Ce
sont toutefois les Services gouvernementaux généraux (qui
incluent les transferts aux gouvernements territoriaux et
les paiements de péréquation) qui subiront la plus forte
augmentation, à 16,3%. Le bandit de grand chemin qui se
montre très généreux entre les moyens brigands et les
pickpockets, voilà sûrement un pas de géant vers l'État
minimal! Suivent les transports, avec une augmentation de
12,3%, et les programmes touchant la sûreté et la sécurité
publique, avec une augmentation de 11,7%. Les programmes
touchant l'environnement et les ressources, de même que les
programmes de soutien aux industries, aux régions, à la
science et à la technologie, augmenteront de même tous plus
vite que la moyenne cette année. Les programmes culturels
n'augmenteront que de 3,9% – moins que la moyenne mais tout
de même un peu plus que l'inflation, ce qui signifie une
augmentation en termes réels. On est donc loin du saccage
dénoncé par les parasites culturels.
L'augmentation la moins
forte (si l'on exclut la justice et la loi, dont les budgets
vont diminuer) est celle des programmes sociaux, qui inclut
les principaux transferts aux individus et aux provinces
(l'assurance-emploi, les prestations aux aînés, le Transfert
canadien en matière de santé et le Transfert canadien en
matière de programmes sociaux): 3,4%. Là encore, il faut
mettre les choses en perspective. Ce poste budgétaire
finance une bonne partie de l'État-providence canadien et
compte pour une gigantesque portion des dépenses du
gouvernement fédéral, soit 46%, ou 100 milliards $. Ce sont
des dépenses relativement fixes, qui augmentent cette année
au même rythme que l'inflation, de 3,3 milliards $, ce qui
nous indique tout de même qu'il n'y a aucune coupure dans
ces programmes en termes réels.
Bref, presque tous les
postes de dépenses augmentent plus vite ou aussi vite que
l'inflation, ce qui explique la croissance de la taille de
l'État en termes réels. Les dépenses militaires ne comptent
quant à elles que pour une portion modeste de ces
augmentations, soit environ 14% (le 1,4 milliard $ de hausse
du budget de la défense dans le premier tableau sur les 10,2
milliards $ de hausse totale des dépenses dans le deuxième
tableau).
Le triomphe de l’étatisme de
droite |
À droite aussi, la presque totalité des partisans
conservateurs préfèrent se fermer les yeux pour maintenir
l'illusion. On se dit que ce gouvernement a tout de même
annoncé des coupures courageuses des subventions aux
parasites culturels (qui découlent en fait d'une révision
automatique des programmes faite par les bureaucrates; le
gouvernement se vante d'ailleurs de dépenser plus
aujourd'hui pour la culture qu'il y a deux ans). Que s'il
reçoit des électeurs un mandat majoritaire, il aura enfin
les mains libres pour vraiment faire le ménage.
Ah oui, comme cet autre
étatiste de droite, George W. Bush, qui, nous le rappelle
John Williamson, a augmenté les dépenses à un rythme annuel
de 8,4% depuis le début de la décennie, ce qui bat tous les
records. Et, ajouterais-je, qui procède en ce moment au plus
gigantesque renflouement étatique d'un secteur économique
dans l'histoire du monde en prenant le contrôle total des
entreprises semi-privées qui subventionnaient l'achat de
propriétés, Freddie Mac et Fannie Mae.
Tiens, drôle de
coïncidence: des augmentations de dépenses de 8,4% sous Bush
depuis huit ans; une augmentation de 8,4% des dépenses sous
Harper durant les trois premiers mois de l'année. C'est
Gilles Duceppe qui a raison: Harper n'est qu'un clone de
Bush! Ce sont tous les deux des « big government
conservatives » qui disent une chose et font le contraire,
qui achètent des votes à la pelletée avec l'argent des
contribuables, et qui sont plus intéressés à consolider leur
pouvoir qu'à mettre en pratique les principes auxquels ils
disent croire.
Il y a peut-être une
logique à vouloir appuyer le moins pire des candidats pour
faire avancer nos idées à petits pas, et dans bien des cas
les promesses des conservateurs semblent mieux y
correspondre que celles des autres partis. Mais il faudrait
tout de même s'assurer de faire la distinction entre le
discours et la réalité. Question de ne pas être trop déçu et
d'avoir l'air stupide lorsque cette dernière nous rattrape.
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