Faut-il
en déduire que la voie est sans issue, et que les idées libérales n'ont aucun
avenir lorsque la population s'y oppose? La réponse est non. En effet, un
terrain d'entente peut tout à fait être trouvé, dès lors que dire que l'État
doit surveiller une activité d'intérêt général ne signifie pas nécessairement
qu'il lui faille l'exercer par lui-même, selon un mode de gestion administratif.
Il est toujours possible, pour l'État, de confier une activité d'intérêt général
exercée par lui à un opérateur économique privé, et cela sous son contrôle (pour
une introduction très concrète aux techniques d'externalisation dans le secteur
public, cf. A.T. Moore, G.F. Segal et J. McCormally, « Infrastructure
Outsourcing: Leveraging Concrete, Steel, and Asphalt with Public-Private
Partnerships », Reason Public Policy Institute, Policy Study no272, 2000).
À l'évidence, cette
méthode s'avère particulièrement adaptée aux personnes publiques souhaitant
intervenir dans le domaine économique. On peut en effet comparer l'élu local
avec le chef d'entreprise qui, après un examen rationnel de sa situation
financière, ferait le choix de sous-traiter une partie de sa production, afin de
se recentrer sur son coeur de métier. Or, la « raison d'être » des collectivités
territoriales est d'assurer des missions de police, c'est-à-dire de contrôler le
comportement des particuliers sur leur territoire. Il est donc souvent plus
judicieux, pour une autorité publique, de déléguer la gestion de certaines
missions à une entreprise privée, qu'il suffira de contrôler. Par ailleurs,
l'expérience démontre que l'externalisation est une solution à la fois
économique (en raison des économies d'échelle susceptibles d'être réalises) et
innovante.
Malheureusement,
différents lobbys s'opposent au développement de ces partenariats public/privé.
Aux États-Unis par exemple, le problème se pose au niveau fédéral: ainsi, le
Federal Activities Inventory Reform Act de 1998 oblige l'administration à
répertorier ses activités susceptibles d'être externalisées, mais les praticiens
savent tous que des débats interminables ont lieu quant à l'usage de la notion
« inherently governmental functions » qui, techniquement, empêche d'externaliser
certaines activités pourtant faciles à réaliser par le secteur privé.
On retrouve le même
problème en France, bien que celui-ci ne se situe pas au niveau des activités
susceptibles d'être externalisées, mais au niveau des méthodes à suivre.
Depuis le XIXe siècle, le
droit français – renforcé aujourd'hui par les exigences de l'Union européenne –
impose de sélectionner les opérateurs privés amenés à collaborer avec une
personne publique en l'obligeant à précéder la passation du contrat par une
phase de publicité et de mise en concurrence préalables. Cette obligation de
mise en concurrence est importante en ce qu'elle permet aux décideurs publics de
comparer plusieurs offres, tout en maintenant une pression concurrentielle
suffisante sur les entreprises appelées à intervenir sur le secteur. En effet,
les contrats publics sont souvent des contrats de longue durée (12 ans en
moyenne). La compétition pour le marché doit alors suppléer les carences
résultant du monopole ainsi constitué.
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