La science moderne ne pouvait-elle naître que dans le cadre
de pensée monothéiste?* |
« Peu de faits historiques sont aussi difficilement contestables que
celui de la connexion entre la science et la technique modernes et la
religion, voire la théologie chrétiennes. » ‒Alexandre Kojève
Nombre d'auteurs(1) affirment
que la science moderne ‒ voire
plus généralement la rationalité moderne ‒ ne
pouvait apparaître que dans un contexte chrétien ou au moins
monothéiste, la poussée scientifique grecque ayant d'après eux abouti
à une impasse, dont seule la chrétienté aurait su la sortir, grâce à
ses valeurs propres.
Il est de fait que la science
grecque avait poussé ses derniers feux à la fin de la période
hellénistique, en particulier à Alexandrie avec Ptolémée (90-168),
Diophante (200/214-284/298), Hypatie (370-415).
Son grand réveil attendra la Renaissance. Rome avait manifesté peu
d'intérêt pour la science, et l'Église plus de méfiance que
d'enthousiasme car « la connaissance enfle,
mais l'amour vivifie » (Cor. 8, 1).
L'intérêt pour la philosophie était resté plus soutenu, à Rome d'abord à
travers les stoïciens (Sénèque, Épictète, Marc-Aurèle), puis avec les
Pères de l'Église à l'occasion du développement de la théologie
chrétienne. Lors de la christianisation forcée de l'Europe aux Vème et VIème
siècles, les évêques fermèrent les écoles grecques, mais la recherche
philosophique reprit avec vigueur avec la Renaissance du Moyen Âge(2).
La science en revanche resta bloquée, du fait tant de l'hostilité des
gardiens du dogme catholique que du manque de moyens de mesure du temps
et de l'absence d'outils mathématiques de calcul infinitésimal,
indispensables pour aborder l'étude du mouvement.
Au XVIème siècle, le progrès
technique avait mis à disposition des savants de nouveaux moyens
d'observation et les mathématiciens s'étaient attaqués au problème de
l'infini, réservé jusque-là par l'Église à Dieu. Enclenchée par l'afflux
en Italie de bibliothèques de textes originaux de l'Antiquité provoqué
par l'arrivée des Turcs à Constantinople, la Renaissance redécouvrit le
pluralisme des conceptions du monde de l'Antiquité, comme le platonisme,
l'atomisme, l'héliocentrisme. Copernic (1473-1553), Kepler (1571-1630)
et Galilée (1564-1642) s'autorisèrent, à leurs risques et périls, à
remettre en cause le système aristo-thomiste, devenu depuis la fin du
Moyen Âge la clef de voûte de tout l'édifice chrétien.
Attribuer l'émergence de la
science moderne au monothéisme, comme le font nos bons auteurs, résulte
d'abord d'une confusion entre les « conditions » de son émergence dans
l'Europe chrétienne, contingentes, et ses « causes », nécessaires. La
science moderne descend de la science grecque, la principale
contribution du christianisme ayant été, en tant que syncrétisme
judéo-grec, de ne pas avoir entièrement détruit l'héritage
grec(3),
d'avoir emprunté à la tradition philosophique grecque pour élaborer sa
théologie, d'avoir repris en charge l'éducation après la chute de
l'Empire romain, d'avoir au Moyen Âge permis la création des Universités
et autorisé un certain développement de la science, « pour la gloire de
dieu »(4) et
dans de strictes limites. Mais le christianisme s'est opposé au moteur
de la science, la curiosité, cette libido
sciendi comme
Saint Augustin désignait
cette vanité de l'homme à prétendre appréhender la vérité par sa seule
raison, héritée des Anciens.
Trouver des valeurs spécifiques
à la tradition monothéiste qui aient pu contribuer à la démarche
scientifique relève de la gageure et de l'apologie. Si des hommes ‒ formés
par l'Église car elle détenait le monopole de l'éducation ‒ se
sont tournés vers la science, c'est plus en étudiant Pythagore, Platon et
Aristote que Moïse, Jésus ou
Paul. Que la plupart des hommes de science jusqu'au XVIIIème siècle
aient été pieux n'implique pas qu'il fallait être pieux pour être
scientifique. Que la recherche scientifique puisse être considérée comme
une forme de spiritualité n'implique pas que celle-ci soit
nécessairement chrétienne ‒ Einstein,
proche de Spinoza mais non de Moïse, constitue un bon exemple à cet
égard. Si la notion d'infini peut être rapprochée de celle du divin, les
travaux des Grecs sur la question montrent qu'elle n'avait aucun besoin
du dieu d'Abraham.
La science moderne: expérimentale et mathématique
La science de Galilée, Newton et
Descartes est certes « nouvelle » par rapport à celle d'Archimède: plus
expérimentale, plus mathématique. Mais
on ne peut guère imaginer Copernic sans Aristarque de Samos, Newton sans
Archimède, Galilée, Kepler et
Newton sans Thalès, Euclide et
Ptolémée, ni d'ailleurs, plus près de nous, Einstein sans
Newton. À l'origine de cette lignée se situe la naissance, dans la Grèce
polythéiste, de la démarche rationnelle, tant scientifique que
philosophique de Thalès, de Pythagore, de Socrate et
d'Aristote ‒ sans
apport d'un quelconque monothéisme.
