Il
faut bien reconnaitre aussi que les ménages les plus
modestes ne sont pas non plus les derniers à sacrifier à ce
rituel de la surconsommation de masse, ayant tendance à
dilapider plutôt rapidement un revenu issu de la
redistribution plutôt que de la production. Et un revenu que
l’on vous donne sans contrepartie apparait toujours
insuffisant par rapport aux besoins infinis qu’il donne à
entrevoir. C’est parce que notre pays s’est enfermé dans
cette logique qui le conduit à surconsommer des produits et
services qu’il n’est plus en mesure d’offrir lui-même qu’il
ne pourra maintenir son rang de puissance économique.
Finalement, la France se retrouve dans la situation des
années 1970 où toute politique de relance de la consommation
nourrissait l’excédent commercial de l’Allemagne, stimulant
l’économie allemande alors que l’on s’enfonçait dans la
stagflation sur fond de dévaluation du franc.
Et comment être compétitif si l’on ne travaille pas?
L’économie est comme le sport: un sportif qui veut être
compétitif se doit de s’entraîner. La quantité et la qualité
du travail sont intimement liées. Certes Mozart avait un
don, mais c’était une raison supplémentaire pour travailler
durement, pour ne pas gaspiller ce don du ciel, ce que le
père de Mozart avait bien compris. On commence à atteindre
une expérience qui devient un savoir-faire difficile à
imiter après des années de travail, à condition que ces
années elles-mêmes soient bien utilisées. À force de réduire
la durée du travail sur la semaine comme sur toute une vie,
en rentrant de plus en plus tard dans la population active
et en en sortant toujours plus tôt, nous perdons de
considérables effets d’expérience, ce qui se traduit par une
perte structurelle de compétitivité.
Pendant ce temps,
Roselyne Bachelot se propose de résoudre rapidement
l’imbroglio des
RTT, notamment dans le secteur hospitalier où la
régulation administrative de l’offre médicale a contribué à
la désorganisation générale du secteur sous le prétexte de
le protéger des forces prétendument déstabilisatrices du
marché. Autrement dit, un gouvernement de droite se retrouve
dans la situation de devoir trouver une solution à un
problème créé par un gouvernement de gauche. Car n’oublions
jamais la paternité de la RTT que l’on doit à Martine Aubry,
et à laquelle Dominique Strauss-Kahn – que certains
n’hésitent pas à qualifier comme le meilleur économiste de
France (encore un!) – n’est pas totalement étranger. A-t-on
jamais vu la gauche se soucier de résoudre les problèmes
posés par la droite? Non, pour la raison simple que, pour la
gauche, les problèmes énoncés par la droite ne sauraient
être pertinents. C’est ce qui explique d’une manière
générale que la gauche au pouvoir n’a jamais ressenti le
besoin de faire une ouverture à droite, alors qu’on mesure
aujourd’hui le génie de Nicolas Sarkozy à sa capacité à
remettre en selle Attali, Lang ou Rocard. Pour ma part,
cette ouverture est moins un signe de victoire de la droite
qu’un aveu implicite de faiblesse.
Souhaitons donc bien du
courage au ministre de la Santé car le casse-tête des RTT
est proprement insoluble dans la mesure où les idées de
gauche, généralement inspirées par l’immédiateté démagogique
et la volonté farouche de prendre le pouvoir à n’importe
quel prix, n’ont pas de solutions concrètes puisqu’elles se
réfèrent à un monde idéal qui n’a jamais existé dans les
faits. En effet, la gauche veut la croissance économique
sans les inégalités, le revenu sans le travail, les
meilleurs services publics accessibles gratuitement à tous,
la valorisation sans la sélection, le résultat sans
l’effort, les droits sans les devoirs, le pouvoir d’achat
sans la volonté de créer, d’innover et de produire.
Une droite courageuse –
et réellement décomplexée – doit clairement affirmer qu’elle
n’a pas à résoudre les problèmes nés des aspirations
contradictoires et insolubles de la gauche. C’est encore
faire une politique de gauche que de vouloir résoudre les
problèmes posés par la gauche. Il faut carrément abolir les
35 heures et redonner la liberté aux acteurs du marché du
travail – comme cela avait été annoncé pendant la campagne
électorale – plutôt que de se fourvoyer à nouveau dans une
nouvelle complexité technocratique dont la France a le
secret (que personne ne nous envie). De ce point de vue, je
me suis réjoui de l’annonce du président de la République à
ce sujet à l’occasion de sa première conférence de presse.
