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Montréal, 12 octobre 2002 / No 111 |
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par
André Dorais
Vous vous demandez pour qui voter aux prochaines élections? J'ai une suggestion pour vous: annulez votre vote. Pour ce faire, vous n'avez qu'à rayer tous les cercles du bulletin. Cela prend un certain courage et une conviction certaine. Il s'agit de la conviction que peu importe pour qui vous votez, vous finissez toujours par payer des choses que vous n'avez jamais demandées. |
La plupart des partis politiques essaient de cacher leurs véritables intentions pour se garder une marge de manoeuvre. Lorsqu'ils obtiennent le pouvoir, ils prétendent alors être bons gestionnaires pour justifier presque n'importe quoi. Ne soyez pas complices de ce jeu, ne faites pas en sorte qu'ils trouveront l'excuse pour vous taxer. Ils prétendront que c'est pour votre bien, mais ne soyez pas dupes. Le Bien ne s'impose pas. Ne pas voter c'est bien, mais annuler son vote c'est mieux. Il en est ainsi par l'interprétation plus grande qu'on peut donner au fait de ne pas voter. Cela laisse aux politiciens le loisir de dire que les gens n'ont pas voté parce qu'ils avaient des empêchements. Annuler son vote exclut cette interprétation et permet plus facilement de dire qu'il s'agit d'un vote protestataire. Lorsque la majorité protestera ainsi, ils n'auront guère le choix d'en tenir compte. Annuler son vote signifie, à mes yeux, ne pas vouloir se faire voler, ne pas vouloir voler les autres, ne pas être complice de vol et de fraude, dire aux politiciens que je n'ai pas besoin d'eux. C'est une façon concrète de penser et de défendre l'idée qu'il en serait mieux ainsi pour tous. Une autre Révolution tranquille Beaucoup de gens au Québec se croient émancipés parce qu'ils se sont défaits de l'emprise de l'Église sur leur vie. Nous qualifions cette émancipation de Il y a émancipation lorsqu'il n'y a plus de tutelle, lorsqu'il y a suffisamment de capacité et de maturité pour être autonome. Une autre Révolution tranquille est nécessaire pour se défaire de l'emprise de l'État sur nos vies. Vous faites les premiers pas en ce sens lorsque vous annulez votre vote.
Si vous croyez que je dis juste, alors il ne faut pas avoir peur de poser le geste. Rappelez-vous que la peur, comme l'amour, rend aveugle. Elle fait en sorte de considérer ses ennemis comme amis et vice versa. L'État n'est pas votre ami malgré la prétention contraire de ceux qui en tiennent les rênes. Non seulement faut-il s'en méfier, mais il ne faut pas consentir à jouer son jeu de prédilection: la social-démocratie. Précisons que la démocratie n'est pas en soi le problème, mais plutôt l'utilisation que les politiciens en ont fait, notamment au cours des cent cinquante dernières années. La démocratie est aujourd'hui au service du socialisme, on s'en sert comme moyen de redistribution, c'est-à-dire de vol commis au nom de la solidarité et du bien commun. On appelle cela la social-démocratie. Sous le couvert moral, il n'y a que vol et tromperie. La morale n'est pas de l'ordre du politique, elle ne peut appartenir qu'à l'individu. Celui qui prétend faire de la morale en votre nom vous trompe nécessairement. Lorsque vous votez, vous donnez implicitement votre consentement à la social-démocratie, car il n'y a pas de parti, du moins pas au Canada à ma connaissance, qui reconnaisse et qui propose de cesser de nous voler. Tous ce que les partis proposent est de le faire différemment. Je vous enjoins donc d'annuler votre vote, car voter implique que vous êtes à la recherche d'un groupe d'individus qui paiera pour vos choix. C'est un peu comme si vous étiez à la recherche d'un plus grand esclave que vous, car tous les participants ont le même but. Étienne de la Boétie, en 1552-3, avait bien compris que l'affranchissement de l'homme commence par le refus de donner son consentement au tyran, qu'il entendait de façon large et qui nous permet de dire aujourd'hui qu'il prend la forme d'un gouvernement démocratique: Encores ce seul tiran, il n'est pas besoin de le combattre, il n'est pas besoin de le defaire, il est soymesme defait, mais que le païs ne consente à sa servitude; il ne faut pas luy oster rien, mais ne luy donner rien; il n'est pas besoin que le païs se mette en peine de faire rien pour soy, pourveu qu'il ne face rien contre soy. Ce sont les peuples mesmes qui se laissent ou plustost se font gourmander, puis qu'en cessant de servir ils en seroient quittes, [C]'est le peuple qui s'asservit, qui se coupe la gorge, qui, aiant le chois ou d'estre serf ou d'estre libre, quitte sa franchise et prend le joug; qui consent à son mal, ou plustost le pourchasse(1).
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