Comme le dit Bernard de
Chartres (vers 1130-1160): « Nous sommes comme des nains juchés sur des
épaules de géants. Nous voyons plus de choses et de plus éloignées que
n'en voyaient les anciens, non par la pénétration de notre propre vue ou
par l'élévation de notre taille, mais parce qu'ils nous soulèvent et
nous exhaussent de toute leur stature gigantesque ». Bien que soutenant
la thèse de l'origine chrétienne de la science, Michel Serres
reconnaîtra: « Les fondateurs de fait de la science moderne se disent
moins les héritiers de Copernic ou de Galilée qu'ils n'apprennent leur
métier dans l'oeuvre d'Archimède ».
Les tenants d'une
discontinuité, d'une « rupture épistémologique » entre la science de
l'Antiquité et la science moderne considèrent que la première était plus
contemplative, qualitative, spéculative, alors que la seconde serait
devenue plus expérimentale, mathématique, utilitariste, visant désormais
« l'allègement et l'amélioration de la condition des hommes ».
C'est pourtant depuis Euclide,
Aristote, Hippocrate, Archimède et Ptolémée que la science part de
l'expérience, des faits, du besoin humain immémorial de compréhension du
réel. Les Grecs n'étaient pas de purs spéculateurs, mais d'abord de
grands observateurs. Déjà Aristote affirmait ‒ contre
Platon il est vrai ‒ que
l'expérience seule témoigne de la réalité des êtres. Ératosthène (276-194) alla jusqu'à donner une approximation correcte de
la circonférence de la Terre. Une définition précise de la méthode
expérimentale fut développée par l'école des médecins empiriques, fondée
au IIIème siècle av. J.-C. par Philinos de Cos, et dont le représentant
le plus célèbre fut Ménodote de Nicomédie (fin du Ier siècle apr. J.-C./
première moitié du deuxième). Mais qui dit expérience dit mesure, or la
technologie grecque de la mesure restait embryonnaire.
La science « moderne » a beau
être dite expérimentale, l'expérience n'y est pas première mais seconde,
construite pour tester une hypothèse conçue a priori, de façon
« spéculative ». Si Colomb a découvert l'Amérique, c'est en testant le
chemin qu'il imaginait vers les Indes. Einstein a développé sa
relativité générale à partir d'expériences de pensée, et n'a pu la
tester expérimentalement que bien après. La science a toujours combiné
les deux approches, spéculative et observatrice. Les scientifiques ont
été plutôt l'un, plutôt l'autre, suivant les individus plutôt que
suivant les époques.
Quant à l'idée d'appliquer les
mathématiques à la physique, elle existe chez la plupart des Grecs, de
Pythagore à Archimède et Ptolémée, en passant par Platon. Prétendre
comme Alexandre Kojève et Michel Serres que la physique théorique « ne
pouvait être que chrétienne » semble ignorer Pythagore et Archimède, sans
parler de l'étrange logique des arguments déployés ‒ l'Incarnation,
la Transcendance.
Science et technique
La science moderne bénéficia ensuite des progrès réalisés dans les
techniques d'observation et de mesure ‒ par
exemple la fameuse lunette de Galilée ‒,
et dans les mathématiques. Ni l'une ni l'autre ne doivent a priori rien
à l'Église. Quelle est l'origine du progrès technique? Sans doute les
nouveaux besoins apparus au Moyen Âge avec l'essor démographique, le
développement de la production, l'urbanisation, l'imprimerie, les
échanges avec le monde arabe et l'Asie. Quant aux mathématiques, la
montée du commerce, de la finance, de l'industrie, a pu stimuler le
besoin de quantification, mais il y a loin de la règle de trois et des
intérêts composés à la question de l'infini!
Tant la soif de connaissance
que l'ingéniosité et les mathématiques furent d'ailleurs bien étrangères
à la tradition biblique, qu'il s'agisse d'Adam et Ève punis pour avoir
mangé de l'arbre de la connaissance, de
Saint Paul pour qui « la science enfle », de Tertullien affirmant: « Nous
n'avons pas besoin de curiosité après le Christ, ni de recherche après
les Évangiles », de la « sainte ignorance » que recommandaient tant de
Pères de l'Église et de papes, dont Pascal dira
de façon lapidaire: « Le Pape hait les savants qui ne lui sont pas soumis
par voeu ».
L'opposition entre science
antique « spéculative » et science moderne « utilitariste » ne
résulte-t-elle pas d'une confusion entre technique ‒ utilitaire
par vocation ‒ et
science ‒ curieuse
par vocation, utilitaire par accident? Le développement technologique et
le développement scientifique relèvent de deux attitudes psychologiques
bien différentes, l'esprit pratique pour l'un, la curiosité associée au
réductionnisme pour l'autre. Le premier est aussi vieux que l'humanité,
et resta marqué jusqu'à la Renaissance par l'avance de la Chine, le
second démarre vraiment avec « le miracle grec ». Jusqu'au XVIIIème siècle,
la technique ne doit pratiquement rien à la science; l'interaction de la
science avec la technique n'interviendra que plus tard, en Occident à
partir du XIXème siècle.
