Montréal, 15 mai 2008 • No 256

OPINION

 

Pierre-Yves Pau, Eng., MSc, MBA, habite à Toronto.

 
 

LES MASCULINISTES SELON LES MARXISTES

 

par Pierre-Yves Pau

 

          Les Éditions du remue-ménage publient ces jours-ci un ouvrage collectif dirigé par Francis Dupuy-Déry et Mélissa Blais, sous le titre Le mouvement masculiniste au Québec, l'antiféminisme démasqué, un festival de sophismes et de coq-à-l’âne que vingt minutes de lecture relégueront au rôle de cale-bibliothèque. Ces universitaires représentent la principale (la seule?) caution intellectuelle d’une phalange marxiste et antilibérale, qui a trouvé dans le combat contre le croque-mitaine masculiniste une façon de ne pas disparaître totalement du radar médiatique, et de justifier les subventions gouvernementales qui permettent d’entretenir son écosystème de délires hallucinatoires: car qu’est-ce qu’un marxiste, sans ennemi de classe? S’il n’y en a plus, il faut bien en inventer un.

 

          On retrouve dans ce petit groupe bien soudé des pseudo-chercheurs, comme Jean-Claude Saint-Amant, mais aussi des féministes pures et dures comme Pierrette Bouchard, auteure avec ses consoeurs Boily et Proulx d’une étude sur l'échec scolaire des garçons – fortement contestée bien que financée par les deniers publics ($75,000) –, mais où l’on voyait pour la première fois officialisé le terme « masculiniste » pour désigner de façon indiscriminée quiconque s'intéresse à la condition masculine, y compris des personnalités parfaitement respectables tel le psychologue Yvon Dallaire. Ce rapport a d’ailleurs valu à Pierrette Bouchard une poursuite en diffamation de la part d’une association mise en cause. Et puis il y a enfin l’inénarrable Martin Dufresne, dont la prose est à la fois un sujet de perplexité et d’hilarité.

          Les événements de l’actualité ne cessent cependant de nous rappeler que ces extrémistes ont leurs entrées aux bonnes places, comme en témoigne la récente campagne contre les agressions sexuelles financée par la ministre Christine Saint-Pierre avec des chiffres nucléaires – affirmer que 33% des hommes québécois sont des violeurs en puissance, faut quand même pas avoir froid aux yeux. Il a été prouvé hors de tout doute raisonnable que les affirmations faites au cours de cette campagne ne reposaient sur aucune recherche scientifique sérieuse ou récente. Dans une société moderne et ouverte comme celle du Québec, il serait en principe impensable qu'une ministre utilise de l'argent des citoyens dans le but de mentir sciemment à la population et surtout de rabaisser encore une fois l’ensemble du genre masculin.

          Et pourtant, chaque fois que quelqu'un au Québec ose poser quelques questions bien légitimes sur les chiffres utilisés dans les campagnes gouvernementales concernant les agressions, il est automatiquement étiqueté comme « masculiniste », comme si valider des faits ou se préoccuper de condition masculine ne pouvait procéder que d'une démarche intrinsèquement misogyne: c’est de la censure par intimidation, du sophisme, relayés aux plus hauts niveaux de l’appareil étatique.

          Heureusement, de plus en plus de femmes au Québec réalisent que le portrait que les Saint-Pierre, Dupuy-Déry et consorts tracent des hommes québécois est non seulement diffamatoire, mais porte préjudice à l’ensemble de la société. La violence, peu importe le sexe, l'origine, l'âge ou la religion, est un phénomène inacceptable qui doit être sévèrement condamné. Cependant, gonfler intentionnellement les chiffres pour faire du sensationnalisme, c'est précisément banaliser cette violence.

          On retrouve justement un exemple de ce genre de banalisation tout récemment, dans une affaire relatée par La Presse. En résumé, Lynn Ayoub a été expulsée de sa propre maison à la suite d'une querelle avec un ex-conjoint qu'elle hébergeait. La dame n'a plus accès à sa maison, depuis qu'elle a été arrêtée par la police et accusée de voie de fait à l'égard de Richard Boily. Ce dernier, qui n'a pourtant aucun droit sur l'immeuble, continue d'y vivre.
 

