Le Québécois Libre, 15 octobre 2010, No 282. Hyperlien: http://www.quebecoislibre.org/10/101015-4.html Sur le Blogue du QL, dans le fil de discussion d'un récent billet sur Mario Dumont, notre collègue blogueur David « Antagoniste » Gagnon écrivait, pour critiquer la position centriste floue de Dumont:
Un lecteur, R. B., a laissé cet autre commentaire critiquant le point de vue de David:
Je ne sais pas si David ironisait ou s'il est réellement d'accord avec cette façon de voir les choses, qui est effectivement largement répandue au sein du mouvement libertarien et à l'extérieur. Mais R. B. a raison. Cette description conventionnelle nous fait passer nécessairement pour des « progressistes » sur le plan moral qui se distinguent de la gauche uniquement par leur appui à un retrait de l'État des questions économiques. Cette description laisse également entendre que seule la droite défend des positions autoritaires et étatistes sur les questions morales et culturelles. Et que la droite est uniformément en faveur du libre marché. Ce qui est tout à fait faux. En fait, la gauche est aussi étatiste et anti-liberté individuelle sur le plan moral et social que ne peut l'être la droite, mais différemment. Sur la question de l'avortement par exemple, je ne vois pas comment un libertarien peut appuyer la perspective morale et juridique des gauchistes, qui est qu'il est tout à fait approprié non seulement d'avorter un embryon composé de quelques cellules qui n'a encore rien d'un individu, mais aussi de tuer un bébé à naître (c'est-à-dire un personne humaine avec une conscience qui devrait avoir des droits) quelques semaines avant sa naissance (j'ai écrit un texte en anglais récemment sur la question). De plus, les gauchistes considèrent que c'est l'État qui devrait payer pour ce meurtre qu'on qualifie de « procédure médicale ». Lorsqu'on parle d'homosexualité, la droite intolérante et réactionnaire voudrait maintenir en place des « sodomy laws » (invalidées par la Cour suprême il y a moins de dix ans seulement dans le « land of the free ») pour que l'État puisse officiellement persécuter les homosexuels. Mais la gauche souhaite quant à elle non seulement mettre fin à cette persécution, mais persécuter tout individu qui veut exercer une discrimination envers les homosexuels, ce qui ne cadre pas plus avec une position libertarienne (quelqu'un devrait pouvoir faire ce qu'il veut avec sa propre personne et sa propriété, y compris refuser d'avoir des relations d'affaire ou autre avec qui que ce soit). La droite souhaite maintenir la définition traditionnelle du mariage, par la force de la loi. Mais la gauche appuie non pas le point de vue libertarien qui serait un retrait de l'État des questions maritales (qui ne sont que des relations contractuelles entre individus) mais plutôt la réglementation du mariage homosexuel, qui permet à l'État de se mettre le nez dans les relations sexuelles et les questions personnelles financières et autres des gais. Les gauchistes sont non seulement en faveur de l'égalité des hommes et des femmes, mais ils ont lutté pour tous les privilèges légaux qu'on accorde aux femmes aujourd'hui (soi-disant « équité salariale », favoritisme dans l'embauche, favoritisme dans les jugements concernant les enfants, etc.). Les gauchistes sont non seulement opposés au racisme et à l'intolérance, ils défendent un racisme et une intolérance inversés en appuyant des politiques de multiculturalisme et d'immigration de masse qui constituent en réalité, dans un contexte d'État-providence comme le nôtre, une agression envers la population locale. Les gauchistes appuient non seulement la liberté de penser et d'exprimer ce qu'on veut (contrairement à la vieille droite réactionnaire religieuse avec son Index et sa persécution de toute culture non traditionnelle), mais ils veulent évidemment que leurs préférences culturelles soient subventionnées, reçoivent l'accolade officielle du pouvoir et soient imposées à tous. Les gauchistes veulent aussi nous imposer leur moralité « verte » et « solidaire » à la con avec toutes ses conséquences contrôlantes sur nos vies quotidiennes (qu'il s'agisse d'alimentation, de transport, de santé, etc.). Leurs positions sur des questions sociales ne sont pas simplement des positions de principe sans incidence sur l'économie, et qu'on peut donc distinguer de leurs positions sur les questions économiques; elles ont au contraire presque toujours une dimension économique et s'imposent par des politiques étatistes. Par ailleurs, on peut tout à fait être très conservateur ou traditionnaliste sur les questions culturelles et morales (donc, « à droite » selon le positionnement socioculturel conventionnel) tout en étant farouchement anti-étatiste et en refusant de recourir à l'État pour imposer ses valeurs, donc en étant libertarien. Bref, parler des libertariens comme étant « à droite » sur les questions économiques et « à gauche » sur les questions sociales est effectivement une description trompeuse qu'il faudrait abandonner pour éviter d'entretenir cette confusion. Comme je l'écrivais il y a quelques années,
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