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Grippe
A(H1N1): Est-on encore en train de crier au loup? (Version imprimée) |
par
Martin Masse*
Le Québécois Libre, 15
octobre 2009, No 271.
Hyperlien:
http://www.quebecoislibre.org/09/091015-2.htm
Quand j'étais adolescent, la grande peur était de mourir
grillé lors d'une attaque nucléaire. Certains nerds qui s'intéressaient à
l'astronomie (c'était mon cas) imaginaient aussi une collision d'un astéroïde
géant avec la Terre, comme celui qui aurait exterminé les dinosaures il y a 60
millions d'années. C'était des peur permanentes et plutôt diffuses et à part
certains films à sensation comme
The Day After et des documentaires sur les dinosaures, on en entendait
rarement parler dans les médias.
De nos jours, les grandes peurs se succèdent l'une après l'autre et font partie
de la vie quotidienne. On se souviendra du sida, du bogue de l'an 2000, du
réchauffement planétaire, du terrorisme, du SRAS, de la grippe aviaire, de
l'effondrement du système bancaire, et quoi encore. La fin du monde est annoncée
tous les six mois, à moins qu'on ne fasse ci et ça, qui coûte en général des
milliards de dollars et nécessite des modifications parfois draconiennes de
notre mode de vie. Chacune de ces catastrophes annoncées a cependant fini par
passer et la Terre tourne toujours.
On constate que derrière chacune de ces grandes peurs, il y a quelques groupes
d'intérêt qui ont grandement intérêt à ce que tout le monde croit à la
catastrophe prochaine et que les gouvernements prennent les « mesures
nécessaires » pour la prévenir: le complexe militaro-industriel, l'establishment
médical et pharmaceutique, les activistes écolos et les compagnies qui vendent
des produits « verts ». Ces groupes sont soient directement reliés à l'État,
soit jouissent d'un accès privilégié et ont des réseaux d'influence très
développés. Il ne faut pas non plus oublier les grands médias, qui doivent
remplir du temps d'antenne ou des pages et qui tentent de maintenir l'attention
de leur clientèle avec des reportages hystériques.
Le pattern est toujours le même. Ceux qui font preuve de scepticisme ou
qui conteste les fondements de la grande peur sont traités d'inconscients,
d'irresponsables ou de négationnistes. À chaque fois, les gouvernements en
profitent pour réduire un peu plus nos droits et libertés traditionnelles. Et
quand une grande peur finit par passer, on oublie tout, on évite évidemment de
faire un post-mortem critique, et on passe à la suivante. Doit-on se surprendre
si le public commence à en avoir marre et se laisse de moins en moins manipuler?
Le ministre québécois de la Santé, Yves Bolduc,
exprimait récemment son inquiétude devant la méfiance populaire grandissante envers les
campagnes de vaccination massives qui se préparent contre la grippe A(H1N1) et
la difficulté à faire entendre son message. La stratégie de vaccination est en
effet « remise en doute quotidiennement dans des courriels, des forums de
discussions, des lettres de lecteurs, des sites Internet, des sites de
réseautage comme Facebook ou même des conférences et des congrès publics. »
Eh oui, dur dur de procéder à un lavage de cerveau et à un contrôle serré de la
population à l'ère d'Internet. Il y a quinze ans, quand les médias dociles
contrôlaient l'essentiel du message et pouvaient étouffer toute contestation,
les choses étaient plus simples. Aujourd'hui, ils sont obligés de tenir compte
de tout ce qui se passe en dehors de leur petit monde et de tenter de
l'expliquer. Dans
la feuille de chou nationalo-étatiste, on pouvait ainsi lire que:
Deux types de discours viennent toutefois court-circuiter
le message officiel. Les premiers prennent la forme de charges
antivaccination qui misent sur la peur du complot. Ces attaques sont pour la
plupart dénuées de tout fondement scientifique. Plusieurs sont carrément
loufoques, comme ces allégations de manipulations bioterroristes visant à
éradiquer la moitié de la population terrestre par l'entremise d'un vaccin
truqué dans un laboratoire secret appartenant tantôt aux forces américaines,
tantôt à des terroristes d'al-Qaïda.
