|
Montréal, 22 janvier 2000 / No 54 |
|
|
par
Martin Masse
Dans le jargon politico-bureaucratique habituel, les problèmes d'engorgement récurrents qui affectent les urgences des hôpitaux québécois ne sont pas des questions de nature bassement économiques mais plutôt, parce que la santé est un domaine contrôlé par l'État, des questions Cela permet aux politiciens et aux médias complaisants d'évacuer le véritable débat, qui repose sur l'efficacité d'un système d'allocation des ressources par rapport à un autre, pour lui substituer le baratin pontifiant habituel sur la nécessité de Il n'y a pas en effet 56 façons de gérer un secteur économique comme la santé, mais seulement deux: ou bien sa gestion est planifiée par des bureaucrates qui prétendent avoir assez d'information pour allouer les ressources nécessaires et répondre aux besoins de façon centralisée, ou bien sa gestion repose sur les mécanismes de marché que sont l'offre et la demande, la flexibilité locale des entreprises, la transmission de l'information à travers les hausses ou baisses de prix, etc. D'une façon ou d'une autre, il s'agit d'une question purement économique, un choix entre un bon système et un mauvais. On peut résumer par une courte phrase le problème central de la science économique: puisque les ressources à notre disposition sont nécessairement limitées et les besoins et désirs potentiellement infinis, comment peut-on allouer ces ressources de façon à répondre à nos besoins les plus pressants, nécessaires et urgents? |
Faire
des choix
La réalité nous force en effet à faire des choix, qu'il s'agisse de santé ou de quelque chose de simple comme la consommation d'eau. Et c'est le mécanisme de l'offre et de la demande qui nous indique les choix qui sont les plus appropriés selon nos besoins dans une situation donnée. Si l'eau est très abondante et peu coûteuse à fournir, on peut se permettre d'utiliser une partie de ce qui est disponible pour arroser sa pelouse et laver sa voiture. Si, à cause d'une sécheresse par exemple, l'eau devient plus rare, son prix dans un marché libre doit en conséquence augmenter, ce qui pousse les gens à l'utiliser uniquement pour des besoins plus pressants, comme l'hygiène corporelle. (Ce marché libre de l'eau est bien sûr hypothétique et n'existe pas en ce moment. Ce sont les municipalités qui contrôlent cette ressources et au lieu de laisser les prix augmenter lorsqu'il y a pénurie, elles ont recours à des moyens répressifs: leurs polices surveillent les citoyens et leur assènent des contraventions lorsqu'ils arrosent leur pelouse ou nettoient leur voiture en période de sécheresse.) Des usages moins pressants et nécessaires s'avéreraient alors être du gaspillage. Si, à cause d'une catastrophe encore plus marquée, l'eau devient difficilement trouvable, son prix peut atteindre des sommets astronomiques et chacun est alors incité à la consommer uniquement pour boire et survivre. Le prix agit comme information essentielle sur la disponibilité du produit par rapport à sa demande globale, et nous indique donc quelle part de nos ressources financières, correspondant à quel niveau Le réseau des soins de santé fonctionne de la même façon. Sans système de prix qui reflète l'abondance ou la rareté relative de ressources (aussi bien des appareils sophistiqués pour traiter le cancer que la ressources en main-d'oeuvre que sont médecins et infirmières), le réseau ne peut s'ajuster aux changements constants dans l'offre et la demande. Et, puisque les ressources sont là aussi inévitablement limitées, il est impossible de voir quelles sont les demandes les plus pressantes auxquelles il faut allouer plus de moyens et quelles sont celles qui le sont moins et qui peuvent attendre. Sans système de prix, les bureaucrates ne possèdent tout simplement pas suffisamment d'information sur l'état du réseau pour savoir ce qui est
On ne doit donc pas se surprendre si les urgences sont chroniquement engorgées et manquent constamment de moyens pour faire face aux crises. Seuls des hôpitaux complètement autonomes (idéalement, privés et faisant du profit, le profit étant la preuve que les ressources sont bien gérées sans gaspillage), fonctionnant avec un système de prix réalistes et possédant les pouvoirs nécessaires pour s'ajuster à la situation rapidement pourraient y arriver. Dans la situation actuelle, où tout ce qui compte est déterminé par des bureaucrates à Québec (la création des régies régionales n'a fait qu'ajouter une nouvelle couche de bureaucrates inutiles et la décentralisation annoncée n'est qu'une fiction), il est impossible pour des administrateurs d'hôpitaux de s'ajuster. Les conventions collectives, par exemple, les empêchent de payer des infirmières à temps double dans les périodes de crise ou de vacances, de façon à en inciter plus à travailler. Comment peut-on éviter une pénurie d'infirmières si on empêche l'offre de s'ajuster à la demande! Mieux planifier? Les déclarations de la ministre de la Santé Pauline Marois et de ses collègues au cours des dernières semaines trahissent l'essentiel de ce qui cloche, du point de vue de l'économie appliquée, dans ce dossier. Interrompant ses vacances au Mexique pour venir faire quelques commentaires insignifiants sur la crise et prétendre que tout est sous contrôle, la ministre aristosocialocrate a affirmé que Pour les bureaucrates, une épidémie de grippe qui arrive une semaine plus tôt que prévu est suffisante pour tout foutre en l'air! Et C'est aussi ce que répètent tous les illettrés économique qui ont offert leur opinion sur cette crise, sans même se rendre compte de l'absurdité de ce qu'ils disent. Impossible de planifier Comme des drogués qui ont toujours besoin de doses plus fortes pour rester sur leur high et éviter de subir les effets du sevrage, les bureaucrates croient qu'il faut planifier toujours plus pour régler les problèmes causés par la planification. Et les injections de fonds à la dernière minute pour pallier à la crise ne sont évidemment qu'une solution temporaire qui ne change rien à la situation. La crise des urgences ne peut se résorber que si l'on comprend, accepte et met en place une politique fondée sur la logique économique: i.e., il est impossible de planifier un secteur économique dans son ensemble, encore moins une économie au complet, comme le prétendent les communistes, socialistes, interventionnistes et autres étatistes tripoteurs de La
|
Le Québec libre des nationalo-étatistes |
Alexis
de Tocqueville
|
<< retour au sommaire |
|