Le prix d'une obligation varie inversement avec l'intérêt qu'il rapporte. Ainsi,
quand la demande diminue pour les obligations, leur valeur baisse, et le taux
d'intérêt qu'elles portent augmente proportionnellement. Cette semaine, le
rendement sur les obligations à échéance de 10 ans a ainsi
grimpé jusqu'à 3,74%, ce qui dépasse le 3% qui prévalait en mars lorsque la
Fed a annoncé son programme d'achat de bons du Trésor et son intention d'acheter
encore plus de titres hypothécaires. C'est encore peu, mais tout de même une
indication que ce programme, qui a pour but de maintenir les taux d'intérêt très
bas,
ne semble pas très bien fonctionner. Pour éviter une hausse de taux, la Fed
doit donc multiplier ses achats, c'est-à-dire injecter toujours plus de faux
argent dans l'économie.
Lorsque les marchés décideront vraiment de laisser tomber les obligations
américaines, on assistera à un enchaînement de phénomènes dont les répercussions
sont incommensurables. Les grands investisseurs comme la Chine, le Japon et les
pétromonarchies ne peuvent se permettre de laisser tomber le dollar, puisque la
valeur de leurs avoirs en dollar s'effondrerait. Mais si plusieurs investisseurs
plus modestes, mais suffisamment importants collectivement pour avoir un impact,
finissent par totalement perdre confiance dans les politiques de la Fed et se
mettent à vendre leurs obligations, on pourrait assister à un effet
d'entraînement. Les gros seront alors dans une position intenable: vendre tout
de suite pour limiter les dégâts, ce qui aura pour effet d'amplifier le
mouvement de chute; ou attendre en espérant le contenir et peut-être tout perdre
si les autres ne font pas de même.
Un tel mouvement entraînera un effondrement du dollar et une chute du prix des
obligations – et conséquemment une hausse des taux d'intérêt de ces obligations.
La Fed n'aura alors que deux choix:
1) Poursuivre sa politique inflationniste en achetant
massivement des obligations pour soutenir leur valeur et maintenir les taux
bas, ce qui entraînerait une hyperinflation et un effondrement encore plus
accéléré du dollar, le largage de l'économie américaine par le reste du
monde et une chute draconienne du niveau de vie des Américains; ou bien
2) Changer sa politique à 180 degrés en augmentant les
taux d'intérêt suffisamment pour ramener les investisseurs, soutenir le
dollar et contenir l'inflation, ce qui entraînerait l'échec des plans de
relance des derniers mois, une accélération des faillites des propriétaires
de maisons incapables de se refinancer à des taux trop élevés, une hausse
accélérée du chômage, des coupures budgétaires gigantesques par un
gouvernement incapable de financer sa dette, et une contraction subite et
massive de l'économie américaine.
D'un côté, l'équivalent d'une fuite en avant et d'une
faillite; de l'autre, l'équivalent d'une diminution draconienne de sa
consommation pour rembourser ses dettes. Il n'y a pas d'autres façons d'échapper
à un endettement massif. Dans le second cas cependant, si on arrêtait
d'intervenir et d'empêcher l'économie de se rééquilibrer, on pourrait au moins
préparer une reprise sur des bases plus solides après une période difficile.
La baisse des dernières semaines annonce-t-elle la phase finale de l'effondrement du
dollar? Il est toujours impossible de le dire, mais nous en sommes certainement
plus près qu'il y a un an et demi. L'analyse autrichienne se fonde sur des
tendances inévitables à la lumière de la logique économique, mais n'est pas une
boule de cristal. Les économistes illettrés économiques conventionnels, qui
n'ont rien vu venir et qui
prévoient maintenant une reprise au cours des prochains mois parce qu'ils
croient en l'efficacité des interventions du gouvernement et de la Fed, ne
comprennent cependant rien à la logique économique et se trompent encore une
fois. D'une façon ou d'une autre, la semaine prochaine ou dans un an, les
Américains devront payer pour avoir prodigieusement vécu au-dessus de leurs
moyens depuis des décennies et avoir bousillé les fondements de leur
productivité par l'étatisation de leur économie.
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