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La
cuisine française au patrimoine mondial de l’UNESCO (Version imprimée) |
par
Michel de Poncins*
Le Québécois Libre, 15 décembre
2010, No 284.
Hyperlien:
http://www.quebecoislibre.org/10/101215-5.html
Un fait stupéfiant est survenu le 16 novembre 2010: le classement par
l'UNESCO au patrimoine mondial du « repas gastronomique des Français »,
ce classement étant réalisé au titre du patrimoine culturel et
immatériel de l'humanité (sic).
Les autorités françaises ne se tiennent plus de joie car c'est la fin
d'un long processus. Pour arriver à leurs fins, elles ont déployé les
grands moyens. Une foule de démarches diplomatiques ont été entreprises
pendant quatre ans pour décrocher cette décoration de pacotille à grand
renfort de dépenses publiques – c'est-à-dire d'impôts qui ruinent les
restaurateurs, petits ou grands, ainsi que leurs clients. Une
« mission » spéciale fut créée avec à sa tête Jean-Robert Pitte, alors
président de la Sorbonne. Mais la ruine vient aussi de l'existence de ce
prétendu patrimoine mondial et de l'UNESCO elle-même, qui est un échelon
avancé du pouvoir totalitaire mondial en accroissement permanent.
C'est l'occasion d'analyser cette gigantesque arnaque internationale.
Comment et pourquoi patrimoine mondial?
L'origine remonte à 1972, date à laquelle l'ensemble des États ont donné
à l'UNESCO le droit exorbitant de classer des monuments dans un prétendu
patrimoine mondial. C'était une atteinte grave au droit de propriété
déjà très souvent réduit pour les monuments historiques par les
interventions abusives des États. L'avidité des « unescocrates » pour
l'extension rémunératrice de leurs pouvoirs voyait un champ illimité
s'ouvrir à eux.
Après les monuments, vinrent les sites comme les rivages de la Seine ou
le val de Loire et puis les « odeurs »: la fameuse place El Djamena à
Marrakech fut « distinguée » pour son atmosphère et ses odeurs – en
fait, il y a beaucoup d'odeurs d'essence aujourd'hui sur la fameuse
place! Et maintenant nous voici dans l'immatériel: le flamenco se met
sur les rangs avec bien d'autres.
Comme dans toute entreprise publique, le miroir aux alouettes est tendu
savamment aux futures victimes. Pour les monuments, il est facile de
séduire les élus locaux ardents comme toujours pour dépenser de l'argent
enlevé par la force à leurs concitoyens – il leur est facile de faire
célébrer par la presse subventionnée le supposé « honneur » que la ville
recevra et d'annoncer de mensongers bénéfices pour les habitants!
Pour bien montrer l’utilité du classement de la Loire, les
fonctionnaires viennent de planter tout au long du fleuve des panneaux
dénommés « girouets » (sic). Quant aux propriétaires privés de
monuments, il est facile de les allécher par la promesse de grasses
subventions.
Du côté des unescocrates, pas de problème pour exciter leur
enthousiasme. Quoi de plus « grand et délicieux » que de se donner d'une
façon illégitime le droit de juger d'un tel classement? De multiples
voyages dans de luxueux hôtels s'imposent pour apprécier de
visu la valeur de tel monument ou de tel site. Notons que, dès lors
qu'il s'agit de gastronomie, les fourchettes sont en état d'alerte
maximum. La régalade est générale au détriment de tous les affamés de la
planète, ceci par une suite de conséquences bien connues des
économistes.
La supposée goutte d’eau
La ruine vient inévitablement et d'abord par la richesse de l'UNESCO
dont le budget est en accroissement constant. Dans ce budget, les
salaires et avantages particuliers des 175 directeurs et 1000
consultants comptent pour une large part, comme dans tout dinosaure
international conscient de sa dignité. La richesse fait dégouliner les
impôts dans le monde entier. L'organisation, seule maîtresse de sa
communication, montrera facilement que les frais sont minimes par
rapport à la population mondiale – c'est le faux raisonnement de la
goutte d'eau utilisé sans arrêt par les prédateurs publics, qui omettent
de rappeler que des milliards de gouttes d'eau forment le torrent qui
engloutit la richesse générale.
Un collectif africain a écrit un memorandum à Federico Mayor,
directeur général de l'UNESCO:
Les structures de cette organisation papivore sont ankylosées et
garnies de personnel essentiellement carriériste au sens primaire de
la déontologie administrative. Les États se contentent de meubler et
de truffer les différents services de l'organisation d'éléments qui
n'ont d'autres qualifications que celle des liens de parenté qui les
attachent aux dirigeants ou ministres des gouvernements qui les
affectent.
L'organisation est, ainsi, gangrenée par une ignorance que nous
n'osons pas dire cancéreuse, mais pour correspondre à l'actualité
« sidéenne », parce que généralisée et paralysante, toute activité des
départements de l'organisation se confinant à la gestion administrative
et à la reproduction de vieux documents non actualisés, au rejet
systématique de tout document nouveau comportant des projets de
renouvellement ou d'enrichissement de la réflexion et de la pensée
créatrice...
