Cet organisme devrait ensuite redistribuer les sommes recueillies, les pays pouvant garder une partie de leur récolte. Le
taux devrait résulter d'un compromis entre la volonté de stopper la
spéculation, de ne pas gêner les autres opérations et de rapporter des
recettes fiscales d'un certain montant. Pour la France, les recettes
d'une taxe au taux de 0,2% représenteraient la bagatelle de 68 milliards
de francs, de l'époque soit plus de huit fois l'impôt de solidarité sur
la fortune!
Elle serait, si elle était instituée, le seul impôt vraiment
international qui permettrait théoriquement de décourager la spéculation, de favoriser
le développement économique des pays et d'aider, par un système redistributif, les pays les plus pauvres.
Quelle est la nouveauté aujourd'hui qui justifie ce texte? C'est
l'intervention fracassante de la Commission européenne. Elle se produit par une prise de
position officielle du commissaire européen à la fiscalité, ce qui
introduit dans le tableau général des nuances nouvelles. D'abord,
pourquoi un tel commissaire? Parce que l'extension indéfinie de l'UE
oblige à multiplier le nombre de commissaires inutiles. Un commissaire à
la fiscalité ne peut que rêver d'impôts nouveaux, ce qui est le
contraire de toute action économique raisonnable et logique.
Pour justifier la taxe Tobin, il n'hésite pas à évoquer un prétendu
« vide fiscal », le secteur financier n'étant pas assez taxé (sic). En
plus, le but inavoué de tout organisme public est d'avoir « une taxe bien
à soi », gage d'action sans contrôle, ce qui serait le cas. La modestie
initiale du projet est mise en avant: au départ, 0,1% sur les actions et
obligations avec 0, 01% sur les produits dérivés. Cela rapporterait tout
de même 57 milliards d'euros à la France ‒ la ficelle est grosse car
« petit impôt devient toujours plus grand ». Le gaspillage est largement
ouvert: les États bénéficiaires pourraient faire des investissements
ciblés, autant dire des investissements publics. La présentation va
jusqu'à prétendre faciliter la croissance alors que le projet
assècherait les financements privés, unique gage de croissance.
En fait, la taxe Tobin est une très mauvaise idée. Lutter contre la
spéculation est aussi difficile que de construire un château de sable
pour lutter contre la marée. En outre, la spéculation et les
spéculateurs sont nécessaires pour lubrifier l'économie. Si, malgré bien
des réticences exprimées, la taxe était instituée, ce sont les paradis
fiscaux qui en profiteraient. L'enthousiasme des eurocrates reflète
seulement leur appétit insatiable pour le pouvoir et la richesse qui
s'ensuit.
Il faut, certes, aider les pauvres. Pour atteindre ce but, il faudrait
détaxer au maximum et non surtaxer.
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