Malheureusement, comme toute chose qui fonctionne bien seule (ou presque),
l'État doit y étendre ses tentacules. Surtout depuis la Renaissance, il s'est
arrogé de plus en plus le contrôle du système monétaire et l'a complètement
corrompu. Les transformations progressives nous ont donné notre système
monétaire moderne: des monnaies fiduciaires flottant les unes par rapport aux
autres, une inflation galopante en temps de paix, un système de réserves
bancaires fractionnaires qui est, ni plus ni moins, que de la fraude légalisée
et, bien sûr, des libertés individuelles encore plus restreintes. Murray
Rothbard, célèbre économiste de l'École autrichienne, a dénoncé ce système il y
a près de 50 ans dans un essai, qui a été publié sous forme de livre en 1974,
sous le titre The Case
for a 100 percent Gold Dollar. J'ai eu le privilège de lire et de
traduire ce livre sous le titre Plaidoyer pour un dollar pleinement garanti
par l'or.
La thèse centrale de ce
livre – le contrôle gouvernemental du système monétaire est un gâchis pour
l'économie – est on ne peut plus d'actualité. En effet, la crise actuelle est
facilement attribuable à l'intervention du gouvernement dans le système
monétaire, notamment le « fort encouragement » qu'il a envoyé aux banques
à prêter à n'importe qui, la mise en commun des prêts consentis par ces « encouragements »,
le maintien de taux d'intérêts artificiellement bas par l’entremise de la Fed
(banque centrale des États-Unis), le Community Reinvestment Act,
renforcé sous Bill Clinton, etc. N'eût été de ces interventions, la crise
actuelle – prédite par les économistes autrichiens depuis déjà 2003(1)
– n'aurait probablement pas eu lieu.
La destruction lente et progressive du système
monétaire |
Dans
son excellent essai, Rothbard retrace les grandes étapes de la monopolisation
monétaire de l'État. Cela a commencé par le monopole de la frappe, sous prétexte
que les frappeurs de monnaie privés pourraient frauder leurs clients en mettant
moins d'or qu'ils ne le devraient dans les pièces. Chacun sait qu’il n’y a aucun
risque que l'État se prête à ce jeu frauduleux…! De plus, si l'on utilise ce
raisonnement, il faudrait abolir tous les contrats parce que quelques escrocs en
rédigent qui sont frauduleux ou ne les respectent tout simplement pas.
Le monopole de la frappe par l'État a créé, n'en déplaise aux opposants à la
frappe privée, ce qu'on appelle la loi de Gresham: les bonnes pièces de monnaie
sont amassées tandis que les moins bonnes (usées ou avec un défaut de
fabrication) demeurent en circulation. Cette loi s'applique quand une pièce de
monnaie a une valeur immuable; peu importe si elle pèse maintenant 25 grammes,
si la pièce dit qu'elle vaut 30 grammes d'or, alors elle vaut 30 grammes d'or.
C'est comme si un kilogramme équivalait soudainement à 750 grammes.
Ce monopole de frappe, et
l'immuabilité de la monnaie, a engendré le second problème: l'insistance sur le
nom de la monnaie et non sur sa masse. Pour ceux qui l'ignoraient, toutes les
monnaies nationales étaient, de prime abord, des unités de masses, au même type
que le mètre est une unité de mesure ou la seconde est une unité de temps. La
livre sterling en est sans doute le meilleur exemple, puisque l'unité de base de
la monnaie anglaise était justement ça: une livre de monnaie d'argent. Le dollar
des États-Unis, lui, était 1/20 d'once d'or (1,56 gramme). D'ailleurs, jusqu'au
milieu du XIXe siècle, des pièces de monnaies étrangères (en or ou en
argent) circulaient sans aucun problème aux États-Unis. Malheureusement, afin de
renforcer l'État central, Washington et les autres capitales occidentales ont
interdit les monnaies étrangères dans leur pays pour favoriser la monnaie
nationale, ce qui accordait encore plus d'importance au nom et non à la masse.
L'étape finale de la
perdition du système monétaire fut l'invention des banques centrales. Créées
pour supposément stabiliser le système financier, elles n'ont fait que le
contraire, comme en fait foi la Grande Dépression, causée par une décennie de
taux d'intérêt trop bas. Elles ont également encouragé cette fraude légalisée
nommée réserves fractionnaires.
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