GUADELOUPE ET MAURICE: DEUX ÎLES BIEN DIFFÉRENTES... (Version imprimée)
par Michel de Poncins*
Le Québécois Libre, 15 mars 2009, No 265.

Hyperlien: http://www.quebecoislibre.org/09/090315-15.htm


Les journaux sont pleins de l’incendie qui a éclaté en Guadeloupe. Ils ont dit que l’île vivait sous perfusion de la métropole: assistanat et chômage au rendez-vous. Dans les situations de ce type, plus on en reçoit, plus il en faut et le pouvoir sarkozien se prépare à déverser de plus en plus d’argent qu’il n’a pas et qu’il devra chercher on ne sait où.

Des flammèches de l’incendie se transportent sur l’île voisine de la Martinique.

Besancenot, le riche révolutionnaire, est venu sur place à nos frais évidemment, selon lui, uniquement pour s’instruire; « s’instruire de quoi, lui demande un journaliste? » « Apprendre comment faire en France », répond-il sans sourciller. Les Français savent au moins ainsi ce qui les attend quand ce Monsieur aura appris.

Un cas intéressant est celui de la Réunion qui commence aussi à s’agiter et qui offre comme les autres le spectacle désolant de l’exception française.

Cette île lointaine vit pratiquement en totalité de l’aide publique de la métropole; environ 40% de la population reçoit des aides diverses. Le reste évidemment vit aussi indirectement de cette manne publique, les commerçants et bien d’autres en recevant les effluves. Cela n’a jamais empêché les manifestations, car la logique interne à toute aide publique est que les bénéficiaires en redemandent sans cesse et que d’autres arrivent sur leurs traces pour revendiquer une part du gâteau.

Le 21 février 2003, ce qui est une drôle de coïncidence de date, le bonhomme Raffarin avait dû se rendre d’urgence sur place et lâcher, notamment, une miette en annonçant le relèvement du plafond d’accès à la CMU (la couverture maladie universelle); c’est la stratégie des miettes utilisée par tous les pouvoirs crypto-socialistes depuis des décennies et qui joue un rôle majeur dans l’effet de ruine: on jette des miettes aux foules affamées d’aides publiques.

Personne ne parle, ces jours-ci, de l’Île Maurice indépendante depuis 1969 et voisine de la Réunion. Or, c’est la même région, le même territoire et la même population. C’est aussi la même histoire, fortement liée à l’histoire de France, avec une parenthèse britannique pour l’Île Maurice.

Maurice n’ayant plus à sa disposition, lors de son indépendance, des contribuables européens agenouillés et consentants a dû se débrouiller toute seule et elle a choisi la voie de la libre entreprise. Le gouvernement, bien que travailliste, a volontairement tourné le dos au socialisme et à l'État-providence. Ainsi, les forces vives de ce pays ont pu, à tous les niveaux de responsabilité, se mobiliser pour créer tout un réseau de petites et moyennes industries exportatrices. Une coopération industrielle d'entreprises européennes et surtout françaises a pu s’organiser; plus de cent entreprises franco-mauriciennes ont été ainsi créées dans les dix premières années.

Le résultat a été spectaculaire. La comparaison avec l'île voisine de la Réunion est significative. Souffrant de l'aide française, celle-ci se traîne depuis des décennies avec une proportion incroyable de chômeurs et de rmistes et cela ne s’arrête pas.

Voici des signes de la prospérité de l'Ile Maurice: relativement faible taux de chômage et hausse des salaires les plus bas. La prospérité est obtenue malgré une très forte densité et malgré le manque de ressources naturelles, sauf la canne à sucre. Cela confirme que cette prospérité peut se construire sans ressources naturelles et uniquement sur la base de bonnes ressources humaines jouant dans la liberté.

Au début du développement, il n'y avait pas de smic. Cela explique que tout le monde se soit mis à travailler sans tarder; une conséquence est, justement, que maintenant les salaires, notamment les plus faibles, ont beaucoup progressé comme ils le font dans les pays où il n’y a pas de smic ou un smic très faible: voir la Suisse.

Depuis peu, apparaît un nouveau et excellent phénomène, à savoir la nécessité de délocaliser. En France, beaucoup critiquent les délocalisations en accusant les industriels. Cette accusation est injuste, car ce sont les hommes de l'État qui, par leurs dépenses incroyables et les charges qui s'ensuivent, poussent les entreprises dehors.

En revanche, quand la qualification de la main-d’oeuvre augmente et que la gestion des affaires se perfectionne, un cercle vertueux s'amorce. Les salaires progressent et il faut délocaliser certaines productions. Mais la main-d’oeuvre locale, précisément, est mieux payée et en outre elle peut bénéficier de produits moins coûteux venant de pays où cette même main-d’oeuvre est moins chère. Ce type de délocalisation, malgré les problèmes ponctuels, est de bon augure.

Les prélèvements obligatoires à l'Île Maurice ne dépassaient pas il y a quelques années 10%, ce qui est l'une des causes évidentes de la prospérité. Le président chinois, lors de sa récente tournée africaine, s’y est arrêté, ce qui montre son intérêt pour un si petit pays.

Si on avait voulu faire une expérience pratique de la liberté, on n’aurait pas pu faire mieux que de juxtaposer ces deux îles. L'océan Indien va devenir un pôle de prospérité dans les années à venir et l'Île Maurice a l'ambition de jouer pour l'océan Indien le rôle que joue Singapour pour l'Asie du sud et du sud-est.

Les aides publiques, y compris les promesses inconsidérées du pouvoir en vigueur aujourd’hui en France, sont depuis toujours prélevées dans les conditions contraignantes que l’on sait sur les capitalistes et les travailleurs français. Elles ravagent à due concurrence et comme un cyclone l’économie française et à l’autre bout des océans entretiennent le cyclone de la misère. C’est le cas des aides qui vont être déversées sur la Guadeloupe et par imitation inévitable sur les territoires semblables.

Ces îles sont appelées à continuer à sombrer dans les sables mouvants de l’aide publique française.

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* Michel de Poncins écrit les flashes du Tocqueville Magazine et est l'auteur de quelques livres.