Applaudie par plusieurs, peu réalisent que cette loi pourrait
entraîner des problèmes significatifs pour les consommateurs, des risques
importants pour les organisateurs d'événements et même un possible fardeau
additionnel pour les contribuables du Québec.
Le marché de la revente – un service essentiel |
Les revendeurs ont mauvaise presse puisqu'ils sont perçus comme des
intermédiaires inutiles qui se ruent sur les billets dès qu'ils sont mis en
vente et qui les revendent ensuite à un prix bien supérieur. Avant de croire
cela, il faut comprendre que la quantité de billets pour tout événement,
spectacles ou match sportif est limitée. Une demande de billets plus importante
créera donc, par effet de rareté, une augmentation des prix. C'est en prenant
avantage d'une mauvaise évaluation du marché par les organisateurs que les
revendeurs font leurs profits. Bref, tout ce qu'on voit, ce sont les
consommateurs qui paient davantage pour leurs billets – d'où l'indignation
contre les revendeurs.
Toutefois, un spectateur qui accepte de donner 200 $ à un
« scalpeur » en échange d'un billet estime que la valeur qu'il retire de ce
billet est égale ou supérieure à 200 $ et ce, même si le prix original du billet
était de 50 $. Imaginons maintenant que le scalpeur n'avait pas le droit
d'exercer son métier. On peut penser que le spectateur aurait épargné 150 $,
mais aurait-il vraiment réussi à obtenir le billet? À un prix plus bas, il y
aurait un plus grand nombre d'individus qui voudront en acquérir. Cependant, les
billets iront selon le principe du premier arrivé, premier servi. Ainsi, ceux
qui se seront présentés en premier à la billetterie obtiendront des billets même
si d'autres consommateurs valorisaient davantage ces billets.
En gros, si les organisateurs d'événements culturels et sportifs
sous-estiment le prix qu'ils peuvent exiger, les « scalpeurs » peuvent
intervenir en revendant les billets à ceux qui les désirent le plus ardemment.
Ils servent donc l'intérêt des consommateurs.
À titre d'illustration, on peut regarder le cas des États-Unis où
quelques États (dont celui de New York) ont libéralisé la revente de billets(1).
On a pu observer que les salles et arénas étaient plus souvent remplis grâce aux
revendeurs de billets utilisant des sites similaires à ceux qu'on chercher à
interdire au Québec. En effet, le nombre de spectateurs a augmenté de près de
40% dans certaines sections parce que ceux qui avaient obtenu des billets les
valorisaient véritablement.
Les revendeurs servent aussi l'intérêt des organisateurs
d'événements sportifs et culturels. Lorsqu'ils organisent des spectacles, matchs
ou représentations, ils doivent se concentrer sur des centaines de tâches pour
préparer leurs activités: logistique, liens avec l'artiste, publicité,
maintenance, administration, sécurité, etc. Cependant, les revendeurs n'ont
qu'une seule activité sur laquelle se concentrer: recueillir toute l'information
possible sur la demande de billets. Ils sont donc des « spécialistes de
l'information ». Si les organisateurs devaient aussi essayer d'évaluer le bon
prix à exiger pour maximiser leurs profits, ils leur faudrait déployer
énormément d'efforts, temps et ressources (en plus de toutes les autres tâches
qu'ils doivent réaliser) et ils assumeraient un risque de plus.
Pour les organisateurs, « trouver le bon prix » est plus risqué que
pour les revendeurs. Les revendeurs adaptent les prix en fonction de la demande
qu'ils observent, mais les organisateurs doivent le deviner et ont moins de
possibilités de corriger après coup. S'ils demandent un prix trop élevé, ils
seront incapables de remplir la salle et perdront de l'argent. En plus, ils
obtiendront des rentes moins grandes des restaurateurs et boutiquiers établis
dans leur enceinte puisque ceux-ci auront une clientèle plus restreinte. Ils
auront aussi des revenus de publicité plus faibles puisque ceux-ci sont
déterminés par le nombre de personnes qui observent les annonces publicitaires.
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