D'autres discours mettent toutefois en lumière des omissions ou des
contradictions réelles dans le message en demi-teintes des autorités
sanitaires. La communauté scientifique elle-même contribue à brouiller le
message. Encore cette fin de semaine, l'OMS a remis en doute la validité
d'une étude canadienne qui concluait que les personnes ayant reçu un vaccin
contre la grippe saisonnière étaient deux fois plus susceptibles de
contracter le virus pandémique.
La semaine dernière, c'était au tour du Journal de l'Association médicale
canadienne de contester l'efficacité du lavage des mains dans la chaîne
de contamination du virus, pourtant la pierre angulaire des mesures de
prévention mises en branle par Québec. Dans tout ce charivari d'études
contradictoires, même les spécialistes en perdent leur latin. En France et
en Angleterre, plus de la moitié des effectifs infirmiers compte refuser le
vaccin contre la grippe H1N1. Ici, des médecins n'hésitent plus à aller à
contre-courant en émettant des doutes sur la stratégie canadienne. Quand ils
ne se prononcent pas ouvertement contre la vaccination... Résultat, un
Canadien sur deux affirme ne rien vouloir savoir du vaccin contre le H1N1.
Doit-on en déduire qu'il y a quelques bonnes raisons d'être
sceptiques?! Comme dans le cas du réchauffement, plus on va se rendre compte que
les « experts » ne s'entendent même pas entre eux et que le présumé
« consensus » sur la question n'est qu'un mythe visant à délégitimer et à faire
taire les opposants, moins la population va gober tout cru tout ce qu'on lui
raconte.
Dans le cas de la grippe A, les raisons d'être sceptiques ne manquent
certainement pas. Dans La Presse,
une chroniqueuse nous expliquait pourquoi elle qui pensait qu'on
s'inquiétait trop pour rien est devenue très inquiète après avoir interviewé le
Dr Redouane Bouali, ex-chef des soins intensifs de l'Hôtel-Dieu du CHUM et
maintenant directeur du Réseau local intégré de soins de la région de Champlain
en Ontario.
Après avoir parlé de l'expérience australienne où 300 malades ont dû être
hospitalisés en juin, le bon docteur précise que « L'expérience australienne ne
change rien au fait que la grippe A (H1N1) reste une maladie mineure avec une
mortalité très basse ». Ah bon! Pourquoi alors créer un climat d'hystérie avec
ça? Pourquoi faire prendre un risque à des millions de gens en administrant un
vaccin probablement inutile dans la grande majorité des cas? Pourquoi
en acheter 11 millions au Québec, pour une population de 7,5 millions?
Pourquoi en faire un sujet de coordination mondiale comme si les Martiens
venaient de nous envahir? Pourquoi noircir des pages sur la question à tous les
jours? Pourquoi prévoir des mesures extrêmes où l'on forcera le personnel de la
santé à aller au travail et l'on traitera la population comme du bétail?
Il est évident qu'il y a des gens, des groupes de pression, des bureaucraties et
des entreprises qui profitent énormément de cette grande peur, autant sur le
plan monétaire qu'avec les power trips qu'ils peuvent se permettre. À chaque
nouvelle crise qui finit par ne pas vraiment en être une, le niveau de
scepticisme augmente. Et comme il est très facile aujourd'hui autant de
s'informer que de communiquer des informations, ça prend de moins en moins de
temps avant que l'opposition s'organise.
Le tournant de ce millénaire pourrait bien dans les livres d'histoire du futur
être décrit comme une période bizarre où les populations auront été sujettes à
des vagues de délire millénariste. D'ici là, espérons qu'il ne se présentera pas
une véritable menace à la sécurité ou à la santé du monde, qui sera prise trop à
la légère et qui causera plus de dégâts que nécessaire pour cette raison. Ceux
qui auront crié au loup pour rien (ou pour défendre leurs propres intérêts)
pendant des décennies seront criminellement responsables si cela devait arriver.
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Martin Masse
est directeur du Québécois Libre. |