Montréal, 2 septembre 2000  /  No 66
 
 
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David MacRae is a software consultant who works out of his home in St. Laurent, Quebec.
 
THE CONTRARIAN
  
UN SYSTÈME D'ÉDUCATION
QUI NE CONVIENT À AUCUN ÉLÈVE
(première partie)
 
par David MacRae
  
 
           Dans l'édition précédente du Québécois Libre paraissait une lettre d'un certain M. Duchastel qui avait peur qu'un système scolaire privé soit dominé par l'extrême droite religieuse (voir LA CONCURRENCE DANS L'ÉDUCATION, Courrier des lecteurs, le QL, no 65). Notre cher directeur a répondu que les clients d'un système privé choisiront les écoles qui leur conviennent et donc ceux qui ne veulent pas d'une telle éducation pour leurs enfants auraient toujours le choix d'aller à une autre école.
 
          Cependant, il n'a pas parlé de la raison pour laquelle ceux qui cherchent une éducation laïque pour leurs enfants sont désavantagés par le système étatique actuel. En fait, ce système est pire pour les parents non religieux. Des parents comme vous et moi. 
 
Parents désavantagés 
  
          Les groupes religieux dominent les écoles privées actuelles car ils sont à peu près les seuls qui forment des communautés assez larges pour être capables d'organiser des écoles malgré le monolithe étatique. Dans un certain sens, le système actuel correspond à leurs besoins. Ils organisent leurs propres écoles et agissent comme ils veulent. Ils nous laissent les écoles étatiques. Bien entendu, la situation est loin d'être parfaite de leur point de vue; ils sont obligés de payer pour un système qu'ils n'utilisent pas et les petites fonctionnaires se mêlent continuellement de leurs affaires. Mais au moins, ils ont leurs propres écoles. Dans un système encore plus étatique que le nôtre, celui de Cuba disons, ils n'auraient même pas cette option. 
 
          Les riches aussi sont capables de trouver des écoles qui leur conviennent. Ils ont les moyens de choisir l'éducation qu'ils veulent pour leurs enfants. À la limite, ils pourront payer un tuteur privé s'il le faut. 
 
          Ce sont les gens ordinaires comme vous et moi, ni riches ni religieux, qui sont surtout mal servis par le système actuel. Nous n'avons pas les contacts communautaires des groupes religieux qui les aident à trouver d'autres parents qui cherchent la même sorte d'éducation pour leurs enfants. Nous n'avons pas non plus l'argent des riches qui leurs donnent des options. En fait, nous n'avons à peu près pas d'option du tout. 
 
          Ce n'est pas pour rien si le mouvement d'éducation à la maison (le « home schooling ») explose présentement aux États-Unis et dans l'Ouest canadien. Dans les régions rurales autour de Calgary, presque 10% des parents se servent de cette option. Si vous n'êtes pas satisfaits du monolithe étatique, quel autre choix avez-vous? 
 
Système binaire 
  
          Toute bureaucratie a deux caractéristiques fondamentales: 1) le client est obligé de se conformer aux besoins du système, plutôt que le contraire et 2) le service offert se détériore avec le passage de temps. Jusqu'à un certain point, la deuxième règle est une conséquence de la première, c'est-à-dire que le service se détériore parce que les besoins du système finissent par avoir priorité sur les besoins du client. 
 
          Cette détérioration se voit très bien dans le système médical. Le service médical n'a pas disparu le lendemain de sa bureaucratisation en 1965. Si c'était le cas, on aurait vite corrigé le problème; on aurait vu que l'ancienne méthode était supérieure et on y serait retourné. Malheureusement, la destruction de notre système de santé a pris plus d'une génération. Entre-temps nous avons oublié les anciennes méthodes. Nous avons commencé à voir apparaître des problèmes dans les années 1980. Et la situation continuait à s'empirer. Maintenant nous parlons de crise. En fait, les seules parties du système médical qui fonctionnent bien aujourd'hui sont celles qui sont restées dans des mains privées, notamment la dentisterie et la médecine vétérinaire. Résultat: vous avez un meilleur traitement pour votre carie que pour votre cancer, un meilleur soin pour votre chat que pour votre grand-mère. 
 
  
     « Comment dit-on "chat" en anglais? Réponse: 3-1-20. Quoi? Vous pensez que la bonne réponse était "cat"? Ben, voyons. "C" est la troisième lettre de l'alphabet, "A" est la première... Est-ce que ce stupide jeu aide l'enfant à apprendre? Pas du tout évidemment. » 
 
  
          Inévitablement, la définition d'une bonne éducation est plus subjective que la définition d'un bon service médical. Donc on voit moins cette détérioration dans le système éducationnel. Mais, ne vous trompez pas, elle existe et elle est probablement plus sérieuse que celle du système de santé. Il y a des études américaines qui suggèrent qu'un baccalauréat aujourd'hui n'équivaut qu'à un diplôme d'école secondaire de 1948. Personnellement, j'irais plus loin. À l'heure actuelle, une éducation universitaire, surtout dans les lettres et sciences humaines, ne vaut pas deux sous. Au contraire, ça pourra vous prendre le reste de votre vie pour vous libérer de l'endoctrinement socialiste et féministe auquel vous aurez été soumis. La plupart des endoctrinés ne réalisent même pas ce qui est arrivé. 
  