« La machine à vapeur n'est pas une merveille de la science, une
application de la thermodynamique, mais un avatar de la pompe à feu,
conçue pour l'assèchement des mines. C'est, au contraire, elle qui a
rendu possible la thermodynamique, apparue d'abord comme des "réflexions
sur la puissance motrice du feu" (Carnot, 1824). »
On sait qu'une invention technique ne s'impose que si la société civile
est prête à lui trouver une utilité, d'ailleurs souvent fort éloignée de
celle imaginée par son inventeur. Un nouveau concept scientifique en
revanche n'a besoin que de l'assentiment de la société scientifique,
qu'il obtient en général d'autant plus facilement qu'il vient résoudre
un problème sur lequel elle bute; il ne diffuse ensuite vers la société
civile qu'en fonction de l'intérêt qu'il éveille chez les philosophes.
L'avancée des sciences apparaît ainsi beaucoup moins directement
connectée avec les réalités économiques et sociales que celle des
techniques.
Les Évangiles et la volonté de transformer le monde
Certains voient l'origine de ces progrès dans l'espoir chrétien du
salut, qui aurait débouché sur une volonté de transformation du monde.
Le message évangélique s'intéresse pourtant plus au « royaume qui n'est
pas de ce monde », à l'au-delà, et recommande de prendre modèle sur les
oiseaux du ciel et les lys des champs qui ne tissent pas et ne
travaillent pas et dont les vêtements sont pourtant « plus beaux que ceux
du Roi Salomon ». (Mt 6, 24-34). Si un texte sacré a encouragé une
domination du monde, ce ne sont non pas les Évangiles, mais la Genèse ‒ « remplissez
la terre, et l'assujettissez; et dominez sur les poissons de la mer, sur
les oiseaux du ciel, et sur tout animal qui se meut sur la terre » (Gen
1, 28). Or les Hébreux n'ont brillé ni par la science ni par la
technique.
Pour d'autres, comme Alexandre
Kojève et Pierre Duhem, c'est le concept de l'Incarnation qui aurait
permis aux scientifiques d'abandonner la séparation aristotélicienne
entre le monde céleste, parfait, celui de l'astronomie et de la science,
et le monde « sublunaire », imparfait, chaotique. Ceux-là semblent oublier
dans leur zèle apologétique d'une part que c'est l'Église qui a érigé
Aristote en « vraie philosophe » et a combattu avec la plus farouche
énergie les anti-aristotéliciens (par exemple Copernic, Kepler et
Galilée). Ils oublient également que ni Thalès (ses quatre éléments eau,
air, feu, terre), ni Pythagore (pour qui le monde, en particulier la
musique, est gouverné par les nombres), ni Démocrite (l'atomistique), ni
Aristote (le principe de causalité, l'expérience, l'annonce du
nominalisme), ni Archimède (sa fameuse « poussée » et toute sa mécanique)
n'ont dédaigné les choses du monde sublunaire. Enfin, ils ignorent le
fait que le mythe de l'incarnation est présent dans de nombreuses
religions non chrétiennes, comme la religion égyptienne, l'hindouisme,
etc.
Marcel Gauchet exalte la
position de Kojève en voyant dans l'Incarnation le mythe fondateur de la
modernité: « il se résume dans le passage de l'Un ontologique à la
dualité ontologique […] L'Incarnation apporte le dispositif structurel à
partir duquel le hiatus entre l'ici-bas et l'au-delà va véritablement
pouvoir prendre consistance. » « L'introduction du dogme de l'Incarnation
au sein du monothéisme établit le salut personnel non pas comme mépris
et renonciation au monde mais comme transformation du monde, action sur
lui. » Jésus n'a-t-il pas plutôt annoncé la fin du monde que cherché à le
transformer, n'est-ce pas l'individu plutôt que le monde qu'il a cherché à
transformer, par « la loi du coeur »?
A contrario, les Romains
polythéistes furent de formidables ingénieurs, au point que nos villes
n'ont retrouvé qu'à la fin du Moyen Âge une qualité d'urbanisme
comparable à celle de la Rome antique. Jusqu'au XVIIIème siècle,
la Chine polythéiste surclassait l'Europe chrétienne en termes de
puissance et de niveau de vie. La révolution industrielle européenne
résulta de l'invention de la machine à vapeur (qui permit d'exploiter le
charbon comme nouvelle source d'énergie) et de l'accumulation
capitalistique: voir là, ou dans la découverte du calcul infinitésimal,
une influence chrétienne serait pour le moins hardi.
« Il fallait une foi
extraordinaire en la promesse du "fait à son image" pour concevoir sans
raison la mathématisation du monde… », ira jusqu'à proclamer Pierre
Chaunu. Étrange logique… Il poursuit: « C'est le plan de Dieu que Kepler
a passionnément cherché dans le mouvement des planètes ». Oui sans doute,
mais cette recherche d'ordre mystique rappelle furieusement la recherche
d'harmonie du cosmos des Grecs.
