Francisco d'Anconia est un ami de John
Galt. C'est un provocateur doué d'une ironie
corrosive. Sa manière à lui de faire la grève, c'est de ruiner par tous
les moyens le système collectiviste et de ridiculiser les bureaucrates
arrogants et prétentieux. Il se rapproche de Dagny
Taggart pour l'aider à résister:
« Nos ennemis ont empoché l'argent qu'ils ne méritaient pas, mais
aussi les honneurs que nous méritions et que nous n'avons pas reçus.
Notre faute est là. Nous avons aidé l'humanité à survivre, mais nous
avons laissé les hommes nous mépriser. Nous avons encensé ceux qui
voulaient notre perte. Nous les avons laissé vouer un culte à
l'incompétence, à la violence, aux exploiteurs, aux parasites. En
acceptant d'être punis, non pour les fautes que nous aurions pu
commettre, mais pour nos qualités, nous avons trahi nos valeurs et
accrédité les leurs. Dagny, leur morale
est celle des preneurs d'otages. Notre amour de la vertu est pris en
otage. Ils savent que tu es capable de tout supporter pour
travailler et produire. Parce que tu sais que se réaliser est
l'idéal le plus élevé qui soit; parce que l'homme ne peut pas vivre
sans cela, et que cet amour de la vertu n'est autre que l'amour de
la vie. Ils savent que tu accepteras de porter n'importe quel
fardeau pour servir ton idéal. Dagny,
tes ennemis se servent de tes capacités, de ta générosité, de ta
résistance, pour te détruire. Ils n'ont qu'une seule prise sur toi:
ton inégalable droiture. Ils le savent. Pas toi! Ils ne craignent
qu'une chose: que tu t'en rendes compte. Tu dois comprendre comment
ils fonctionnent. Tu ne t'en libéreras qu'en ayant compris. Mais
quand tu auras compris, ta colère sera si violente que tu préféreras
faire sauter tous les rails du réseau plutôt que de laisser la
Taggart entre leurs mains. » (p. 623-624)
Dagny est attirée par l'industriel Henry Rearden
(Hank), l'un des rares hommes dont elle
admire le génie et l'engagement au service de ses propres idées.
Rearden possède l'entreprise sidérurgique la
plus importante des États-Unis, Rearden
Metal, une entreprise spécialisée dans les alliages de métaux. Rearden a
mis au point un alliage métallique nouveau, plus résistant que l'acier,
qui offre des perspectives technologiques extraordinaires. Pour Rearden,
l'innovation seule peut empêcher la société de sombrer dans le chaos.
Mais il est haï par tous les parasites qui veulent lui faire payer sa
réussite, en particulier les politiciens. Pourtant, Hank Rearden est un
industriel qui améliore la qualité de la vie de tous et mérite sa
récompense. Francisco d'Anconia s'adresse
également à Hank
Rearden en ces termes:
« Vous qui ne vous laissez pas
impressionner par les forces de la nature, vous n'avez de cesse, au
contraire, de la conquérir, pour la mettre au service de votre
bonheur et de votre confort, jusqu'où vous faites-vous exploiter par
les hommes? Vous qui savez, par votre travail, que seul celui qui
accumule les échecs mérite une sanction, pourquoi endurer tout cela?
Pourquoi? Ce ne sont pas vos défauts, mais vos plus grandes qualités
qui vous valent d'être attaqué. Ce ne sont pas vos échecs qui vous
valent d'être détesté, mais vos succès. On vous méprise pour ces
qualités qui sont les vôtres et dont vous tirez la plus grande
fierté. On vous a traité d'égoïste parce que vous avez le courage
d'agir selon votre jugement et d'en accepter toute la
responsabilité. On vous a accusé d'arrogance en raison de votre
indépendance d'esprit. On vous a taxé de cruauté parce que vous avez
témoigné d'une totale intégrité. On vous a qualifié votre conduite
d'antisociale parce que vous regardiez loin devant vous et que vous
vous aventuriez sur des routes inconnues. On vous dit sans pitié à
cause de l'énergie et de la discipline personnelle dont vous avez
fait preuve pour atteindre votre objectif. On vous a traité de
requin parce que vous avez la merveilleuse faculté de créer des
richesses. Vous qui avez toujours déployé une incroyable énergie, on
vous a traité de parasite. Vous qui avez créé l'abondance, là où,
auparavant, il n'y avait rien que déserts et famine, on vous a
traité de voleur. Vous qui avez procuré à tant d'individus de quoi
subsister, on vous a traité d'exploiteur. Vous, l'être le plus
droit, le plus pur, vous avez été méprisé comme un “vulgaire
matérialiste”. Leur avez-vous demandé: de quel droit? En vertu de
quelles règles, de quels critères? Non, vous avez tout enduré en
silence. Vous avez subi leurs lois sans même essayer de défendre vos
principes. Vous aviez ce qu'il fallait de droiture pour produire le
moindre clou, mais vous les avez laissés vous taxer d'immoral. » (p. 460-461)
Le roman, écrit avec un génie littéraire
unique, a suscité l'inspiration et la controverse depuis sa publication
en 1957. Quelle est sa pertinence pour nous aujourd'hui? Après la
révolte des « pigeons » et l'exil de Gérard Depardieu, la France
n'est-elle pas en train de devenir le pays de La Grève?
Début décembre, Depardieu déclarait: « Je pars parce que vous considérez
que le succès, la création, le talent, en fait, la différence, doivent
être sanctionnés. » Fin décembre, Bernard Tapie révélait que Montebourg
avec « tout l'appareil d'État » était prêt à favoriser la candidature de
son rival le groupe Rossel « en lui prêtant 50 millions d'euros ».
La France est dirigée par un président qui n'aime pas les riches. Un
président à l'image des Français... Récemment, un sondage LCI-Opinion
Way (29 novembre 2012) montrait que 59% des
Français étaient favorables à la nationalisation de Florange et, parmi
eux, 35% des électeurs de N. Sarkozy! En 2013, la réalité peut-elle
rejoindre la fiction? Voulons-nous vivre dans le monde de La
Grève?
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