(Le Devoir, 20 juillet 1994) |
par Martin Masse
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Qu'est-ce
qui casse encore plus les pieds que le discours pleurnichard des nationalistes
indépendantistes? Celui des nationalistes fédéralistes!
On y retrouve la même incohérence, le même sentimentalisme
naïf, le même défaitisme, la même incapacité
à se définir et agir de façon autonome sans avoir
recours à une abstraction collective aux contours utopiques.
On a pu le voir dans la
lettre du sénateur Claude Castonguay au Globe and Mail que
publiait Le Devoir, samedi dernier.
M. Castonguay fait tous
les bons constats: nos institutions parlementaires sont mal adaptées;
la confusion dans les rôles de chaque niveau de gouvernement est
source de conflits et de dédoublements coûteux; les finances
publiques canadiennes sont dans un état désastreux; et l'immense
bureaucratie outaouaise, inefficace et isolée de la vie réelle,
fait du Canada un pays surgouverné.
Le problème ne concerne
pas uniquement la place du Québec au sein du Canada. L'excès
de centralisation et d'interventionnisme étatique est une maladie
qui affecte aussi la fédération américaine, comme
je le mentionnais la semaine dernière. Si l'on veut vraiment trouver
une solution à ce cul-de-sac politique et économique, il
faut mettre le problème en perspective et voir quelles options réalisables
s'offrent à nous.
M. le sénateur,
qui oeuvre dans ce domaine depuis avant ma naissance, devrait avoir suffisamment
de perspective historique pour aller au-delà du constat de faillite
et nous offrir des alternatives pertinentes. Mais que fait-il plutôt?
Il nous sert les jérémiades habituelles de ceux qui se sentent
impuissants devant une situation qu'ils ne contrôlent plus et qui
évolue dans un sens qui ne leur plaît pas.
M. Castonguay
Le chantage émotif,
c'est tout ce qui reste comme stratégie après l'aveu d'échec
et d'impuissance. À la suite d'un aussi poignant exposé sur
ces
Je ne sais pas pourquoi
le Globe n'a pas publié cette lettre du sénateur, mais il
mérite sûrement l'éditorial cinglant qui se moquait
de sa
J'aurais une suggestion
à faire à M. Castonguay. Si, comme il le dit dans une seconde
lettre au Globe and Mail qui paraissait aussi samedi dernier, il
n'est pas et n'a jamais été en faveur de l'indépendance,
une autre option s'offre à lui.
Il existe au Canada anglais,
comme aux États-Unis, un courant de pensée conservateur qui
s'oppose à la centralisation et à l'interventionnisme étatique.
Dans sa forme la plus radicale, on le retrouve dans les écrits d'un
William Gairdner. Celui-ci publiait récemment un ouvrage controversé
où il propose de réduire le gouvernement fédéral
à sa plus simple expression et de donner tous les autres pouvoirs
aux provinces.
Le
Une telle stratégie
n'aurait rien d'inusité. C'est la même alliance entre nationalistes
québécois et rednecks conservateurs de l'Ouest qui
a sous-tendu le
Nous, les indépendantistes,
n'en sommes pas là pour le moment. Mais je ne vois pas vers quelle
autre option peuvent se tourner M. Castonguay et ceux qui, comme lui, sont
encore assis entre deux chaises. Reconnaître, comme il le fait dans
sa seconde lettre, que
Si M. le sénateur
refuse de s'engager dans cette voie et n'a rien de plus pertinent à
proposer comme stratégie, qu'il nous épargne au moins ses
états d'âme et qu'il se retire du débat constitutionnel.
Trente ans d'échec, comme il dit, ça suffit.