LOGEMENT SOCIAL: L’ÉTENDU DU DÉSASTRE (Version imprimée)
par Michel de Poncins*
Le Québécois Libre, 15 janvier 2009, No 263.
Hyperlien:
http://www.quebecoislibre.org/09/090115-2.htm
Mme Christine Boutin, ministre du Logement, de la Ville et de la Lutte
contre l'exclusion, vient de faire la même erreur qu'ont fait les
gouvernements américains successifs pendant des années et qui est à
l’origine de la crise des subprimes aux États-Unis, avec par ricochet une
crise mondiale la plus phénoménale depuis longtemps. Elle veut permettre
à des personnes qui ne devraient pas avoir cette possibilité d’être propriétaires de leur logement. La presse la crédite de bonnes intentions.
Ce n'est pas notre avis. Elle est animée de mauvaises intentions, sa
seule excuse étant son ignorance, car elle ne sait pas que ces
intentions sont mauvaises.
Elle avait lancé le 21 février dernier la construction de maisons à 15 €
par jour. Elles succédaient à la maison à 100 000 € de son prédécesseur
Jean-Louis Borloo qui avait échoué dans le projet. Le 22 décembre 2008,
elle a remis symboliquement les clés de leur logement à deux ménages –
le prix de construction des logements fut de 158 000 à 181 000 €,
terrains compris. Les « heureux » bénéficiaires contractent pour arriver
à leur fin des emprunts sur 45 ans. Bien entendu, il y a une panoplie
d'aides publiques sous des formes diverses dont une TVA à 5,5% et des
prêts à taux zéro. Il est à craindre, selon les expériences antérieures,
que les maisons ainsi livrées ne soient pas de grande qualité et l'on
peut se demander si elles tiendront au moins pendant la durée des prêts…
Que se passera-t-il, d'ailleurs, si les bénéficiaires veulent revendre
leur maison?
C’est l’occasion d’évoquer l'état déplorable de l'industrie du logement
en France et la véritable catastrophe que représente le logement social
et cela permet de comprendre comment on est arrivé au drame des maisons
à 15 euros par jour.
Opération de destruction de
l'industrie du logement |
Au point de départ, se trouve la
destruction de l'industrie du logement en France engagée par
les pouvoirs publics dirigistes depuis des décennies. Il en
résulte un nombre immense de blocages qui empêchent les gens
de construire là où ils veulent, comme ils veulent et au
prix qu'ils veulent. La construction pour se loger
s’apparente à un vrai parcours du combattant. Les promoteurs
énoncent couramment que le dossier étatique coûte 20% du
prix de la construction. Les riches s’en arrangent. Celui
qui n’a que trente mètres carrés pour se loger en perd six,
ce qui est dramatique.
Le zonage de la France doit être souligné. Le territoire est
découpé en de multiples zones souvent enchevêtrées où pour
construire le moindre bâtiment il faut s’agenouiller devant
des fonctionnaires multiples, arrogants et incompétents,
avec la corruption éventuelle en prime.
Les propriétaires-bailleurs sont entravés par de multiples
liens et en particulier par le manque de liberté des loyers
et l'impossibilité de chasser les mauvais locataires. Le
pouvoir actuel s'est signalé par un nouveau blocage des
loyers qui est une sorte de reconstitution de la désastreuse
loi de 1948 dont pourtant l'on se débarrassait peu à peu.
Les impôts multiples sur les logements, y compris l’ISF
(impôt de solidarité sur la fortune) annulent tout rapport
locatif et font fuir les investisseurs.
Il en découle une vraie pluie de lois diverses prétendant
précisément corriger la calamité créée artificiellement. Les
crypto-socialistes de tous partis s’apercevant de la crise
imaginent des parades sous forme de lois de circonstances
supposant relancer le logement.
Il est impossible d’énoncer tous ces dispositifs. De
mémoire, il y a la loi Malraux, la loi Périssol, la loi
Pons, la loi Méhaignerie, la loi Robien et la loi Borloo que
l’on qualifie de « Borloo social », mais la liste n’est pas
exhaustive.
Les journaux financiers ont évoqué un « match
Robien-Borloo ». Ils conseillaient les malheureux épargnants
sur la meilleure formule qui ne peut surgir qu’après des
calculs ésotériques. Notons que les calculs, quand ils sont
possibles, montrent que l’épargnant ne bénéficie guère de la
niche fiscale offerte par ces lois; l’essentiel de
l’avantage est capté par les intermédiaires.
