Depuis la chute de l’ancien dictateur et de son clan, les voix et
les plumes d’innombrables intellectuels ont foisonné dans le débat public pour
essayer d’établir la conception d’un schéma ou d’un modèle propice à la Tunisie
tant sur le plan social qu’économique. Les modèles imaginés vont d’une forme de
conception marxiste et socialiste jusqu’au modèle de type libéral en passant par
ce qu’on peut qualifier de capitalisme islamique.
Dans un souci de clarté, je relaterai de manière très succincte les
différentes expériences économiques menées par la Tunisie avant de mettre en
exergue le choix qui me semble le plus pertinent du modèle à suivre par la
Tunisie afin de consolider ses acquis et sa position de pays émergent dynamique
en voie de converger vers le niveau des pays développés.
Le choix de la libéralisation |
L’expérience collectiviste durant les années 1960, conduite sous
l’égide d’Ahmed Ben Salah, a conduit le pays à une crise économique aigue, avec
des taux de croissance quasi insignifiants, due notamment au déficit abyssal des
entreprises publiques, à l’accélération du processus de collectivisation, en
particulier du secteur agricole qui a atteint un taux de 90 % en 1969, et à
l’expropriation des terres en possession étrangère, ce qui a conduit au gel de
l’aide financière française.
Ce n’est qu’à travers l’abandon du socialisme et la réorientation de
la politique publique vers l’économie de marché, la propriété privée et
l’ouverture à l’investissement privé, que la Tunisie a connu une expansion du
secteur privé et une croissance rapide de l’emploi manufacturier. Conséquence
directe: le pays a enregistré durant la décennie 1970 une croissance moyenne de
plus de 8 % par an. Malgré la crise économique qui a sévi durant les années
1980, liée notamment à la conjoncture internationale et la flambée du prix du
baril de pétrole, la Tunisie a fait le choix courageux de la libéralisation de
l’économie sans succomber à la tentation de la planification et en maintenant
loin le spectre de l’expérience catastrophique du socialisme dont la seule
conséquence était le déclin du pays.
L’insertion de la Tunisie dans l’économie mondiale à travers son
adhésion à l’Organisation mondiale du commerce (l’OMC) et un accord signé avec
l’Union européenne en 1995 a conduit à l’accroissement de la compétitivité des
entreprises tunisiennes et leur accès plus libre aux marchés internationaux,
grâce au démantèlement progressif des barrières douanières.
Ainsi, malgré la prolifération de la prédation et de l’économie
mafieuse, l’initiative privée dans son ensemble et la croyance en l’efficacité
du marché a permis à la Tunisie d’améliorer ses performances économiques, se
hissant à un degré d’insertion dans les échanges mondiaux parmi les plus élevés
du monde. Cela en a fait ipso facto, selon le Forum économique mondial
sur l’Afrique, tenu en juin 2007, la première économie compétitive d’Afrique,
devançant ainsi l’économie sud-africaine.
En se basant sur cette expérience historique, on constate que seules
les réformes économiques de type libérales sont de nature à consolider la
situation économique car qu’on le veuille ou non, seul le marché malgré ses
limites est pourvoyeur de richesses et par conséquent un vecteur de croissance
et de développement. Il suffit d’observer que seuls les pays qui ont choisi la
voie du repli et de l’autarcie se sont retrouvés sur le banc des pays les plus
en retard sur le plan économique, technologique et même démocratique. On peut
citer l’exemple de Cuba ou celui de la Corée du Nord dont la politique
économique d’inspiration marxiste voire stalinienne et antidémocratique n’a eu
comme conséquence que l’appauvrissement et l’asservissement de la population.
Enlever les obstacles qui restent |
Maintenant, si l’on met l’accent sur ce que devra accomplir la
politique économique tunisienne afin de s’affranchir de certains obstacles qui
freinent toujours son développement, on doit éviter de recourir aux vieilles
panacées qui ont montré leurs limites et s’orienter plutôt sur celles qui ont
fonctionné dans d’autres économies émergentes et sont susceptibles de faire
converger la Tunisie vers le niveau économique des pays développés.
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