits: autant de sirènes démagogiques auprès desquelles des adultes
responsables ne doivent pas succomber. Les parents vont-ils demander
à leurs enfants comment il convient de les éduquer? Être à l’écoute
(des jeunes) n’est pas être aux ordres (des jeunes). Bien sûr, ces
étudiants vont me rétorquer qu’ils sont majeurs. Sans doute! Mais
ils sont tout de même à la charge de la « collectivité nationale »
tandis qu’un bon nombre d'entre eux vivent encore chez leurs parents. Tant que les
contribuables leur financeront des études, ils devront rendre compte.
C’est un devoir moral avant d’être une contrainte comptable.
Les pouvoirs publics ont
tout de même rencontré les syndicats étudiants, faisant toutes les
concessions demandées. Il s’agissait de rassurer les syndicats en
vue d’acheter la paix sociale. Finalement, le projet d’autonomie a
tellement été amendé que l’autonomie des universités françaises est
renvoyée aux calendes grecques. Par contre, on a quand même les
blocus. C’est bien la preuve que le dialogue social « à la française » ne fonctionne pas, mais qu’il a lieu de plus au mépris des urnes
et des électeurs. Dans le fond, ce « dialogue » de sourd est
révélateur de dérèglements plus profonds et plus inquiétants.
Premièrement, il est
cocasse qu’en France certains étudiants n’aient toujours pas compris
que seuls les travailleurs sont en mesure de déclarer et faire une
grève dans la mesure où ils ont un travail. Quand les cheminots font
grève, cela bloque le pays. Mais quand des étudiants s’arrêtent
d’étudier, personne ne s’en aperçoit, surtout s’ils se sont
engouffrés dans des formations qui ne correspondent à aucune demande
sociale. Dans ces cas-là, l’intelligence et la modestie commandent
de faire profil bas.
On peut nuancer ce propos en considérant que
les étudiants ont en réalité un « métier »: c’est celui consistant à
étudier. En ce sens ce sont au minimum des « pré-travailleurs » ou
de futurs travailleurs en train de constituer et forger leur stock
de capital humain. Les enseignants ont pour métier d'enseigner. Les
premiers sont donc « de passage » à l'université tandis que les
seconds y accomplissent leur vie professionnelle. Seuls donc les
seconds devraient être admis à participer à la mise au point d'une
réforme universitaire, quelle qu'elle soit! Comment les étudiants
peuvent-ils raisonnablement participer à la réforme d'une
institution dans laquelle nombre d'entre eux ne passent que 2 à 5
ans en moyenne?
En tous cas, un étudiant
n’est pas encore un travailleur, et il ne le sera jamais s’il ne se
donne pas la peine de choisir des filières d’enseignement supérieur
qui lui apporteront une réelle qualification. Les étudiants les plus
virulents sont inscrits dans des filières qui n’offrent aucune
perspective de débouchés. Autrement dit, la collectivité se paie le
luxe d’entretenir des individus dont l’utilité ne saute plus aux
yeux (et c’est un doux euphémisme) alors qu’elle n’en a plus les
moyens.
Deuxièmement, partout
dans le monde (civilisé), l’autonomie des universités est
l’expression et la garantie de la liberté de l’enseignement
supérieur et la condition du progrès des sciences et des
connaissances; mais c’est une liberté dans la responsabilité,
celle-là même qui effraie nos anarchistes assistés. On ne peut plus
développer en France des formations parking qui condamnent les
étudiants au chômage aux frais du contribuable: on plume ainsi les
parents pour duper les enfants! Les universités sont libres de
proposer les formations qu’elles désirent du moment que ces
formations s’autofinancent. Et elles s’autofinanceront dans la
mesure où les bénéficiaires directs de ces formations universitaires
– les étudiants, les fondations, les collectivités locales et les
entreprises – seront disposés à en assumer le coût.
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