Ces conditions sont basées sur les valeurs morales de Stallman et ne
prennent pas vraiment racine dans la philosophie libérale classique. En
effet, si un programmeur décide de fournir un logiciel sans le code
source, c’est son affaire ‒ un peu comme Coke qui vend des boissons
sans pour autant en donner la recette. Ceci étant dit, cette licence
était (et reste) un choix valable face aux incohérences véhiculées par
les contrats d’utilisation des logiciels propriétaires. De plus, le
conflit fondamental avec ce qui est économiquement rationnel,
c’est-à-dire permettre la copie, est résolu. D’autre part, le
libertarianisme ne promeut pas exclusivement les marchés traditionnels,
mais bien toute forme de coopération consensuelle. Finalement, ces
efforts auront encouragé la création d’autres types de contrats,
notamment les licences MIT et BSD, qui suggèrent des contraintes
différentes. Bref, l’embarras du choix!
Il est également important de mentionner que l’idée d’encourager les
programmeurs à partager leur code source a eu des impacts sur le
développement de nombreux logiciels. Depuis la première licence GPL, des
développeurs (souvent bénévoles) ont créé de nombreux projets avec
succès. Pensons notamment au navigateur Firefox, à l’outil de création
de blogue WordPress ou encore au gestionnaire de base de données MySQL.
Le projet libre ayant eu le plus de succès reste incontestablement
Linux, dont l’utilisation croit d’année en année. Linux est un kernel,
c’est-à-dire un programme responsable de gérer les relations entre les
composantes physiques de l’ordinateur. Par exemple, la majorité des
serveurs (les ordinateurs qui servent à héberger des sites Web)
utilisent Linux. Les superordinateurs utilisés pour la recherche de haut
niveau sont sur Linux. Android, le système d’exploitation des téléphones
intelligents de Google, est basé sur Linux.
Malgré une telle contribution à l'avancement technologique, le
gouvernement du Québec n’utilise à peu pas les logiciels libres. Pour
faire avancer le dossier, il aura fallu qu’un organisme à but non
lucratif (Savoir-faire Linux) poursuive la RRQ en justice pour
non-respect des règles d’octroi de contrat. En effet, puisque
l’organisme s’était procuré des systèmes informatiques Microsoft sans
procéder à un appel d’offre, l’achat de licence
fut jugé
illégal. Pourtant, ailleurs sur la planète, l’utilisation de Linux
devient de plus en plus courante, notamment au ministère américain de la
Défense, à la mairie de Munich ou encore au Parlement français.
Fait intéressant, le financement et l’implication des gouvernements
envers le logiciel libre restent anecdotiques. Dans le cas de Linux, la
majorité des améliorations proviennent surtout d’entreprises privées,
d’organismes à but non lucratif ou de bénévoles. Pour ce qui est des
entrées de fonds, on remarque que le gros de l’argent provient de dons
ou de contrats avec des entreprises privées; par exemple la fondation
Mozilla, dont 85% des revenus proviennent d’un contrat avec Google.
Comme quoi des projets communautaires peuvent exister sans support de
l’État!
Les libertariens devraient promouvoir les logiciels libres, puisqu’ils
sont un excellent exemple d’une collaboration volontaire sans vocation
de profit.
Comme
l’explique si bien Linus Torvalds (créateur de Linux), « I
do not see open source as some big goody-goody "let's all sing kumbaya
around the campfire and make the world a better place." No, open source
only really works if everybody is contributing for their own selfish
reasons. Now, those selfish reasons by no means need to be about
"financial reward," though. »
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