Pourquoi choisir la liberté économique |
Alors que la liberté d’expression et plus généralement les
libertés civiles sont plébiscitées par les Français, le
libéralisme économique, quant à lui, continue de susciter la
suspicion voire le rejet chez la plupart des gens, y compris
à droite. Ce terme est, en effet, connecté à des questions
difficiles comme la mondialisation, le profit, les
délocalisations, la loi du plus fort, etc., et génère des
sentiments négatifs comme la peur ou l’envie.
Du
coup, pour pallier aux défauts d’un libéralisme « débridé »,
l’État apparaît comme le moyen d’en soigner les maux. Mais
la régulation étatique présente un défaut majeur par rapport
au libéralisme : elle est beaucoup moins réaliste. La
philosophie libérale ne promet pas une société parfaite et
ne prétend pas offrir des réponses idéales aux défis qui se
posent à nous. Au contraire, partant de l’observation que
nous ne sommes ni omniscients ni forcément vertueux, les
solutions libérales offrent simplement davantage de
flexibilité et de garde-fous. Cela permet de construire des
sociétés qui, sans être parfaites, peuvent prospérer.
Évidemment, cela peut paraître moins attrayant d’offrir des
solutions raisonnables et flexibles que d’offrir des
solutions supposées idéales et parfaites. Là est une
première impression dont il faut impérativement se libérer
car comme nous le disent nombre de psychologues, c’est le
moyen le plus sûr de créer son propre malheur voire de
tomber en dépression. On peut d’ailleurs se demander si la
forte consommation d’antidépresseurs en France n’est pas
d’une façon ou d’une autre liée à cette recherche
inaccessible de la perfection. C’est bien connu, chercher à
obtenir quelque chose, qui par définition est impossible à
avoir, ne peut que susciter frustration, colère et
finalement apathie.
Or, le mépris pour la liberté dans le domaine économique
vient certainement et au moins en partie de la croyance en
un État parfait qui saurait trouver les solutions idéales à
tout problème posé. Il suffit de voir la façon dont a été
abordée la énième réforme du collège. Plutôt que de
considérer que l’Éducation nationale a avant tout besoin de
diversité, la nouvelle réforme impose à tous les collèges de
France des programmes modifiés qui ne peuvent évidemment pas
convenir à tous. Pourquoi décider de supprimer certaines
disciplines – Latin, Grec, 1ère langue – qui, à défaut de
convenir à tous, intéresseront certains élèves. De même, en
matière de santé, conformément au vaste mouvement engagé
dans les années 1990, le système perd de plus en plus de
flexibilité au fur et à mesure que le pouvoir est concentré
au sein des Agences régionales de santé publique.
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« Le mépris pour la liberté
dans le domaine économique vient certainement et au moins en
partie de la croyance en un État parfait qui saurait trouver
les solutions idéales à tout problème posé. » |
Or, justement la société française souffre avant tout de son
État qui à force de croître à tort et à travers, à force
d’intervenir pour un oui ou pour un non, empêche les autres
institutions concurrentes de jouer leur rôle et les
individus d’exprimer leurs choix, d’être en contrôle de leur
vie.
Ces institutions, de la coopérative fondée sur
l’autogestion, à l’entreprise, à la famille, aux syndicats,
en passant par les associations sans but lucratif ou autres
mutuelles, ont vu leur rôle diminuer au fur et à mesure
qu’on avançait dans le 20ème siècle.
Ce modèle institutionnel concurrentiel – défendu par des
économistes français comme Bastiat, Comte ou Dunoyer ou
encore le prix Nobel 1974 Friedrich Hayek – est le type même
du choix libéral. Il reconnaît simplement qu’aucune
institution n’est parfaite et capable à elle seule de
résoudre les myriades de problèmes qui se posent à nous
quotidiennement. C’est en quelque sorte un choix humble et
pragmatique. Nos sociétés complexes ont un défi à surmonter,
elles ne peuvent pas fonctionner sur le modèle de la tribu
où tout le monde se connaît. Elles ont besoin d’outils
sophistiqués comme l’institution de la propriété, qui génère
la responsabilité, ou encore le système de prix.
Ces derniers sont essentiels à ce qu’on appelle le calcul
économique, sans lequel le risque est de gaspiller les
ressources de façon incommensurable. Or, justement, au fur
et à mesure qu’une société s’étatise, les prix perdent de
leur substance et se révèlent incapables d’orienter
intelligemment l’allocation des ressources. La sphère
publique, chargée de multiples objectifs souvent
contradictoires s’éloigne des conditions réelles du marché
et donc d’une gestion parcimonieuse des ressources. Dans le
secteur public, les décisions sont prises par des individus
qui n’assument pas patrimonialement les erreurs. La mise en
place d’impôts supplémentaires peut permettre d’éponger les
erreurs, ce qui limite fortement l’incitation qu’il y a à
faire un usage efficace des ressources.
Il est temps de comprendre en France que le libéralisme
économique s’inspire de la même philosophie que le
libéralisme social bien compris. Ses solutions ne sont pas
parfaites, mais elles créent un cadre institutionnel
flexible et responsable qui favorise l’adaptation aux
conditions réelles de l’existence.
*Texte d'opinion d'abord publié
sur le site de l'Institut économique Molinari, le 3
décembre 2015.
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Première
représentation écrite du mot « liberté » en Mésopotamie,
environ 2300 av. J.-C. |
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