Les
manuels sont abondamment illustrés et le peu de textes qu’on
y trouve est consacré pour une bonne partie à l’éthique.
L’apprentissage des religions au primaire est donc très
rudimentaire. L’élève n’aura qu’une vague idée de ce que
sont ces différentes religions. Il ne connaîtra rien des
différences entre les courants protestants, ni même ce qui
pourrait séparer l’orthodoxie du catholicisme. Ajoutons à
cela, la volonté affirmée de démontrer que les religions se
ressemblent (elles ont toutes des récits de la création, des
rites de mariage, encouragent le partage, etc.) Le manuel
Modulo pour la 2e primaire demande aux jeunes de faire
ressortir les similitudes, mais pas les différences dans
« les récits de l’Annonciation, de la reine Maya et de la
révélation à Muhammad [entendre Mahomet en français] ». Or,
ce qui est intéressant, c’est ce qui distingue les religions
et qui parfois se cache sous un même nom. Pour citer Rémi
Brague, définir Napoléon en disant: « il a deux jambes et
une tête, donc il est comme moi », n’avance à rien.
Relevons encore, pour la
partie culture religieuse, l’impression lancinante de lire
des documents Nouvel-Âge tant par la mise sur un pied
d’égalité des différentes religions, la valorisation de la
spiritualité autochtone, de l’écologie, de la Terre-Mère et
enfin la quête du bonheur ici-bas comme but ultime – et non
le salut comme c’est le cas pour les chrétiens.
Souvent absents de ce
cours: les parents. La figure du sage y est plutôt
interprétée par un M. Paulo dont la ressemblance avec Paulo
Coelho, auteur à succès de romans syncrétistes, est
frappante. Les enseignants sont relégués au rôle d’animateur
qui doit s’assurer que les jeunes n’enfreignent pas les
règles du dialogue lors de leurs découvertes sur les
religions ou la morale. Les enfants semblent devoir
construire une éthique de vie par eux-mêmes sans avoir été
instruits dans une tradition morale particulière.
Les manuels abondent en
questions proposées à la discussion des enfants. La teneur
de ces discussions dépendra en grande partie de
l’enseignant. Prenons cette question: « Fais l'inventaire de
tous les modèles familiaux que tu connais. Que
remarques-tu? » On conçoit aisément que la discussion puisse
aborder, avec certains enseignants, les couples homosexuels,
sujet où les religions et les familles ont des positions
très variées et tranchées. Qu’exigera-t-on de l’enfant dans
une telle discussion? Pour les élèves qui penseraient que
les familles monoparentales sont moins souhaitables que les
familles avec un papa et une maman, une page idoine du
manuel fustige ce comportement en le caricaturant
négativement. Cette même page se termine par la question
suivante: « De quoi a-t-on besoin pour former une famille?
Discutes-en avec tes camarades. » L’enfant vivra une
pression sociale si ses valeurs familiales ne vont pas dans
le sens du programme ou du groupe.
La transmission d’une
tradition et la formation de l’enfant à une morale
exigeante, adaptée à son âge, ne semblent pas être l’objet
de ces manuels. Au contraire, on cherche à l’habituer, au
plus tôt, à un ensemble de traditions présentées comme
équivalentes, sans trop en approfondir les doctrines ni les
différences, afin semble-t-il qu’il choisisse ce qui lui
plaît de ce buffet religieux superficiel. Quels avantages à
cette atomisation spirituelle des Québécois? En quoi cela
respecte-t-il les voeux des parents québécois pour leurs
enfants?
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