Deux temps, trois mouvements |
En l’an 2000, le taux d’assistance pour les films québécois
était de 4%. Trois ans plus tard, les productions
québécoises récoltaient des revenus records de 22,8 M$ aux
guichets, soit 12,8% des recettes totales des cinémas d'ici.
Le nombre de spectateurs s'était aussi élevé à un niveau
historique de 3,75 M pour les films produits ici, neuf fois
plus qu'une décennie auparavant.
En 2005, l’assistance aux
films québécois atteignait de nouveaux sommets avec 5
millions d’entrées, ce qui équivalait à 18,9% de toute
l’assistance. L’Institut de la statistique de la province
déclarait alors que « les résultats exceptionnels du cinéma
québécois au cours de [2005] couronnent cinq années d’une
croissance extrêmement vigoureuse, durant lesquelles le taux
de croissance annuel moyen de l’assistance aux films
québécois a été de 30,6%, tandis que celui des films de pays
étrangers a été négatif, soit de - 4,8%. »
Durant cette période, des
films comme Séraphin, un homme et son péché, Les
Invasions barbares, La Grande séduction,
C.R.A.Z.Y., Le Survenant, Horloge biologique,
Aurore, Maurice Richard, Bon Cop, Bad Cop,
pour ne nommer que ceux-là, ont été plusieurs fois
millionnaires. Certains se retrouvant même parmi les films
les plus populaires de l'année, toutes origines confondues,
sur les écrans de la Belle Province.
Les chroniqueurs
culturels, devant le succès de notre industrie
cinématographique, clamaient que « le cinéma québécois avait
enfin trouvé son public ». Certains parlaient même de petit
âge d’or du cinéma québécois. Comme si quelqu’un quelque
part avait poussé une switch et que plus rien ne
serait comme avant. Un cas généralisé de wishful thinking,
si vous voulez – du moins dans le petit milieu du cinéma. Là
où ils auraient dû voir le succès d’une poignée de films,
ils ont vu une tendance lourde.
Depuis, la situation a
évolué. Comme le moral des critiques de cinéma, il est allé
vers le bas. Cette année, le cinéma québécois a attiré
beaucoup moins de spectateurs en salle. Pour l’été qui
s’achève, la part du cinéma québécois dans les recettes
totales du cinéma a dégringolé en deçà des 10%, son plus
faible niveau en six ans. Comment expliquer cette nouvelle
« crise »?
C’est pas moi, je le jure |
Chacun avance une raison pour expliquer cette pauvre
performance. Les films ne sont pas suffisamment
« fédérateurs » – whatever that means. Leur mise en
marché « n’a pas été à la hauteur ». Les stratégies de
sortie ont été déficientes. Les périodes de projection, pas
assez longues. Les budgets de production, trop petits. Le
nombre de productions québécoises offertes, trop élevés.
Un producteur estime
qu’il faut peut-être « revoir nos stratégies de sortie. Il y
a des méthodes de distribution qu'on peut raffiner pour
sortir des films différemment, peut-être aller chercher les
jeunes de façon plus efficace », poursuit-il, alors que le
film Le banquet a engrangé, pour sa première semaine
en salle, des recettes inférieures à 60 000 $ sur 13 écrans.
Une productrice
souhaiterait voir les films demeurer plus longtemps à
l'affiche pour améliorer le sort de notre cinématographie:
« Beaucoup d'argent est dépensé en promotion, et pour faire
le plus d'argent le plus vite possible, on ne laisse pas les
films à l'écran suffisamment longtemps pour que le
bouche-à-oreille fonctionne. »
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