La science moderne, fille de la théologie scolastique?
C'est la thèse défendue par Pierre Duhem et bien d'autres. Rappelons
toutefois que la théologie, étude rationnelle du divin, descend de
Platon, que le mot scolastique vient du grec schole, dont découlera le
mot école, et enfin que la théologie scolastique se distingue de la
théologie médiévale par l'introduction d'Aristote: toutes notions qui
trouvent leur origine chez les philosophes grecs et non pas dans la
Bible.
Sans y voir de contradiction,
Pierre Duhem ajoute que « si la science moderne n'est pas née [de la
condamnation d'Etienne Tempier] en 1277, c'est la date où la naissance
des cosmologies modernes est devenue possible en milieu chrétien »! Voir
dans cette condamnation du rationalisme, du déterminisme, de l'idée de
lois de la nature le déclencheur de la science moderne est pour le moins
paradoxal. Condamnation qui du reste fut provisoire puisque révoquée
cinquante ans plus tard (1325), l'aristotélisme devenant pour plusieurs
siècles la doxa chrétienne.
Certes, la science moderne
remettra en cause bien des affirmations d'Aristote (distinction entre
mondes sublunaire et supralunaire, négation de l'infini, du vide, de
l'atomisme). Mais Aristote a posé les fondations de la science avec la
logique, le principe de causalité, l'observation de la nature, et c'est
l'essence même de la science de savoir se remettre en cause, comme plus
tard Einstein remettra en cause Newton. Remise en cause que refusera
toujours l'Église, qui s'opposera d'ailleurs à Galilée au nom notamment
d'Aristote.
Du thomisme au cartésianisme
S'il y eut rupture entre la science grecque et la science moderne, elle
réside, au niveau concret, dans l'émergence du réel par les nouveaux
moyens d'observation et, au niveau épistémologique, dans la transition,
au cours des XVI et XVIIème siècles, du « thomisme géocentrique » au
« cartésianisme héliocentrique », de l'aristotélisme à une conception plus
platonicienne du monde. Rappelons que Copernic, homme de la Renaissance,
avait lors de son séjour en Italie étudié tous les philosophes grecs, en
particulier Platon, pour qui le Soleil représente l'image du Bien, et
Aristarque de Samos, le premier à avoir émis l'hypothèse héliocentrique.
Cette « grande révolution »,
comparable au miracle grec, fut aussi l'époque d'une chasse aux
sorcières. Pour Jacques Le Goff, « la principale création du
christianisme à l'époque du long Moyen Âge [avait été] l'installation au
centre de l'imaginaire médiéval de Satan. Satan [était devenu] le chef
d'orchestre de la société féodale […] Ici-bas, Satan men[ait] le bal ».
Saint Thomas d'Aquin lui-même avait donné ses lettres de noblesse à la
démonologie avec son De
malo (Questions
disputées sur le mal, 1272).
Le meilleur médiateur de Satan étant la femme, la démonologie alimentait
la misogynie.
|
« Si la révolution
scientifique eut lieu en Europe, et non pas en Asie,
l'origine en revient, outre les contingences géographiques
et historiques, à une forma mentis occidentale et aux
deux expériences de “société autonome” de l'histoire de
l'humanité, le “miracle grec” et la Renaissance européenne. » |
L'épidémie de sorcellerie
satanique fut réellement lancée par la bulle papale Summis
desiderantes affectibus (1484) et
par le Malleus
Maleficarum (Marteau des Sorcières) (1486)
rédigé par deux inquisiteurs dominicains. Elle fut confirmée par les
Conciles de Trente (1545-1563) et de Bourges (1584), et alimentée par
Luther et Calvin. Des bûchers furent allumés aux quatre coins de
l'Europe durant deux siècles, voire trois en Europe de l'Est, faisant
entre 50 et 100 000 victimes, des femmes pour 80% d'entre elles.
Certains des plus grands esprits du temps contribuèrent à l'hystérie
collective, comme Jean Bodin (1529-1596), Robert Boyle (1627-1691)
ou Henry More (1613-1687). Montaigne, Érasme et
Descartes s'abstinrent
prudemment de prendre position. Les rares qui se risquèrent à dénoncer
la pratique de la torture furent eux-mêmes accusés d'hérésie et de
sorcellerie. Personne ne contesta l'existence de Satan et des sorcières,
assurée qu'elle était par la Bible ‒ la
parole de référence étant: « Tu ne laisseras pas vivre la magicienne »
(Ex. 22,17) ‒ et
par Thomas d'Aquin.
L'arrêt en quelques décennies
(fin du XVIIème siècle)
de cette flambée de sorcellerie coïncida avec l'irruption de nouvelles
réalités, avec le basculement au rationalisme cartésien, l'émergence de
l'opinion publique, l'ascendant de la nation sur le roi et de l'individu
sur le groupe. Les causes tant de la crise de sorcellerie que de sa fin
et de la concomitance avec l'installation du rationalisme restent
l'objet de bien des conjectures. La lutte contre Satan fut sans doute
exaltée par la compétition entre Réforme et Contre-Réforme, catholiques
et protestants.
