Les
dépenses du gouvernement sont la plupart du temps basées sur
des justifications politiques et non économiques. Elles ne
correspondent pas nécessairement à une demande réelle. Le
gouvernement les finance avec des impôts qu'il a soutirés
aux contribuables et aux entreprises. On enlève d'une main
ce qu'on redonne de l'autre, en créant du gaspillage et des
distorsions additionnelles en route. C'est pourquoi
augmenter les activités du gouvernement n'a pas pour effet
de « soutenir l'économie », comme le répètent
quotidiennement dans les médias les illettrés économiques,
mais bien de la couler encore davantage.
Ces dépenses publiques ne
sont pas plus justifiées en période de ralentissement alors
que des ressources semblent être inutilisées (des
travailleurs qui sont au chômage ou des usines qui sont
fermées) et qu'on se dit qu'il est tout de même préférable
de les occuper à quelque chose. Avant de se trouver un usage
plus pertinent, une ressource doit nécessairement passer par
une période d'inactivité. Un réajustement prend
nécessairement du temps. En venant s'accaparer ces
ressources pour les activer de manière artificielle parce
qu'il veut absolument intervenir à court terme, le
gouvernement les empêche de trouver un usage plus productif
dans le secteur privé et court-circuite donc la reprise à
moyen terme.
La proposition de
l'Institut C.D. Howe a le mérite de limiter les dégâts des
plans de dépenses keynésiens. Sauf qu'en réduisant les
impôts des entreprises et des contribuables sans
diminuer les dépenses de l'État, on ne fait que placer le
secteur privé et le gouvernement en concurrence l'un avec
l'autre pour l'obtention de ressources réelles. Qui va
obtenir les ressources qui correspondent à ces fonds de 26
milliards $ que le gouvernement retourne en baisse d'impôt
mais qu'il continue aussi à dépenser en s'endettant?
Il n'est pas du tout
évident que ce soit le secteur privé qui en ressorte
gagnant. Le gouvernement peut se permettre d'offrir un prix
plus élevé (ou des salaires plus élevés) que des entreprises
pour ces ressources, puisqu'il n'a aucune exigence de
rentabilité. En finançant ses dépenses par la dette, le
gouvernement vient aussi chercher dans l'économie réelle
l'épargne qui pourrait servir à autre chose. Si les fonds
additionnels dégagés par les baisses d'impôt se retrouvent à
financer les dépenses du gouvernement (par l'achat de bons
du Trésor), il n'y a en fin de compte rien de changé. Le
gouvernement continue d'accaparer autant de ressources, la
seule différence étant qu'il s'est endetté pour continuer à
les utiliser.
La seule solution pour
transférer concrètement des ressources réelles du secteur
public au secteur privé est donc simple: réduire les impôts
et réduire les dépenses du gouvernement, c'est-à-dire
diminuer réellement la demande de l'État pour des ressources
réelles. Dans ce cas, les fonds libérés vont concrètement
permettre aux entreprises d'avoir accès à plus de ces
ressources réelles, et à meilleur prix parce qu'elles
n'auront pas des organismes gouvernementaux comme
concurrents.
Il faut souligner le
courage et la présence d'esprit de mos amis de l'Institut
Fraser qui, le 12 janvier dernier,
conseillaient au ministre des Finances non seulement de
réduire les impôts, mais aussi de réduire les dépenses et de
maintenir le budget équilibré. Depuis tout le début de la
crise, il s'agit de la première intervention publique par
des individus ou des organisations au Canada qui va dans ce
sens.
L'Institut Fraser avait
mal commencé ses interventions dans cette crise lorsque son
président, Mark Mullins, un économiste néoclassique
incohérent et confus comme la plupart de ses collègues qui
ne connaissent pas l'économie autrichienne,
avait stupidement affirmé à l'automne que des crises de
ce genre sont normales parce que le capitalisme est un
système fondamentalement instable. Selon lui, le
gouvernement se devait d'intervenir pour empêcher la crise
mais pas trop et seulement temporairement pour éviter de
politiser l'économie. On a vraiment besoin que de prétendus
défenseurs du libre marché viennent alimenter de la sorte
les clichés marxistes qu'on entend un peu partout!
Même s'il n'utilise pas
les mêmes arguments autrichiens que je présente ci-dessus,
l'économiste senior de l'Institut, Niels Veldhuis, explique
au moins clairement que le gouvernement est un poids mort
dans l'économie et qu'il doit lui aussi réduire ses
dépenses, comme le font tous les Canadiens:
The most effective way for the federal
government to help the Canadian economy is to reduce
government spending and permanently decrease personal
income and business taxes, says Niels Veldhuis, Fraser
Institute senior economist.
"Canadians would benefit tremendously from tax relief
aimed at improving incentives to work, invest, and
engage in entrepreneurial activities. Incentive-based
tax relief would improve Canada's competitiveness and
provide a solid foundation for a vibrant economy
unburdened by increased government debt in years to
come," Veldhuis said. (...)
"Increasing government spending―whether it's on bailouts
for inefficient industries or increased unemployment
benefits―will lead to a deficit that will saddle
Canadians with higher taxes in the future. There's no
need for Canada to run a deficit other than a
politically motivated desire to do so," Veldhuis said.
(...) "Our government needs to follow the lead of many
Canadian households and begin by trimming the fat, not
taking on more debt."
La politique étant ce qu'elle est, le ministre des Finances
et ses apparatchiks ne vont évidemment pas suivre ces
conseils et s'appuyer sur la logique économique pour rédiger
le budget du 27 janvier, mais plutôt sur la rentabilité
politique. Les dernières rumeurs sont que le déficit
pourrait atteindre 40 milliards de dollars. Le Canada
s'apprête donc à s'enfoncer de nouveau dans le cercle
vicieux de l'endettement, comme au début des années 1970.
Seul parmi les pays du G7, il en était sorti de peine et de
misère depuis le milieu des années 1990. Est-ce que ça
prendra encore une fois 25 ans avant de voir la lumière au
bout du tunnel?
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