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Montréal, 30 mars 2002 / No 101 |
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par
Martin Masse
Les Français ont l'habitude d'entendre parler des |
À l'échelle provinciale, il y a d'abord eu cette histoire
de lobbying qui a coûté son poste à un influent ministre
péquiste. Le gouvernement québécois gère des
centaines de programmes ayant pour seul but la distribution de subventions,
crédits d'impôt et autres Sur le plan municipal, ce sont les nouvelles villes fusionnées de Montréal et Longueuil qui attirent l'attention par l'octroi sans appel d'offres d'importants contrats à des amis et des partisans des partis récemment élus. Doit-on se surprendre si ces histoires émergent quelques semaines à peine après des fusions qui ont multiplié la taille de ces administrations? Plus un gouvernement est gros, plus la bureaucratie et le pouvoir s'éloignent des citoyens, plus les enjeux sont importants et plus on joue gros avec l'argent des contribuables. Ce développement était tout à fait prévisible et on devra s'y habituer maintenant que nos méga-cités ont les moyens de tremper dans des méga-magouilles. Une histoire juteuse On a aussi entendu parler, au niveau fédéral, du trafic d'influence organisé par l'ex-ministre Alfonso Gagliano, nommé par hasard ambassadeur au Danemark alors que la soupe commençait à être chaude. Mais l'histoire la plus juteuse est sans doute celle qui implique la firme de relations publiques montréalaise Groupaction. Groupaction a reçu des contrats de publicité et de marketing pour une valeur de plusieurs dizaines de millions de dollars au cours des dernières années. Et, coïncidence, elle a versé plus de La firme s'est retrouvée à l'avant-scène lorsqu'on a d'abord découvert qu'un rapport de quelques dizaines de pages qu'elle avait rédigé pour le gouvernement au coût d'un demi-million de dollars avait Les caricaturistes se sont évidemment empressés de dessiner des photocopieuses Groupaction indiquant Un pouvoir concentré Selon une classification qui remonte à Aristote, la démocratie est censée être un régime politique où c'est l'ensemble du peuple qui détient la souveraineté, par opposition à l'aristocratie et à la monarchie où c'est un petit groupe ou un seul individu. Si, en théorie, tout le monde a un certain droit de regard sur le choix d'un gouvernement démocratique au moyen de son vote, en réalité le pouvoir reste malgré tout concentré dans les mains d'une petite clique. Cette clique peut gouverner à sa guise et se permettre à peu près n'importe quoi tant qu'elle garde l'appui d'une majorité des électeurs (majorité qui, dans un régime électoral comme celui du Canada, n'a pas à être absolue; le Parti libéral du Canada n'a été élu qu'avec 38% des voix en 1997). Contrôlant l'appareil d'État, le système judiciaire, le système d'éducation, etc., et ayant à sa disposition des fonds inépuisables et des centaines de milliers d'employés, elle dispose de moyens gigantesques pour influencer l'opinion publique, pour récompenser et motiver ses supporters et pour entretenir tout un réseau de clientélisme qui lui permettra de se maintenir au pouvoir. Le fameux rapport de Groupaction (qui, soit dit en passant, a choisi un nom plus qu'approprié comme parasite dans un système étatiste!) est ironiquement très révélateur de ce en quoi consiste cette dynamique de clientélisme. Le premier des trois rapports, intitulé Visibilité Canada, propose différentes pistes pour
L'éditorialiste en chef de La Presse, André Pratte, s'est indigné de cette série de scandales et surtout du fait que les politiciens ne semblent plus croire au Pourtant, cette tactique de manipulation de l'opinion publique par l'entremise d'une firme dirigée par des amis du régime qui financent le parti au pouvoir cadre parfaitement avec la Un choix limité On pourrait répliquer que la démocratie nous permet de mettre cette clique à la porte si nous sommes insatisfaits de la façon dont elle nous gouverne. En fait, notre choix est limité. La logique du système démocratique fait en sorte qu'il est pratiquement impossible de devenir compétitif sur le marché électoral sans jouer le même jeu, sans faire les mêmes promesses, sans chercher à convaincre une majorité qu'ils tireront plus de profits que de pertes des décisions du futur gouvernement. Elle fait en sorte qu'il est impossible de se maintenir au pouvoir sans créer son propre réseau de clients et sans entretenir une partie de la population aux dépens du reste, présumément pour notre bien-être à tous Les contrôles, les rapports des vérificateurs général et les réprimandes des Lorsque la règle de la majorité sert de critère ultime pour justifier toute action du gouvernement, sur quelle base peut-on établir d'autres barèmes d'évaluation? Cette règle peut s'accorder avec n'importe quelle pratique. En théorie, 51% de la population pourraient vivre en spoliant le produit du travail des 49% restants, et cela serait légitime puisque La démocratie est un régime collectiviste et le collectivisme est une idéologie immorale, parce qu'il justifie la coercition et la violence envers les individus pour les forcer à se conformer aux choix de groupes organisés. Ce n'est pas pour rien si l'État n'a cessé de grossir et de s'immiscer dans nos vies au 20e siècle, sous des régimes démocratiques comme sous des régimes despotiques. La seule limite que l'on peut opposer à cette logique est celle du respect des droits individuels. Toute la corruption, toutes les formes de parasitisme et d'exploitation qui peuvent être justifiées par la règle démocratique cessent de l'être lorsque l'on prend plutôt comme critère éthique ultime la liberté des individus, le respect intégral de leur personne et de leur propriété. Une révolte idéologique Si les structures de l'État ne sont pas modifiées et surtout si sa taille ne diminue pas, on lira encore dans 50 ans des éditoriaux déplorant la corruption politique et le fait que rien ne semble avoir changé depuis l'époque de Chrétien ou de Duplessis. Et ce n'est pas en élisant des hommes et des femmes intègres Alors que nous glorifions aujourd'hui Aussi longtemps que nous croirons en la démocratie, que nous en ferons le critère absolu qui sous-tend la vie politique, nous seront imposés et taxés à la limite de la tolérance, nous aurons un État omniprésent cherchant constamment à nous manipuler, et nous aurons les scandales et la corruption politique qui découlent logiquement de ce type de régime.
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