Hyperlien: http://www.quebecoislibre.org/09/091215-4.htm « Les deux MM cherchent depuis des années à obtenir les données des stations du CRU. S'ils apprennent jamais qu'il existe une loi sur l'accès à l'information aujourd'hui au Royaume-Uni, je pense que je vais effacer les fichiers au lieu de les envoyer à qui que ce soit. Nous avons également une loi sur la protection des données, derrière laquelle je vais me cacher. » Voilà en apparence ce qu'a écrit Phil Jones, le directeur de l'Unité de recherche climatique (CRU – Climate Research Unit) de l'Université d'East Anglia et l'un des climatologues les plus en vue de la planète, dans un courriel envoyé en 2005 à « Mike ». Selon ce que l'on peut en déduire à partir des échanges de courriels, il s'agit de Michael Mann, qui est directeur du Centre des sciences de la terre de l'Université de Pennsylvanie. Nous avons déniché ce petit morceau intéressant dans la pile de plus de 3000 courriels et documents dévoilés la semaine dernière après que les serveurs du CRU aient été piratés et que des messages échangés par certains des climatologues les plus influents du monde aient été diffusés sur Internet. Les « deux MM » sont presque certainement Stephen McIntyre et Ross McKitrick, deux Canadiens qui ont consacré des années à essayer d'obtenir les données brutes et les codes utilisés dans les graphiques et modèles servant à étudier l'évolution du climat, puis à vérifier les conclusions publiées sur cette base – une tâche méticuleuse qui nous apparaît clairement comme un service d'utilité publique et d'intérêt scientifique. M. Jones n'a pas répondu à nos questions et l'université a déclaré qu'elle ne pouvait confirmer l'authenticité des courriels, même si elle a reconnu que ses serveurs ont bel et bien été la cible d'une attaque. On découvre beaucoup de choses même en passant en revue une fraction des courriels. Les scientifiques semblent occupés à s'exhorter les uns les autres à présenter une perspective « unifiée » sur la théorie des changements climatiques provoqués par l'homme tout en discutant de l'importante de leur « cause commune »; à se donner des conseils sur les façons d'arranger les données pour ne pas compromettre leur hypothèse préférée; à discuter des moyens à prendre pour exclure les points de vue opposés des revues les plus prestigieuses; et à s'échanger des trucs sur les façons de «masquer le déclin» des températures dans certaines séries de données dérangeantes. Certaines des personnes mentionnées dans les courriels ont répondu à nos demandes d'entrevue en disant qu'elles devaient d'abord consulter leurs avocats. D'autres ont répondu par des menaces de poursuites et des insultes personnelles. D'autres encore n'avaient rien à dire. Celles qui ont bien voulu commenter ont insisté sur le fait que les courriels ne révèlent rien de plus que des divergences de vue sans importance sur certains chiffres et des débats de procédure. Tous ces refus de répondre ont toutefois pour effet de souligner ce qui pourrait bien être l'aspect le plus révélateur de cette histoire: le fait que ces scientifiques considèrent que le public n'a pas le droit de savoir sur quoi ils se basent pour faire leurs prévisions sur les changements climatiques, même lorsque les gouvernements se préparent à adopter des lois qui entraîneront des coûts ahurissants en réponse à ces prévisions. Voyez par exemple ce message qui semble avoir été envoyé par M. Jones à M. Mann en mai 2008: « Mike, peux-tu effacer tous les courriels que tu aurais pu envoyer à Keith concernant AR4? Keith va faire de même. Peux-tu aussi écrire à Gene pour lui demander de faire la même chose? » AR4 est le terme diminutif pour désigner le Quatrième Rapport d'évaluation du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), présenté en 2007 comme un consensus sur l'état de la situation présumément devenue très critiques sur le plan des changements climatiques causés par l'homme. Dans un autre courriel qui aurait été envoyé en septembre 2007 à Eugene Wahl du Programme de paléoclimatologie de l'Agence nationale de recherche océanique et atmosphérique (National Oceanic and Atmospheric Administration) ainsi qu'à Caspar Ammann de la Division des dynamiques climatiques et planétaires du Centre national pour la recherche atmosphérique (National Center for Atmospheric Research's Climate and Global Dynamics Division), M. Jones écrivait: « Essaie de modifier la date de réception! Ne donne pas à ces sceptiques quelque chose avec lequel ils pourront s'amuser. » Lorsque les tentatives d'effacer, de falsifier ou de retenir de l'information ne suffisaient pas, M. Jones a suggéré une solution de rechange dans un courriel d'août 2008 à Gavin Schmidt de l'Institut Goddard pour les études spatiales de la NASA, également envoyé à M. Mann en Cc: « La réponse toute faite que nous utilisons tous sur la loi d'accès à l'information est celle-ci, écrit-il. Le GIEC est exempté de toute loi nationale d'accès à l'information – c'est ce qu'on a dit aux sceptiques. Même si nous... gardons possiblement des renseignements pertinents, le GIEC n'entre pas dans le cadre de nos attributions (déclaration de mission, objectifs, etc.) et nous n'avons donc aucune obligation de fournir les renseignements. » Il semble également que M. Mann et ses amis n'hésitaient pas à mettre sur une liste noire les scientifiques qui contestaient certaines de leurs affirmations, ou les revues qui publiaient leurs travaux. « Je pense que nous devons cesser de considérer Climate Research comme une revue légitime qui fait une révision par les pairs », lit-on dans un courriel apparemment rédigé par M. Mann et envoyé à plusieurs destinataires en mars 2003. « Il faudrait peut-être encourager nos collègues dans la communauté de la recherche sur le climat à ne plus soumettre des articles à cette revue, ni citer ceux qui y sont publiés. » Le principal reproche de M. Mann était que la revue en question avait publié plusieurs articles remettant en question certains aspects de la théorie du réchauffement planétaire anthropogénique. Pour la petite histoire, lorsque nous avons par le passé demandé à M. Mann ce qu'il pensait de l'accusation selon laquelle lui et ses collègues empêchent les points de vue opposés de s'exprimer, il nous a dit que « cette question n'est même pas digne d'une réponse ». Concernant nos plus récentes questions à propos des courriels piratés, il a dit qu'il n'a « d'aucune façon manipulé quelque donnée que ce soit », mais a refusé de répondre à des questions plus spécifiques. Précisons que notre objectif n'est pas de nier la probité du travail de M. Mann, et encore moins son droit de garder le silence. Nous disposons toutefois maintenant de centaines de messages qui donnent clairement l'impression que des climatologues renommés ont cherché de manière concertée et coordonnée à adapter les données pour qu'elles correspondent à leurs conclusions, tout en essayant de faire taire et de discréditer leurs critiques. Au palmarès des vérités qui dérangent [Note du trad.: le titre du film d'Al Gore est Une vérité qui dérange], celle-ci mérite sûrement que les médias, le Congrès américain et d'autres instances d'enquête s'y penchent plus sérieusement. ---------------------------------------------------------------------------------------------------- * Éditorial publié le 23 novembre dans le Wall Street Journal Europe sous le titre « Global Warming With the Lid Off ». Traduction de Martin Masse. |