          La dernière étape dans la bureaucratisation progressive de notre système d'éducation date de la même époque que celle du système médical, c'est-à-dire les années soixante. On peut remercier cette Révolution tranquille qui est tellement admirée par l'establishment gauchiste du Québec. En fait cette révolution consistait essentiellement en un transfert de quelques fonctions du privé (l'électricité) et de l'Église (éducation et santé) vers l'État. Quelle que soit votre opinion d'un système d'éducation dominé par le clergé, il a un avantage fondamental par rapport à un système dominé par l'État: on peut s'en sauver si on le veut. 
 
          Après quarante ans de système étatique, nous sommes finalement arrivés à sa fin logique: un système qui ne convient à aucun élève.  
 
Étude de cas 
  
          Mon fils vient de terminer sa quatrième année et il a donc commencé son cours d'anglais. Personnellement, j'aurais préféré qu'il le commence plus tard pour lui laisser la chance de se concentrer sur son français (il en a besoin) ou peut-être plus tôt afin de l'apprendre correctement. Mais le système a décidé que l'anglais commence en quatrième. Donc ça commence en quatrième. 
 
          La moitié de sa classe parle anglais couramment. Mon fils fait parti de l'autre moitié: ceux qui ne le parlent pas du tout. Le résultat ne devrait pas vous surprendre: les bilingues s'ennuient et ils dérangent les autres. Il n'y a pas un élève dans la classe qui bénéficie de cette situation. En fait, la professeure aurait pu en prendre avantage pour donner des leçons de leadership à une moitié de la classe, tout en aidant l'autre. Mais est-ce que vous pensez qu'elle est assez innovatrice? Certainement pas. « Ceux qui peuvent, font. Ceux qui ne peuvent pas, enseignent. » De toute façon, être trop innovatrice est une des rares façons par laquelle un prof risque de perdre son emploi.  
 
          De plus, le cours lui-même est un scandale. Il n'y a aucun vocabulaire exigé. À la place, nous trouvons des beaux petits jeux pour les enfants. Voici un exemple: comment dit-on « chat » en anglais? Réponse: 3-1-20. Quoi? Vous pensez que la bonne réponse était « cat »? Ben, voyons. « C » est la troisième lettre de l'alphabet, « A » est la première... Est-ce que ce stupide jeu aide l'enfant à apprendre? Pas du tout évidemment, mais ça aide la bureaucrate qui invente ces idioties à passer sa journée. Naturellement, pour justifier l'existence de cette fonctionnaire, il faut obliger les écoles à choisir leurs livres parmi une liste dite approuvée. Même les écoles privées, voire religieuses, sont soumises à cette folie. Tout dans l'intérêt de l'enfant. 
 
          Quant à ses autres cours, la situation n'est pas meilleure. Les maths sont un mélange curieux de théorie d'ensembles, de logique beaucoup trop avancé pour un enfant de son âge et du système de calcul égyptien. L'arithmétique? Trop ennuyant. C'est du drill ça. Apprends-le à la maison. Le français n'est pas si mal. On trouve des temps de verbe et de la lecture. Mais ça va me prendre des années à le guérir du mélange de fabulations gauchistes dont ses livres sont bourrés. 
 
          Quand le système est incapable de tenir compte de la possibilité qu'il y a des élèves dans le secteur français qui parlent déjà l'anglais, comment est-ce que vous pensez qu'il gère les services aux autres élèves ayant des besoins spéciaux, en commençant par ceux qui ont la malchance d'être muni d'un appendice superflu entre les deux jambes? 
 
          Aujourd'hui la masculinité des garçons est traitée comme une sorte de maladie mentale. Ils ont besoins de courir et de jouer activement. Au lieu de chercher des manières d'intégrer plus d'activités physiques dans la journée scolaire, nos bureaucrates ont trouvé une meilleure solution: droguez-les avec du Ritalin pour faire en sorte qu'ils restent tranquilles à leur pupitre comme de bonnes petites filles. Il serait difficile de trouver un meilleur exemple de la manière dont un système bureaucratique oblige ses clients à se conformer à ses besoins à lui, au lieu de s'adapter aux besoins du client (pour plus de renseignements sur la façon dont le système scolaire étatique nuit aux garçons, voir l'ouvrage récent The War Against Boys par l'auteure américaine Christina Hoff Sommers). Même si vous ne lisez pas l’anglais, j’espère que vous êtes en train de vous choquez contre le système d'éducation québécois qui s’occupe des préjugés du petit fonctionnaire nationaliste dans le fin fond du ministère de l’Éducation au lieu de fournir les outils nécessaires pour aider le Québécois ordinaire à affronter le monde actuel. 

          Il y aura toujours une nécessité pour une grande variété d'écoles pour la simple raison qu'il y a une grande variété d'enfants. Le système actuel ne sert guère mieux les besoins des filles que ceux des garçons. Le vrai malheur, c'est que tous les enfants sont soumis à une même éducation. Chacun doit avoir droit à l'éducation qui lui convient le mieux. Au lieu de cela, l'enfant est forcé de suivre un programme conçu par des fonctionnaires qui ne le verront à peu près jamais. En conséquence, le programme tend à se conformer aux besoins des fonctionnaires et non à ceux de l'enfant. 
  
          Dans la seconde partie de cet article, nous regarderons le système actuel. 
 
 
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