Une hypothèse est que ces énoncés ne sont que pure
rhétorique politique sans cohérence logique. Des déclarations
du Dr Szeming Sze, membre de la délégation chinoise à
l'origine de la création de l'OMS, appuient cette hypothèse:
« tout était politique »,
dit-il. L'hypothèse, toutefois, n'explique pas pourquoi les activités
actuelles de l'OMS semblent bien cohérentes avec les objectifs et
les termes originels.
Diverses
façons de lutter pour la santé...
Avec son budget bi-annuel de 2,2 milliards de dollars (pour l'exercice
2002-2003), l'OMS réalise sans doute des œuvres utiles dans les
pays pauvres – par exemple en luttant contre le paludisme, la tuberculose
ou le SIDA. Mais ce ne sont là que trois des 35 domaines d'activité
de l'Organisation. Celle-ci consacre des ressources importantes à
des domaines qui sont moins du ressort de la santé publique au sens
classique que des styles de vie ou des choix de valeurs: tabac (25 millions
de dollars), santé mentale et toxicomanies (28 millions de dollars),
santé de la femme (15 millions de dollars), développement
durable (18 millions de dollars), santé et environnement (50 millions
de dollars), sans compter toutes les activités de promotion, de
propagande et d'administration. La seule administration de l'OMS coûte
284 millions de dollars (toujours sur l'exercice bi-annuel 2002-2003).
Il faut, rappelle la présentation du budget 2002-2003, «
envisager la santé sous un angle plus large ».
Le domaine d'activité appelé « Promotion
de la santé », qui figure dans la catégorie
« Surveillance, prévention et prise en charge
des maladies non transmissibles », vise à «
Réduire les risques pour la santé grâce à
des politiques et des interventions adaptées à l'âge
et sexospécifiques, axées sur les déterminants de
la santé au sens large. » (Le terme «
sexospécificité » est employé par l'OMS
pour rendre l'expression américaine « gender
considerations ».)
On observe également la préoccupation de l'OMS pour le «
complet bien-être social » dans le domaine
d'activité appelé « Santé mentale
et toxicomanie », qui englobe l'ancienne rubrique «
Changements sociaux et santé mentale »
et qui concerne notamment la consommation de boissons alcoolisées.
Mais c'est peut-être le domaine du tabac, où l'OMS mène
une véritable croisade, qui est le plus révélateur
des tendances d'hygiène sociale de l'organisation internationale.
Malgré le budget relativement faible qui lui est consacré,
la lutte contre le tabac fait partie des champs d'activité prioritaires
de l'OMS. Dans son allocution du 14 mai devant l'Assemblée mondiale
de la Santé, Gro Brundtland, Directeur-Général de
l'OMS, attribue les décès dus au tabac « à
une recherche malsaine du profit ». Ignorant l'approche
économique et les recherches des 20 dernières années,
elle parle d'un « profit recueilli par un petit nombre,
que les sociétés paieront cher en traitements et en pertes
de productivité ». Elle ajoute: «
Le tabac rançonne la société. Il vole des vies
et des ressources déjà insuffisantes. […] Soyons clairs :
le tabagisme est une maladie transmissible. »
« Les compagnies de tabac sont intéressées et doivent
être écartées des débats. Par contre, les bureaucrates
de la santé publique et les politiciens sont désintéressés
et peuvent prendre seuls des décisions pour tout le monde.
» |
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Un autre exemple de l'intransigeance de l'Organisation: en octobre 2000,
l'OMS a invité « toutes les parties intéressées
à exprimer leur point de vue » sur le projet
de Convention-cadre pour la lutte antitabac, qui vise une intensification
de la réglementation dans le monde, mais n'a laissé aux intervenants
que cinq minutes pour défendre leur opinion. Les fabricants de tabac
qui ont participé à cette « consultation »
ont adopté une attitude défensive, prudente, voire soumise.
Dans un communiqué émis à la fin des audiences, Gro
Brundtland a interprété leur attitude comme de la mauvaise
foi.
Une résolution de l'Assemblée mondiale de la Santé
a également vilipendé l'industrie du tabac. Le communiqué
de l'OMS déclare: « La résolution reconnaît
que la confiance du public sera renforcée par la complète
transparence des affiliations entre les délégués à
l'Assemblée de la Santé et à d'autres réunions
de l'OMS et l'industrie du tabac. ». Autrement dit,
les compagnies de tabac sont intéressées et doivent être
écartées des débats. Par contre, les bureaucrates
de la santé publique et les politiciens sont désintéressés
et peuvent prendre seuls des décisions pour tout le monde. Cette
naïveté est contraire aux enseignements de la science économique,
qui explique en partie l'inefficacité des pouvoirs publics par les
intérêts catégoriels de la classe politique et bureaucratique.
En 1999, l'OMS a même tenté de mettre la religion au service
du Jihad contre le tabac, en organisant une « Réunion
sur le tabac et la religion » afin « d'explorer
les nouveaux partenariats possibles et de renforcer les partenariats existants
en vue de faciliter les activités de lutte antitabac ».
Malheureusement pour l'OMS, ni le représentant catholique ni, surtout,
le professeur Jean-Claude Basset, pasteur de Genève, ne se sont
montrés très réceptifs à la croisade antitabac.
Parlant du fumeur adulte, le Pr Basset a déclaré que «
les idéaux de la santé peuvent certes lui être
proposés mais non imposés dans la mesure où il peut
privilégier d'autres valeurs comme la détente et le bien-être
que lui procure le tabac ».
...mais
une seule façon d'être en santé
Le problème est bien celui-là. Personne n'est contre la santé
maximum, toutes choses étant égales par ailleurs. Mais les
individus font tous les jours des choix qui compromettent leur santé,
témoignant ainsi que la vie végétative n'est pas leur
idéal. La question est de savoir si ces choix seront faits par chaque
individu, selon ses propres préférences, ou si certains imposeront
leur mode de vie préféré aux autres.
L'OMS privilégie toujours les choix collectifs et affiche une répulsion
contre la liberté et la diversité du marché. Gro Brundtland
déclare: « Cependant, l'essentiel de la recherche
biotechnologique est maintenant effectué dans les pays industrialisés,
le plus souvent sous l'influence des forces du marché. D'un point
de vue éthique, cela est inacceptable. » L'OMS
semble en guerre contre tout ce qui ressemble à la liberté
économique et aux choix individuels.
Dès lors, le mystère de l'OMS s'éclaircit. L'Organisation
peut, nonobstant les choix individuels, s'atteler à la tâche
de créer « un état de complet bien-être
physique, mental et social » pour tous. Car c'est elle
qui détermine ce qu'est le bien-être mental et social; c'est
elle qui sait ce qui est bon pour chacun, et qui, avec l'argent des contribuables,
montre le chemin vers le Meilleur des Mondes.
1.
Les documents de l'OMS que nous citons sont disponibles à www.who.int/home-page/index.fr.shtml.
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