Deux situations similaires |
Prenons le cas de deux familles québécoises représentatives de
la société, les Tremblay et les Roy. Ils ont le même nombre
d’enfants et habitent la Rive-Sud de Montréal.
Les Tremblay appuient
la formation politique Québec Solidaire. Ils sont généreux. Ils constatent que la
pauvreté domine dans les familles monoparentales. Ils croient
que le gouvernement devrait prendre plus aux riches pour le
redistribuer aux pauvres. Ils ont bien l’intention d’inculquer
des valeurs de partage et de justice à leurs enfants. Ainsi,
deux règles bien simples régissent la vie familiale:
• Tout appartient à tous;
• Tous doivent partager
ce qu’ils ont.
Les Roy ne sont pas
membres d’un parti. Ils sont aussi généreux que les Tremblay.
Toutefois, ils constatent que dans beaucoup de domaines les
Québécois se comportent de manière irresponsable. Ils croient
que le gouvernement québécois, quel que soit le parti au pouvoir, est trop
interventionniste, ce qui déresponsabilise les individus. Ils ont
décidé de responsabiliser chacun de leurs enfants. Pour ce faire,
deux règles gouvernent la vie familiale:
• La responsabilité de
tout ce qu’ils possèdent est clairement assigné à un membre de
la famille;
• Le propriétaire n’est
pas obligé de partager ce qu’il possède.
Des résultats diamétralement opposés |
Après plusieurs années,
voyons où en sont chacune de nos familles.
Chez les Tremblay,
puisque tout appartient à tous, chacun a le droit d’utiliser
n’importe quel jouet quand bon lui semble. Écoutons ce qui se
passe:
– Jean: Prête-moi ton
jouet.
– Marie: Non. C’est moi
qui l’a.
– Maman: Voyons les
enfants, il faut partager.
– Marie: Chaque fois que
je prends quelque chose, Jean veut l’avoir.
– Jean: Ce n’est pas
vrai. C’est toujours toi qui l’a.
– Maman: Voyons Marie, tu
es une grande fille raisonnable, prête le jouet à ton petit
frère.
Quelques minutes plus
tard, maman voit le jouet qui traîne au milieu du salon.
– Maman: Les enfants,
ramassez le jouet qui traîne au salon.
Le soir venu maman doit
se résigner à le ramasser. Les demandes répétées et la menace de
confiscation n’ont pu convaincre Jean ou Marie à ranger le
jouet.
Chez les Roy, la
propriété de chaque jouet est clairement connue de tous.
Écoutons ce qui se passe:
– Anne: Prête-moi ton
jouet.
– Pierre: Non, c’est mon
jouet.
– Anne: Maman, Pierre ne
veut pas me prêter son jouet.
– Maman: C’est le jouet
de Pierre. Si tu veux l’avoir tu dois le convaincre de te le
prêter. Offre-lui quelque chose en échange.
Quelques minutes plus
tard, maman remarque que le jouet traîne dans la bibliothèque.
– Maman: Pierre ramasse
ton jouet où je le confisque.
Pierre se dépêche
d’obtempérer. Il sait que maman ne badine pas avec les
consignes.
Quelles leçons pouvons-nous en tirer? |
La notion de propriété
permet aux Roy de gérer efficacement la vie familiale. Les
règles sont claires et connues de tous. Anne et Pierre savent
qu’ils ne peuvent s’en remettre à une autorité supérieure
(Maman) pour régler leur conflit. Ils sont bien obligés de
trouver une entente qui satisfasse les deux partis. De plus,
Pierre sait qu’il risque de perdre la propriété de son jouet
s’il ne le range pas, ce qui évite à maman de le faire. À
travers ce processus, Anne et Pierre acquièrent des valeurs de
partage volontaire et de respect des autres.
Par contre, chez les
Tremblay, malgré la « meilleure » volonté de maman, elle doit souvent
arbitrer les conflits entre Jean et Marie. Comme elle a un
faible pour le petit dernier, Marie est appelée à céder plus
souvent qu’à son tour. De plus, puisque tout appartient à tous,
à la fin de la journée, c’est maman qui doit ranger. Jean et
Marie apprennent qu’ils peuvent profiter de l’influence qu’ils
ont sur maman et ils en abusent largement. Ils savent aussi
qu’ils n’ont pas à respecter les consignes puisque maman n’est
pas en mesure d’identifier le responsable.
Que ce soit au niveau
d’une microsociété comme la famille ou au niveau d’une société
comme le Québec, les règles en jeu sont les mêmes. Le respect de
la propriété privée permet de minimiser les conflits et
d’optimiser les rapports entre les individus.
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