Comme on peut le constater, l’oignon est beaucoup plus sujet à de fortes
variations de prix que d’autres produits tel que le pétrole où le maïs.
Et comme par hasard, ces deux marchés ne sont pas protégés des
spéculateurs…
Une autre méthode qu’un État pourrait utiliser pour limiter la
spéculation est une taxe sur les transactions financières (mieux connue
sous le nom de Taxe Tobin). Cette façon de faire comporte de nombreux
problèmes que ses partisans ont tendance à oublier.
Premièrement, l’application de la
réglementation devra nécessairement être internationale, puisqu’il est
facile pour une bourse d’aller s’établir ailleurs pour contourner la
loi, surtout lorsqu’elle est informatisée. Par exemple, en 1983, la
Suède s’était dotée d’une taxe sur les transactions financières dont les
gains (évalués à SEK 1.5B) ne se sont pas vraiment matérialisés, puisque
la majorité des activités financières se sont déplacées vers Londres ou
Oslo. La taxe fut finalement abandonnée en 1991. De plus, une fois la
loi uniformément adoptée à l’échelle planétaire, il faut s’assurer
qu’aucun pays n’en déroge puisque le premier à le
faire risque de devenir un énorme centre financier.
Deuxièmement, une telle réglementation jette le bébé avec l’eau du bain,
puisqu’elle s’appliquera à plusieurs groupes autres que des
spéculateurs. Par exemple, des couvreurs de risques (dont l’objectif est
de réduire leur risque) seront également taxés. Les arbitragistes, qui
appliquent la loi d’un prix sur les marchés, paieront aussi cette taxe.
Des entreprises voulant émettre des actions pour se financer devront
également payer. Bref, vouloir taxer les transactions financières pour
freiner la spéculation prend pour hypothèses que tous les acteurs
spéculent, ce qui est faux.
Troisièmement, il y a de fortes chances que, lors d’une transaction, le
paiement de la taxe soit refilé à l’acteur le moins élastique,
c’est-à-dire dont la situation est la moins avantageuse.
La crise financière de 2008 aura montré les faiblesses de nos systèmes
financiers. Plusieurs aspects devraient évidemment changer, mais brandir le
mot « spéculation » comme un fantôme à exorciser ne changera rien. Cette
dernière est une facette de la vie qui touche toutes les industries et
serait excessivement complexe à réguler, surtout dans un contexte
financier. L’État n’est pas lui-même un spéculateur parfait capable de
prédire les erreurs des autres agents dans le futur; on ne peut donc pas
s’attendre à des miracles de sa part.
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