La capitalisation au secours de la répartition |
Des faits nouveaux sont intervenus sur le front des retraites. La grande
parlotte nationale annoncée par le gouvernement est bien en route. Des promesses sont formulées. Tous les moyens seront mis sur la table pour
sauver la répartition; celle-ci est considérée comme le nec plus ultra
dans le domaine des retraites car elle est supposée reposer sur un
contrat entre les générations. S'ajoute la chimère de l'égalité.
Constatons que ce magma idéologique fut partagé par d'anciens
gouvernements ainsi que l'habitude des parlottes ne débouchant sur rien
de vraiment nouveau sinon des rapiéçages.
L'existence d'un prétendu contrat est un gros mensonge. Un contrat
implique une signature après négociation. Rien de tel ici. Il y eût, au
sortir de la guerre, une action de force étatique obligeant les salariés
à verser des cotisations dans des caisses spéciales, contre la promesse
de toucher un jour une pension; par la suite, le système fut étendu à
d'autres catégories que les salariés.
L'exécution de la promesse elle-même dépend du bon vouloir changeant des
gouvernements qui sont, pour leur part, soumis aux élections. S'ajoute
la floraison des régimes spéciaux dont le nombre et la complication sont
difficiles à cerner.
Vers un replâtrage
La répartition, contrairement à la capitalisation, est tributaire de
la démographie. De ce fait, le pouvoir n'a aucun mal à sonner la
trompette d'alarme pour un avenir relativement proche et chacun y va de
ses statistiques plus ou moins pessimistes.
Le pouvoir, alors, pianote sur tous les paramètres comme les précédents
gouvernements l'ont fait: durée de cotisation, impôts, âge de départ,
charges des entreprises, contribution sociale généralisée, etc. Chaque note de la gamme suscite des
hurlements. Les partenaires sociaux savent bien, toutefois, que le
système est à bout de souffle et qu'il faudra passer à la casserole. Le
seul espoir est, après la parlotte, de passer la patate chaude à
d'autres.
Dans ce paysage, il est une nouveauté, c'est la pénibilité que le
pouvoir veut prendre en compte. Il dénombre dix causes de pénibilité et
songe même à l'ouverture pour chacun d'un compte de pénibilité. Nous
voici avec la promesse de beaux contentieux car personne ne pourra fixer
juridiquement les degrés de pénibilité réels.
|
« La répartition, contrairement à la capitalisation, est tributaire de
la démographie. De ce fait, le pouvoir n'a aucun mal à sonner la
trompette d'alarme pour un avenir relativement proche et chacun y va de
ses statistiques plus ou moins pessimistes. » |
Au secours: la capitalisation
Un fait nouveau est récemment intervenu. Un journaliste des médias
officiels a osé poser à un syndicaliste, Jean-Claude Mailly, la question
dangereuse: la capitalisation ne pourrait-elle pas être envisagée au
moins à titre partiel? Le syndicaliste l'a balayé en disant: trop
tard.
Ce trop tard n'est pas vrai. La répartition détruit la richesse au fur
et à mesure qu'elle se crée puisque l'argent est distribué aussitôt que
récolté. La capitalisation crée la richesse par les investissements
auxquels se livrent les gestionnaires, soit directement, soit par des
fonds de pension. Il est évidemment nécessaire que les épargnes
contractuelles bénéficient du même statut fiscal et social que les
cotisations dans la répartition.
En refusant la capitalisation, nous arrivons à une situation aberrante:
les grandes entreprises du CAC 40 sont soumises au bon vouloir des fonds
de pension de Californie ou d'ailleurs.
Des expériences de passage à la capitalisation ont été menées dans
plusieurs pays. Celle du Chili est intéressante. Le passage reposait sur
le volontariat et fut largement suivi. L'influence bénéfique sur le PIB
fut telle que l'on put sans dommage payer les pensions de ceux qui
étaient restés dans le système ancien.
Un Aggiornamento nécessaire
Les syndicats détestent la capitalisation et adorent la répartition. Cela se comprend car le dernier système leur donne
perpétuellement du grain à moudre. Avec la capitalisation, ils
pourraient certes intervenir mais dans un esprit constructif, ce qui
n'est guère leur habitude. Le pouvoir actuel, ficelé par les syndicats,
va donc probablement passer à côté de sa chance.
Reste l'opposition. Elle pourrait reconnaître son erreur du passé et
annoncer la capitalisation en cas de retour aux affaires. Ce serait
l'Aggiornamento. Avec une communication adaptée, ce pourrait être un
argument électoral massif.
Y-a-il une opposition ou des fantômes? La question est posée.
|
|
Du même
auteur |
▪
Privatiser l'école
(no
313 – 15 août 2013)
▪
Lundi de Pentecôte: la jolie comédie
(no
312 – 15 juin 2013)
▪
Il ne faut pas réformer l'État
(no
311 – 15 mai 2013)
▪
Collectivités territoriales: la ruine
(no
310 – 15 avril 2013)
▪
Libérer les salaires
(no
309 – 15 mars 2013)
▪
Plus...
|
|
Première
représentation écrite du mot « liberté » en Mésopotamie,
environ 2300 av. J.-C. |
Le Québécois Libre
En faveur de la liberté individuelle, de l'économie de
marché et de la coopération volontaire depuis 1998.
|
|