La gauche a poussé ses habituels cris d’indignation (ce qui
était bon signe à mes oreilles ravies)… et le président
s’est alors rétracté.
Ce n’est pas la peine
d’ironiser sur la faiblesse de l’opposition quand cette
opposition parvient à faire reculer un gouvernement
clairement élu sur pratiquement tous les dossiers de
réformes.
C’est à l’occasion du
contrat de travail volontairement négocié par des employeurs
et des salariés libres de nouer des relations contractuelles
que seront fixés les paramètres clés qui décideront de
l’embauche, notamment le salaire et le temps consacré au
travail. Et c’est précisément cette liberté contractuelle
que nient les conventions collectives et que refusent les
partenaires sociaux. Pourtant, les paramètres fondamentaux
du contrat de travail ne peuvent ni être figés une fois pour
toutes dans une loi, ni être les mêmes pour tous.
Enfin, José Bové peut terminer sa grève de la faim,
judicieusement commencée après les fêtes, il a été entendu.
Là encore, durant sa campagne, le candidat Sarkozy avait
promis qu’il n'imposerait plus aucun moratoire qui nous
condamnerait à un recul scientifique et technologique
proprement suicidaire. Avec Attali comme conseiller pour les
questions économiques, Rocard pour l’enseignement, voilà
Bové intronisé conseiller sur les questions scientifiques et
technologiques. Avec une telle armada d’experts, la faillite
annoncée n’est pas loin.
Car quel est le sens de
l’interdiction des OGM en France?
Imaginons-nous un instant
à l’époque où Edison dépose le brevet de l’ampoule
électrique. À ce moment, les Anglais et les Allemands sont
particulièrement en avance sur les applications
industrielles et commerciales de l’électricité alors même
que les scientifiques n’ont pas une connaissance précise et
affirmée du phénomène en cause. Certains voient donc dans
l’électricité un « miracle », tandis que ses détracteurs en
font l’incarnation du mal absolu.
Mais la connaissance
théorique progresse souvent grâce aux applications.
Imaginons que la France ait mis en place à ce moment une
haute autorité, pétrie de principe de précaution et de bons
sentiments, et surtout puissamment influencée par le lobby
des fabricants de chandelles. Celle-ci recommande
d’interdire le brevet de l’ampoule électrique en France, ce
que s’empresse de promulguer le président de la République.
Il s’agit en effet de protéger les activités traditionnelles
qui font vivre tant de familles et font tout le charme du
terroir national tout en sauvegardant les emplois de ces
milliers d’ouvriers qui allument et éteignent chaque jour
les rues des grandes villes françaises. Vous rendez-vous
compte que ce diable d’Edison se propose de mettre au point
un procédé par lequel il suffit d’appuyer sur un
interrupteur pour éclairer tout Paris et ses plus beaux
monuments. Quelle catastrophe pour l’emploi national!
D’autant que les rapports
officiels stigmatisent les nombreux accidents qui peuvent
survenir dans les foyers à vouloir diffuser une technologie
comme l’électricité que nous connaissons si peu. N’a-t-on
pas vu un père de famille s’électrocuter en voulant changer
une maudite ampoule qui avait grillé? Voyez comme cette
technologie n’est ni fiable ni sûre… Alors que tous les
autres pays augmentent l’effort de R&D après avoir pris
conscience du potentiel économique de l’électricité, la
France s’isole dans un moratoire...
Avec le recul, cette
fable peut prêter à sourire. C’est pourtant cette posture
que nous adoptons en ce moment même adoptant des moratoires
insensés sur les OGM ou les nanotechnologies au nom d’une
vision proprement délirante du principe de précaution.
Encore une fois, cette
sagesse affichée n’est que du protectionnisme déguisé, sur
fond de montée de l’obscurantisme, qui renvoie aux calendes
grecques la rupture espérée.
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