« Heureusement, de plus en plus de femmes au Québec réalisent que le portrait que les Saint-Pierre, Dupuy-Déry et consorts tracent des hommes québécois est non seulement diffamatoire, mais porte préjudice à l’ensemble de la société. »


          C’est avec intérêt que j’ai pris connaissance de la mésaventure survenue à cette Mme Ayoub, car elle arrive chaque année à des centaines d’hommes québécois. J’en ai connu plusieurs personnellement, qui n’ont pourtant jamais levé ne serait-ce que le petit doigt sur leur conjointe, ou même prononcé un mot de travers. Un ouvrage a d’ailleurs été consacré à ces abus:

          On imagine sans peine les terribles séquelles matérielles et psychologiques de tels événements, ainsi que le climat de paranoïa et de suspicion dont ils peuvent entacher les relations de couples et la vie des familles. L’article de Mme Desjardins souffre malheureusement d'une omission qui risque de rendre l’histoire totalement inintelligible au non-cognoscenti. En effet, dans l’affaire de Mme Ayoub, la police et la justice n’ont fait qu’appliquer la loi, ou plutôt (puisqu'il s'agit de décrets), les directives édictées par la Politique d'intervention en matière de violence conjugale, et ses divers manuels d'applications, dont peu de gens connaissent l'existence (puisqu'ils n'ont jamais été votés par le Parlement, ni publicisés explicitement).

          Il aurait donc été utile que la journaliste note dans son article, afin de permettre à ses lecteurs de décoder les faits, l’existence et les grandes lignes de cette politique profondément sexiste, qui prive de surcroît les corps policier et judiciaire de tout pouvoir discrétionnaire (c'est-à-dire, du bon sens), et entérine donc de facto une violation de la présomption d'innocence aux dépens de citoyens inoffensifs comme Mme Ayoub.

          Ainsi donc, aujourd’hui des arroseuses potentielles se retrouvent… arrosées. C’est dans l'ordre des choses, le boomerang revient toujours à l'envoyeur, malheureusement ce sont des gens sans malice comme cette pauvre dame qui en font les frais. Cependant, les milliers d'hommes québécois qui ont subi le même sort depuis une quinzaine d’années (application de la Politique), eux, n'ont jamais eu droit à un entrefilet. Ça choque, quand l'injustice change de bord, n’est-ce pas? Eh oui, c’est ça qui est ça! Comprenez-moi bien, je ne cherche pas ici à faire de l’antiféminisme primaire, simplement à souligner que l’arbitraire institutionnalisé ne fait que jeter de l’huile sur le feu d’histoires la plupart du temps sans conséquence, mobilise des ressources précieuses qui seraient mieux utilisées pour la protection des véritables victimes, et finit toujours par se retourner contre des tiers innocents.

          En ce qui concerne la Politique d’intervention, il faudra semble-t-il que ses effets pervers commencent à affecter des femmes « bien sous tout rapport », ou des politiciens en vue, pour qu’on en parle. C’est dommage, les choses ne devraient pas avoir besoin de dégénérer à ce point, et cette politique, instituée à l’instigation directe de groupes de pression plus soucieux de propagande idéologique que du véritable bien-être des femmes, devrait être sérieusement revue ou même tout simplement, abrogée. Quand la Loi récompense la tromperie et avalise l’impunité (les auteures de fausses dénonciations ne sont à toute fin pratique presque jamais condamnées), tout cela avec la bénédiction et les encouragements de responsables de l’exécutif comme la ministre de la Condition féminine, Christine Saint-Pierre, les comportement civilisés prennent vite le bord.

          Mais pour penser de telles choses, je suis sans doute manipulé par de méchants masculinistes mangeurs de petits enfants. Saint Francis Dupuy-Déry, priez pour moi! On ne peut s'empêcher cependant de conclure que sans la caution de l'État et de la puissance publique, les divagations des auteurs du Mouvement masculiniste au Québec, l'antiféminisme démasqué n'auraient absolument aucune importance.
 

 

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