Le mouvement a-t-il démarré
parce que l'amélioration des conditions sanitaires d'accouchement avait
produit une explosion démographique de la catégorie des vieilles femmes
‒ les
femmes jusque-là mouraient en moyenne plus jeunes que les hommes ‒,
et s'est-il arrêté lorsque son emballement le conduisit à frapper non
seulement des vieilles femmes et des marginaux, mais aussi des notables
mâles? De nombreux auteurs pointent la montée de la bourgeoisie et du
capitalisme, mais ce dernier avait pris son essor dès le Moyen Âge, dans
les villes-républiques médiévales autonomes. Certains avancent que le
cartésianisme a pu être considéré comme le protecteur de la chrétienté
contre l'immanentisme platonicien de la Renaissance: son dualisme
préservait la transcendance de l'esprit sur la matière, son rationalisme
sauvait l'ordre social.
Quoi qu'il en soit, l'Église
s'illustra surtout par son rôle moteur (avec Luther et Calvin) dans
l'épidémie de sorcellerie et dans la chasse aux sorcières, par la
condamnation de Galilée, par la mise à l'Index de Descartes (comme
d'ailleurs de la quasi-totalité des philosophes). Rappelons que
Descartes développa sa philosophie en réaction au procès de Galilée
(1633), et que celle-ci fut réputée menacer de « dissoudre la Révélation
dans le doute universel ».
Si l'Église a contribué à la
structuration de la société européenne, c'est plus par ses institutions,
par la concurrence avec les pouvoir temporels, par la transmission de
l'héritage intellectuel grec et latin, par le processus de
sécularisation, que par les valeurs spécifiquement monothéistes, telles
que la vérité révélée, le dieu créateur, le péché originel, le salut. Le
christianisme a sans doute participé à la montée de l'individualisme,
mais « la preuve de la continuité n'est plus à faire, qui fait du dernier
chapitre de la culture grecque le prologue de la culture latine
médiévale » (Maria Dakari).
Le dieu biblique est‑il rationnel?
De tous les arguments qui militent pour la thèse d'une filiation
chrétienne de la science, le plus populaire réside dans la conviction
que le dieu monothéiste, créateur transcendant installant une conception
linéaire du temps, a posé les conditions de la rationalité
indispensables à la science, « une autonomisation du monde par rapport au
divin ». Moïse aurait
substitué la rationalité à l'irrationalité des mythologies polythéistes.
Joseph Ratzinger va jusqu'à dire qu'avec le christianisme « le dieu de la
rationalité est lui-même entré dans la religion »!
C'est d'abord oublier que c'est
bien du monde polythéiste qu'a émergé, aux Vème et
IVème siècles av.
J.-C., la démarche rationnelle et positive. C'est oublier que le moteur du
« miracle grec », la liberté de pensée, fut combattue par l'Église ‒ confinée
à l'intérieur des abbayes, encadrée dans les universités, contrôlée par
la Compagnie de Jésus, sanctionnée comme hérétique. C'est oublier que ce
sont les Grecs qui inventèrent la théologie rationnelle. « Les religions
antiques [ne sont] ni moins riches spirituellement ni moins complexes et
organisées intellectuellement que celles d'aujourd'hui. »
Ensuite, le dieu biblique
est-il vraiment rationnel? Qualifier de rationnel un dieu dont « les
voies sont impénétrables » et le mystère insondable est bien étrange:
« Que ses jugements sont insondables et que ses voies sont
incompréhensibles! », s'écrie ainsi Saint Paul.
Enfin, l'oeuvre du dieu
biblique se manifeste plus par des « créatures » qui doivent tout à leur
Créateur qu'à une « nature » qui n'obéirait qu'à ses propres lois,
fussent-elles d'origine divine. L'origine de la notion de « lois de la
nature » est grecque, la conception thomiste se l'est réappropriée, mais
l'attribuer au monothéisme relève de la captation d'héritage.
La transcendance
La transcendance abrahamique désenchante le monde. Ce désenchantement
aurait été nécessaire à l'éclosion d'une démarche rationnelle, positive,
tel est l'argument le plus couramment utilisé par les défenseurs de
l'origine chrétienne de la rationalité et de la science modernes. Quelle
étonnante négation de l'origine grecque de la rationalité et de la
science! À l'inverse dans le monde judéo-chrétien, pourquoi a-t-il fallu
attendre deux millénaires pour que cette fameuse transcendance, en
principe présente dès le judaïsme, produise ses effets aussi
tardivement?
