Montréal, 8 - 21 janv. 2000 |
Numéro
53
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par Yvan Petitclerc
Cet automne le National Post célèbrait son premier anniversaire. Avec grand succès il faut dire. Après une seule année le Post talonne déjà le Globe & Mail et ce dernier a fort à faire pour s'adapter à cette nouvelle situation. À tel point que que le Globe n'a pas eu le choix d'emboîter le pas et d'offrir de plus en plus fréquemment à la une des images de jeunes femmes séduisantes. Ce serait cependant une grave erreur que d'attribuer le succès du Post à ce seul élément. En fait celui-ci tient à deux choses principales que les autres quotidiens ont très largement négligé depuis déjà bon nombre d'années: le simple plaisir de lire, et les articles étoffés de portraits historiques. Bref, un bon surplus d'information relative aux tendances du moment ou du passé et non pas à la seule actualité quotidienne au sens strict. |
Les débats politiques
ennuyants
Rien de plus ennuyant en effet que la sempiternelle question politique ou l'analyse ad nauseam du tout dernier sondage. Plus souvent qu'autrement on se retrouve alors soit avec le commentateur du journal X répondant au commentateur du journal Y, ou encore devant quatre profs d'université se parlant entre eux, le tout dans le cadre d'un soi-disant débat On dit souvent que c'est en connaissant son histoire que l'on est à même de mieux comprendre son présent. Or, quelle place accorde-t-on aujourd'hui à l'apprentissage de l'histoire? La place d'une formule creuse et d'un voeu pieux à usage ponctuel dans les médias écrits d'une part, une ou deux questions factuelles lors d'un quiz télévisé d'autre part.
Le Post a de ce point de vue un mérite certain. Récemment
encore je pouvais y lire une analyse des écrits de Gore Vidal, un
portrait de la légende du football de la LNF Vince Lombardi, un
portrait du feu peintre Ladislav Guderna, voire les grandes lignes de l'histoire
de la révolution sexuelle selon Playboy. Bref un combien
rafraîchissant rappel que l'histoire n'est pas faite que pour prendre
la forme de briques ennuyantes sur des tablettes poussiéreuses pour
quatre profs qui se répondent ensuite entre eux dans des magazines
universitaires lus par trois collègues. Sans compter que le Post
fait en passant un des meilleurs résumés historiques
du vingtième siècle. Gênant pour les autres quand on
considère que le journal n'est apparu qu'en 1998.
Il y a plusieurs années, nombre de milieux de gauche ont tourné le dos à la culture. Picasso? Trop sexiste, il avait des maîtresses. Francis Bacon? Pas assez politiquement correct. Hugh Hefner? On n'en parle même pas. Résultat? Les portraits de grands penseurs, philosophes, artistes, politiciens, ou personnalités religieuses sont esquissés dans le National Post et les citations de Camus, Cioran, Warhol ou St-Augustin se retrouvent elles dans Forbes Magazine.
Et lesdits magazines ou journaux de gauche pendant ce temps? On se demande
si on doit écrire une woman ou une womyn, on pratique
l'infantilisme ou l'anti-capitalisme primaire, et on se vautre dans les
lieux communs, le voeu pieux, et la psycho-pop ad nauseam: Aujourd'hui ce sont les journaux dits de droite qui informent et sont agréables à lire. Quant aux publications dites de gauche, elles sont encore trop souvent truffées de jargon, ennuyantes comme un jour de pluie, et superbes d'isolement narcissique. Comment en est-on arrivé là? Une chose est sûre. Tout espoir n'est pas perdu. Le site internet Salon par exemple fait à gauche ce que le Post fait à droite. Et dans les deux cas, c'est le lecteur et la qualité du débat public qui y gagnent. |
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