Du
Québec au Michigan
En plein milieu du show, je me suis mise à divaguer quelque peu
sur les comparaisons amusantes entre Eminem et, disons, un roi du patois
local comme Éric Lapointe ou encore chose, là, Kevin Parent.
Divaguer, dis-je, puisque le Centre Molson baignait solide ce soir-là
dans un océan de fumée subversive (Yes mama, j'étais
un tantinet stone).
Une différence majeure cependant entre la vulgarité étrangère
et locale: alors qu'on tente par tous les moyens d'empêcher Eminem
de présenter ses spectacles, personne ne trouve rien à redire
aux gueulages de Lapointe & Co. Vous ne trouvez pas ça bizarre,
vous?
N'allez surtout pas imaginer que c'est différent au Québec
que dans le Michigan d'Eminem. Pas du tout – c'est aussi plus pire icitte
qu'ailleurs. Demandez à Guy Bertrand [est-ce que quelqu'un sait
quand est-ce qu'il prend sa retraite, celui-là?] L'inévitable
avocat a présenté un mémoire, lors des états
généraux sur la situation du français – dont tout
le monde se fout éperdument –, critiquant la généralisation
du jargon (qu'il décrit comme une prononciation avachie rappelant
le créole) qui, apparemment, condamne le français à
la disparition.
[Pardon, permettez-moi d'ajouter un commentaire...]
J'en ai marre, mais marre, de leurs palabres. Vont-ils un jour finir par
nous laisser vivre en paix, nom d'un petit bonhomme? La qualité
du français n'est pas une affaire d'État, alors qu'on cesse
de vouloir en faire une préoccupation nationale. Enfin, merde.
Élucubrations
larosiennes
Je ne sais pas si vous avez suivi les élucubrations de Gérald
Larose dans les journaux. L'ancien président de la CSN en mène
large, au cas où vous l'ignoriez. Et attention, l'homme a une mission:
faire du Québec un pays « normal », c'est-à-dire
un pays dans lequel il n'y aurait qu'une seule langue officielle, le français.
« Ça m'ennuie de jeter de l'eau sur le feu de joie du PQ,
mais il me semble que le français n'a aucunement besoin d'eux pour
attirer l'attention. Sortez un peu de chez vous, et vous verrez à
quel point les gens s'intéressent à la langue française.
»
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Pour y arriver, M. Larose compte écouter les différents «
intervenants » qui s'exprimeront durant les audiences, pour
ensuite suggérer des « voies d'avenir »,
et enfin « proposer des règlements ».
Minute, est-ce que ça veut dire d'autres règlements, en plus
de ceux qui existent déjà? Arrghh.
Vraisemblablement. C'est M. Larose lui-même qui le disait, dans La
Presse du 2 novembre: « Lors des audiences, les
Québécoises et les Québécois seront invités
à sonder leur volonté collective de vivre en français
sur le continent nord-américain. À réfléchir
aussi sur les moyens qui s'imposent pour assurer la vitalité et
le pouvoir d'attraction de la langue française. »
Il y a plusieurs trucs qui m'embêtent dans le paragraphe précédent.
D'abord, d'où vient cette idée selon laquelle les Québécois
auraient comme « volonté collective »
de vivre en français? Personne ne m'a demandé mon avis, à
moi. Évidemment, je vis en français. Mais je vis (et travaille)
aussi en anglais. Et je ne m'en porte que mieux.
Ensuite, il y a cette histoire du « pouvoir d'attraction
» de la langue française. Ça m'ennuie de jeter
de l'eau sur le feu de joie du PQ, mais il me semble que le français
n'a aucunement besoin d'eux pour attirer l'attention. Sortez un peu de
chez vous, et vous verrez à quel point les gens s'intéressent
à la langue française.
Chic
le français
J'étais à Calgary il y a quelques semaines. À l'épicerie,
le bidule de paiement direct disait: BIENVENUE CHEZ SAFEWAY – Welcome
to Safeway. Le français prenait plus d'espace que l'anglais!
[Et vlan, dans les dents.] Un anglophone qui a de la culture, qu'il soit
Canadien ou Américain, se fait un point d'honneur d'utiliser tout
plein de mots et d'expressions en français dans ses conversations
de tous les jours, en plus d'envoyer ses marmots en immersion française.
Pourquoi? Parce que c'est très chic, ma chère.
Et ça n'a rien à voir avec Gérald Larose.
Tout ça pour dire: laissez-nous donc tranquilles avec vos états
généraux et autres cirques linguistiques. Le français
est à ce point charmant qu'il n'a pas besoin du PQ pour «
survivre ». En fait, ce serait plutôt le contraire:
la qualité de la langue, autant parlée qu'écrite,
n'a jamais été si pauvre que depuis l'entrée en vigueur
de la Loi 101.
Ce n'est pas un mystère. Les gens comme Kevin Parent ou Eminem sont
populaires pour une raison bien simple: c'est tout ce que les enfants de
la Loi 101 sont à même de comprendre.
Téléphone maison?
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