Condamnation de la magie
Le monothéisme condamne la magie. Encore une fois, il n'était ni
nécessaire ni suffisant de désenchanter le monde pour faire de la
science: ni les Grecs, inventeurs de la science, ni Newton, ni
Einstein n'ont voulu
éradiquer du monde sensible ni les divinités, ni l'alchimie ‒ nos
plus grands savants jusqu'à Newton voire
au-delà consacrèrent plus de temps à l'alchimie qu'à la chimie, et
butèrent sur la question « comment concilier une conception mécaniste de
la nature avec l'intervention de forces spirituelles? » À l'inverse les
Hébreux, pourtant considérés comme si rationnels par nos bons auteurs,
n'ont produit aucune science (le monde juif ne participera à la science
qu'à partir de son « émancipation » au XIXème siècle,
et certes alors avec quel succès!). Nos Papes du
Moyen Âge et de la Renaissance faisaient un usage officiel de
l'astrologie, et excommuniaient ceux qui mettaient en doute la
sorcellerie. À l'inverse, les Romains au temps de Cicéron (Ier siècle
av. J.-C.) rangeaient la magie dans la superstitio, qu'ils
opposaient à la religio officielle.
Le monothéisme ne condamne
d'ailleurs pas la magie au nom de la rationalité, mais de la
condamnation de l'idolâtrie, c'est-à-dire de sa prétention au monopole
sur les miracles. La Bible est-elle un texte déterministe, présentant
une vision du monde dirigée par des relations de causalité? Il paraît
bien difficile, voire blasphématoire, notamment par rapport à la
Providence et à la Grâce divines, de répondre par l'affirmative. Si une
culture a cherché à s'émanciper de la magie et de la mythologie, c'est
bien la grecque, par la philosophie.
Interdiction de prononcer le nom de Dieu, aniconisme
L'interdiction de prononcer le nom de Dieu exprimait une crainte, une
mise à distance de Dieu ‒ deux
attitudes qui ne sont pas spécifiques au monothéisme mais à la base de
toute religion théiste ‒,
amplifiées par une survalorisation de la parole sur un mode magique:
nommer une chose, c'était prendre du pouvoir sur elle. Freud lui-même
expliquait que: « Au commencement des temps, les mots et la magie étaient
une seule et même chose. » Une telle conception du pouvoir des mots
prévalait chez les Égyptiens, voire chez la plupart des peuples
primitifs; de nombreuses traditions attribuent à la parole « une faculté
de médiation sacrée ». Les
religions du Livre n'ont-elles pas opéré un transfert de cette
survalorisation magique de la parole sur la sacralisation des textes?
On rattache souvent cette
interdiction de nommer Dieu à une conception apophatique du divin, mais
il s'agit là d'une interprétation moderne, philosophique, bien éloignée
du monde hébraïque de l'époque biblique, fort concret. On retrouve en
outre une telle conception dans le taoïsme.
En interdisant de faire des
« images taillées », le Décalogue proclamerait la supériorité de
l'invisible sur le visible, de la parole sur la vision, du logos sur
le mythos, de l'esprit
sur les sens. Les images, le sensible, se voient ainsi dévalués au rang
de réalité seconde, mensongère, idolâtre, tandis que le refus des images
ouvrirait l'accès au règne de l'esprit, au monde des concepts. Mais l'aniconisme existait
dans tout le Proche-Orient antique (avant 1400 av. J.-C.), chez les Perses,
les premiers Romains, les Germains, l'Inde védique, de nombreux peuples
en Afrique. Le monde des concepts, de l'abstraction, est par excellence
le monde grec, qui ne mit pourtant d'interdit ni sur l'image ni sur le
sensible, et porta à des sommets l'architecture, la sculpture, la
poterie.
Les Hébreux ne se privaient
d'ailleurs du concret ni dans les symboles ni dans le rituel: ainsi le
Saint des Saints, la pièce la plus sacrée du Temple, était nommée « la
maison de Dieu », le principal rituel restait le sacrifice, nombre
d'interdits frappaient les pratiques alimentaires, sans parler de la
circoncision, inscription jusque dans la chair de l'appartenance au
judaïsme. Le dieu personnel et jaloux des Hébreux apparaît bien
anthropomorphique par rapport au Démiurge de Platon, au Premier Moteur
d'Aristote, à l'Un des néo-platoniciens. En matière d'abstraction, le
bouddhisme n'a certainement rien à envier au monothéisme!
Qui furent les plus rationnels, les Prophètes hébreux
monothéistes, ou les philosophes polythéistes grecs? Le dieu de Moïse et
de Jésus, ou celui de Platon?
Dieu créateur, temps linéaire, invention de la nature
Le développement scientifique impliquerait un dieu créateur, une origine
du monde, un temps linéaire, une vision finaliste de l'histoire, un
homme doté d'un statut radicalement différent de celui du reste de la
nature, conceptions qui caractérisent la Genèse et qui contrastent avec
celles du monde polythéiste éternel ou cyclique, habité des dieux,
plongé dans l'immanence, dont la seule « finalité » était l'harmonie
immanente du cosmos: « la raison humaine conduit à l'unité » (Saint.
Augustin).