S'agissant du prétendu patrimoine mondial, il s'ajoute dans les causes
de ruine le choix arbitraire des lieux, des odeurs ainsi que de
l'immatériel – pourquoi tel monument et pas tel autre? Pourquoi pas la
cuisine chinoise ou indienne?
La réglementation est particulièrement nocive. Derrière le classement se
cache une réduction grave du droit de propriété. En France, le logement
souffre épouvantablement de la règlementation ubuesque qui entoure le
permis de construire. Le classement des rives de la Seine et de bien
d'autres lieux ajoute une couche de délais et de servitudes propres qui
renchérissent le coût des logements.
Pour la cuisine française, il convient de s'interroger sur les futures
règlementations: le boeuf bourguignon et le gratin dauphinois seront-ils
soumis à des normes fixées pour l'éternité avec sanctions à l'appui?
D'autres perspectives ne sont guère encourageantes. La France s'est
engagée pour obtenir le classement à « une politique de promotion, de
sensibilisation, d'information et de transmission aux plus jeunes ainsi
qu'à nos descendants ». Il nous est promis une « cité de la
gastronomie » qui sera la source de fromages « succulents » dans tous
les sens du terme!
La dérive idéologique
Quand il s'agit de dinosaures internationaux dans la mouvance de l'ONU,
les dérives idéologiques ne sont jamais loin.
En 1984, les États-Unis avaient quitté l’UNESCO pour deux raisons;
d’abord la gestion était catastrophique avec une foule de malversations
à l’appui et en plus, l’UNESCO était un repère de marxistes et elle
l’est restée.
Pour se distraire et illustrer en même temps le propos sur la ruine,
voici un scoop. Quand les États-Unis partirent avec fracas, l’UNESCO
s’est retrouvée de ce fait avec un gros problème de budget – les
malheureux contribuables américains contribuant à hauteur de 22 % au
budget du monstre, il fallait à tout prix revoir les dépenses, d’autant
plus que la Grande-Bretagne et Singapour avaient suivi en 1985. Les 175
directeurs n'étaient pas capables de prendre les décisions d'économie
nécessaires sans partir d'urgence en séminaire lointain pour les
étudier. Où eut lieu le séminaire? À Taormines, ce lieu parfaitement
magique en Sicile d’où on voit les fumerolles de l’Etna sans risquer
d'avoir trop chaud.
La Grande-Bretagne a pour sa part réintégré l’organisation en 1997. Les
Américains sont revenus peu après sous le prétexte que depuis la chute
du Mur de Berlin, le marxisme n’était plus dangereux – ce qui est
évidemment faux. Quant aux malversations, il est des chances qu'elles
continuent de plus belle, car elles sont « monnaie courante » si l'on
peut dire dans ces organismes où les vrais contrôles n'existent pas.
Au titre des dérives idéologiques, l'UNESCO a innové d'une façon
terrifiante en rendant public le texte des « droits de l’animal »:
« Considérant que la vie est une, tous les êtres vivants ayant une
origine commune et s'étant différenciés au cours de l'évolution des
espèces. Considérant que tout être vivant possède des droits naturels et
que tout animal doté d'un système nerveux possède des droits
particuliers […] » Après avoir dit que l'espèce humaine n'est qu'une
espèce animale parmi les autres, elle termine en exigeant que « la
défense et la sauvegarde de l’animal aient des représentants au sein des
gouvernements et organismes ».
Autre dérive à signaler: le panthéisme. Un document de l'UNESCO de 1991
condamne « La tradition judéo chrétienne envers l'environnement... Les
judéo chrétiens ont soutenu que, selon la genèse, l'Homme est créé à
l'image de Dieu qui lui a ordonné d'assujettir la terre. La Genèse
confère manifestement à l'homme un droit venu de Dieu d'exploiter la
terre sans restrictions morales ». Le secrétaire général de l'ONU, à
l'époque Boutros Boutros-Ghali, avait fait, à la conférence de Rio,
l'apologie du panthéisme: « La nature est la demeure des divinités.
Celles-ci ont conféré à la forêt, au désert, à la montagne, une
personnalité, qui inspire le respect. La terre a une âme, la
ressusciter, telle est l'essence de Rio ». Après les animaux, voici la
forêt: pourquoi pas les druides?
Sortir de l'UNESCO?
Si la France en toute sagesse et logique sortait de l'UNESCO, les idiots
utiles du prétendu patrimoine mondial se déchaîneraient. Parmi eux, les
intérêts conjugués signalés plus haut feraient barrage; ils ne savent
pas qu'en fait les intéressés paient par leurs impôts bien plus que ce
qu'ils croient recevoir. Les prétentieux et les cuistres crieraient à
l'attentat contre la culture. Il faudrait leur rappeler que la culture
ne saurait être imposée par la force et qu'elle n'est valable que si
elle s'exerce dans la liberté qu'offre l'économie de marché.
Il est vrai que les unescocrates ne peuvent comprendre un tel
raisonnement. À force de se considérer comme des animaux, ils doivent
voir se rétrécir leurs capacités cognitives, ce qui ne les empêchent pas
de partager avec leurs frères jumeaux une voracité bien connue.
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Michel de
Poncins écrit les flashes du Tocqueville Magazine et
est l'auteur de quelques livres. |