Il faut aussi compter avec les innombrables droits de
préemption et d’expropriation.
La conséquence est une crise endémique des logements. Et,
comme de juste, la catastrophe frappe davantage les plus
pauvres et les faibles. La conséquence est une autre immense
calamité, à savoir le logement social et, par son existence
même, ce logement social contribue à l'accentuation de crise
du logement. En effet, il donne aux gens l'idée absolument
folle que pour se loger, il ne faut pas compter sur ses
propres efforts mais bien uniquement sur les pouvoirs
publics. Le tam-tam répand cette même idée jusqu'au fond de
l'Afrique et, comme pour tous les problèmes qui assaillent
la société française, il se produit des migrations abusives
et insupportables – c'est un chef socialiste qui a dit que
la France ne pouvait accueillir toute la misère du monde.
Le logement social généralisé se traduit par de mauvais
logements, souvent délabrés et mal entretenus et par des
files d'attente qui évidemment ne peuvent que s'accroître.
Mixité et « droit » au
logement |
À la première calamité qui est le logement
social s'ajoute une deuxième calamité, à savoir la recherche
d'une prétendue et chimérique mixité.
Et nous voici avec la désastreuse loi Gayssot (une de plus!)
visant à obliger les communes qui n'ont pas assez d’HLM à en
bâtir – l’objectif étant d’atteindre dans toute la France le
seuil de 20% de logements dits sociaux. Si les maires
n’obtempèrent pas, les communes sont taxées. Remarquons que
même les maires dont la population accepterait d’être taxée
finissent par capituler – des pressions s’exercent ainsi que
des chantages divers, comme le chantage à l’investiture, à
la subvention ou tout simplement à la légion d’honneur.
Maintenant, certains parlent même de sanctions pénales
contre les récalcitrants!
Les HLM deviennent ainsi l'un des véhicules de la pauvreté.
Conçus apparemment pour résoudre l'un des aspects de cette
pauvreté, c'est-à-dire l'absence de logements pour tous, ils
multiplient en fait cette pauvreté: plus il y aura de HLM,
plus il en faudra.
Comme l'on sait, la dernière innovation est cette véritable
horreur juridique qu'est le droit opposable au logement
instauré sous le nom de loi « Dalo », nouveauté socialisante
de l’année 2007 en application depuis le 1er janvier 2008.
Quand une personne se trouvant sur le territoire français
n'est pas logée ou logée d'une façon qui ne la satisfait
pas, elle a le droit de se retourner contre l'État à l’aide
d’une instance juridique pour exiger un logement qui lui
convienne. Bien sûr, cette innovation est liée aux logements
sociaux dont l'État prétend avoir la charge. C’est, en
quelque sorte, une obligation juridique pour l’État de faire
du socialisme.
La simple création de ce droit crée à l’intérieur de la
France des besoins nouveaux et artificiels, car, finalement,
beaucoup de personnes peuvent se prétendre mal logées. Qui
peut juger valablement de la convenance ou non convenance
d’un logement pour quelqu’un?
Les tribunaux ont déjà commencé à être submergés de
multiples demandes. Dès le premier jour de l’année 2008, des
associations qui sont subventionnées – c'est-à-dire dont la
vie et la richesse repose aussi sur un pillage – se sont
mises en route pour préparer les dossiers et plus de 300
personnes se trouvaient devant la préfecture de Paris pour
retirer leurs dossiers de demandes de logements. En
province, nous ne connaissons pas les chiffres, l’incendie
mettant du temps à se propager.
La chaîne des événements destructeurs concernant le logement
joue un grand rôle dans la
paupérisation du peuple français.
Que ferait un pouvoir « libérateur » dans ce domaine?
Il s'empresserait de supprimer un grand nombre des lois qui
empêchent les gens de construire librement et certaines de
ces lois sont parfaitement connues des praticiens. La
richesse qui résulterait de cette suppression et la liberté
d’agir retrouvée permettraient à chacun de se loger, y
compris les plus faibles.
Les villes et les villages de France ont été bâtis pendant
des siècles avec les techniques des époques successives sans
intervention de l’État et ont logé riches et pauvres, la
mixité sociale se réalisant sans mesures particulières.
Beaucoup de ces villes et villages font aujourd’hui
l’admiration des visiteurs!
Les temps ont bien changé.
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* Michel de Poncins écrit les flashes du Tocqueville
Magazine et est l'auteur de quelques livres. |