Ces arguments relèvent d'une
illusion prélogique, alchimique pourrait-on dire. Confondre unicité et
rationalité n'est qu'une paresse de l'esprit, qui préfère la simplicité
à la complexité, le linéaire au non-linéaire. Le fait de poser une
origine, comme le fait la Bible, n'est pas en soi plus rationnel que de
supposer l'univers ou le temps infini. Le Jésuite Paul Valadier lui-même
concède: « Le problème des origines est extérieur à la requête du
croyant… La notion de Création ne renvoie pas à un moment particulier, à
un événement précis, bien localisé. C'est une notion qui signifie avant
tout que Dieu a une relation voulue et aimante avec les hommes. » Et ce
n'est pas un scénario comme celui du Big Bang qui
sera de nature à trancher la question. Le temps dit cyclique des Grecs
est en outre plus à voir comme une spirale que comme un cercle fermé sur
lui-même. Les Chinois avaient eux aussi développé une conception
linéaire du temps. Les textes sacrés abrahamiques confondent le temps de
l'histoire et le temps du mythe, ce qui peut difficilement être
considéré comme un gage de rationalité.
La science exclut de son champ
toute conception finaliste, comme l'illustre encore aujourd'hui
l'opposition entre darwinistes et créationnistes. Le remplacement de la
finalité par la causalité d'une part, « l'invention de la nature » d'autre
part furent précisément à la base du miracle grec. L'idée même
d'invariant ‒ les
lois en général, et plus particulièrement les lois de conservation (le
« rien ne se perd, rien ne se crée » de Lavoisier) ‒ correspondait
à la conception grecque d'un univers éternel mais s'opposait à l'idée
biblique de la Création.
Les exégètes de leur côté ont
fini par admettre que « le discours sur la création a en vue un discours
sur Dieu, sur l'homme et non sur un discours sur le réel de la création
(sur le « commencement ») à jamais inconnaissable. »
Ethos de confiance
D'autres soutiennent que l'épanouissement de la civilisation occidentale
serait dû à « l'éthos de confiance » qu'installe la foi monothéiste, voire
pour Max Weber à l'ascétisme
du protestantisme, ou encore pour d'autres au sens du travail de la
Bible. N'est-ce pas une fois de plus confondre le spirituel et le
temporel? Le protestantisme était sans doute plus compatible avec les
intérêts et aspirations économiques des entrepreneurs, comme semble en
attester le développement relatif de l'Europe protestante, mais il n'en
était pas la cause première: si le capitalisme s'est épanoui avec la
révolution industrielle, ses racines, fort peu religieuses, s'inscrivent
dans une longue maturation tout au long du Moyen Âge, fort catholique.
Quant au « sens du travail dans la Bible », faut-il aller le chercher dans
la Genèse, où il est présenté plutôt comme châtiment pour avoir mangé le
fruit défendu, ou dans la parabole si énigmatique des talents? « Les
philosophes du XVIIIème siècle
doivent beaucoup aux cités, aux universités, aux sociétés calvinistes.
Je ne vois pas encore ce qu'elles doivent à l'Église calviniste et aux
idées de Calvin. » Si après la Contre-Réforme la science et la
philosophie se développèrent mieux dans l'Europe protestante (avec
Érasme (~1466-1536), Kepler,
(1571-1630), Spinoza (1632-1677),
Newton (1643-1727), Leibniz
(1646-1716), etc.) que dans la catholique, ce n'est pas en raison d'une
plus grande compatibilité avec l'orthodoxie protestante, mais simplement
du fait que « l'Internationale calviniste [n'était autre que celle] des
cités libres d'Europe qui avaient survécu. »
Pourquoi la science s'est-elle développée en Occident?
La science moderne s'est développée en Europe et non pas en Chine, en
Inde ou en Afrique. En attribuer la responsabilité au christianisme, en
tant que système de valeurs, relève cependant d'une triple erreur:
-
d'une part réduire la
science grecque à un pur exercice spéculatif sans lendemain revient
à ignorer que les Grecs ont posé les principes essentiels de la
démarche scientifique que sont la causalité, la nature et ses lois,
la démonstration;
-
des facteurs purement
historiques voire géographiques ont ensuite joué: la fragmentation
du relief européen, le polycentrisme linguistique et décisionnel, la
rivalité entre un pouvoir temporel fragmenté et le pouvoir
centralisé de l'Église, mais aussi, une fois les invasions barbares
définitivement arrêtées, la reprise démographique, économique urbaine
et la relative stabilité des États et des dynasties(5),
ont favorisé le pluralisme et la diversité si caractéristiques de
l'Europe de Florence, de la Réforme, par
rapport à la Chine, à Rome, à la Contre-Réforme;
-
enfin, la tendance au
réductionnisme et à l'individualisme relèvent d'une attitude
mentale typiquement « occidentale », opposée à la forma mentis
orientale plus holistique
et interdépendante(6);
Athènes et Jérusalem la développeront chacune avec ses spécificités
propres.
Conclusion
Né au sein de la Diaspora hellénisée, le christianisme se développa
comme religion importée à l'intérieur d'un territoire déjà doté d'une
culture ouverte, la civilisation gréco-romaine.
S'il y a une spécificité
occidentale dont les Grecs ont été les hérauts les plus créatifs et
contre laquelle les hommes du clergé chrétien ou musulman se sont si
souvent élevés, c'est bien la curiosité, la recherche de connaissance
pour elle-même. Adam et Ève seront au contraire chassés du Paradis et à
condamner à travailler à la sueur de leur front pour avoir goûté à
l'arbre de la connaissance. Malgré la préférence hébraïque pour l'acquis
de la vérité plutôt que pour sa quête, malgré les Saint Paul, Saint
Bernard et Saint Antoine,
nombre de membres du clergé conservèrent la flamme de curiosité grecque:
la curiosité pour l'étranger,
pour des vérités autres que la sienne propre,
l'esprit de recherche et d'innovation, cette libido
sciendi, ce vice
(Tertullien), ce « premier degré d'orgueil », cette « maladie de l'âme »
(Saint Bernard), cette « concupiscence » (Bossuet), s'est maintenue tout
au long de l'ère chrétienne grâce aux Boèce, Scot Erigène, Nicolas de
Cues, etc.
Si la révolution scientifique
eut lieu en Europe, et non pas en Asie ‒ malgré
l'avance technique que la Chine eut, jusque très tardivement, sur le
reste du monde ‒,
l'origine en revient, outre les contingences géographiques et
historiques, à une forma mentis occidentale ‒ une
curiosité soutenue par une préférence pour le réductionnisme, l'analyse,
la permanence ‒,
et aux deux expériences de « société autonome » de l'histoire de
l'humanité, le « miracle grec » et la Renaissance européenne.
Le christianisme n'eut aucune part à la première, et ne joua dans la
seconde qu'un rôle indirect.
Aucun peuple, ni les Chinois,
ni les Indiens, ni les Arabes (sauf à leur âge d'or), sans parler des
Hébreux bibliques, n'ont sans doute autant traduit de textes étrangers
que les Européens: manière d'échapper à l'exclusivisme abrahamique?
|
1. Par exemple: Pierre Duhem (1861-1916), Maurice Blondel (1861-1949),
Alfred North Whitehead (1861-1947), Joseph Needham (1900-1995),
Alexandre Kojève (1902-1968), auteur du très explicite L'origine
chrétienne de la science moderne, R. Hooykaas (1906-1994), Edmond
Ortigues (1919-2005), Ilya Prigogine (1917-2003), Louis Bouyer
(1913-2004), Stanley Jaki (1924-2009), Pierre Chaunu (1923-2009), René
Girard (1923-), Claude Tresmontant (1925-1997), Peter E. Hodgson (1928-
2008), Rodney Stark (1934-), Edward O. Wilson (1929- ), Camille Tarot
(1943-), Paul Davies (1946-). Damien Theiller défend la même thèse dans
son article « Pourquoi
la science moderne est-elle née en Occident? ». De façon plus
générale, pour Descartes, Hegel, Max Weber, Freud, Braudel, Marcel
Gauchet, c'est la rationalité occidentale qui serait d'origine
chrétienne.
2. Pour Robert I. Moore, (La Première Révolution Européenne? X-XIIIème
Siècle, 2001), la Renaissance du Moyen Âge est d'abord l'émergence d'une
civilisation urbaine, à partir du IXe siècle et jusqu'au XIIe.
3. « The extent of the destruction of Hellenistic works has often been
underestimated in the past, on the optimistic theory that the surviving
works would be the best [...] fact the best works could not be saved,
thanks to an automatic mechanism of natural selection during a general
regression of the level of civilization. » Lucio Russo, The Forgotten
Revolution: How Science Was Born in 300 BC and Why It Had to Be Reborn.
D'après Mott Greene, « we have access to only 1-2% of these ancient texts
for which we know the titles, the rest being lost. » Mott Greene, « The birth of modern science? Review of
The Forgotten Revolution », Nature 430
(5 August 2004).
4. Cf. For the Glory of God: The Role of Christianity in the Rise and
Development of Modern Science, Richard H. Jones, University Press of
America,2011-2012.
5. Cf. note 2 et David Cosandey: Le Secret de l'Occident, vers une
théorie générale du progrès scientifique, Flammarion, Paris, 2008.
6. Cf. Richard Nisbett: The Geography of Thought: How Asians and
Westerners Think Differently...and Why, Free Press, 2003. |
|
Polytechnicien, ingénieur au Corps des Mines, vice-président du
Cercle Ernest Renan à Paris,
d'éducation protestante, ayant mené une carrière industrielle,
Jean-Pierre Castel travaille à titre personnel sur la violence
monothéiste. Il a publié en 2010 un premier essai, Le déni de la
violence monothéiste, chez L'Harmattan, et travaille à un nouvel
essai, Détruire les dieux d'autrui : l'exception abrahamique,
dont le texte ici présenté est un extrait. |
*Cet article est une version écourtée et adaptée d'un article publié
dans Les Cahiers du Cercle Renan, n°263, Juillet-Septembre 2013.
Il se veut une réplique à l'article de Damien Theillier, « Pourquoi
la science moderne est-elle née en Occident? », paru le dans le QL,
no 301. |
|
Première
représentation écrite du mot « liberté » en Mésopotamie,
environ 2300 av. J.-C. |
Le Québécois Libre
En faveur de la liberté individuelle, de l'économie de
marché et de la coopération volontaire depuis 1998.
|
|